Le dernier rapport publié lundi par la chambre territoriale des comptes de Polynésie française s’intéresse au groupement interprofessionnel du Monoï de Tahiti créé en 1992 par le Pays et dont la dissolution a été entamée en 2017. Un groupement financé par l’argent public, mais géré exclusivement par les producteurs privés sans aucun contrôle du Pays jusqu’en 2013.
« Objet juridique non identifié », « nébulosité statutaire », « aucune identité juridique définie »… Le groupement interprofessionnel du Monoï de Tahiti (GIMT) semble avoir déconcerté les magistrats de la chambre territoriale des comptes. Dans son dernier rapport publié lundi, la juridiction financière s’est intéressée pour la première fois à la gestion du groupement créé en 1992 par le Pays pour structurer la filière au moment de la création de « l’appellation d’origine » Monoï de Tahiti. Un groupement dont la dissolution a démarré le 1er janvier 2017 après des tensions entre les producteurs de Monoï.
Principale singularité, le groupement créé par le Pays et financé par de l’argent public (par une taxe parafiscale sur les exportations de monoï, NDLR) est dirigé exclusivement par les producteurs de monoï privés. Des entrepreneurs qui ne se sont pas beaucoup inquiétés du fonctionnement légal de leur structure.
« Anomalies » au pluriel
Premier problème de taille, le formalisme juridique prévu pour le groupement n’a jamais été respecté jusqu’en 2013. Le commissaire du gouvernement n’a été convoqué qu’une seule fois avant cette date. « Or sa présence conditionne la validité des décisions prises lors des assemblées plénières ». Selon la chambre, le groupement a également eu une lecture jugée « extensive » de son périmètre d’action, en achetant notamment un outillage de soufflage de flacon générique pour 3,1 millions de Fcfp. Une acquisition « contestable » au regard des statuts du groupement et présentée officiellement comme une « démarche promotionnelle destinée à favoriser les ventes locales ».
Ce flou juridique autour du groupement Monoï de Tahiti a « provoqué des incompréhensions de la part de certains présidents qui ont pensé pouvoir légitimement accorder des augmentations de salaire au directeur par décision unilatérale ». Le directeur a donc bénéficié, depuis son recrutement en 2006, de plusieurs revalorisations, avant que la situation ne soit dénoncée par le Pays en 2013 et que le salaire soit « ramené » à 650 000 Fcfp. Directeur qui signait notamment seul les chèques du groupement, alors que le règlement intérieur prévoyait la signature du président et du trésorier.
Vers une dissolution du GIMT
Depuis le 1er janvier 2017, le Pays a entrepris la dissolution du groupement interprofessionnel du Monoï de Tahiti. En effet, la situation s’est dégradée entre les professionnels du monoï concurrents et membres du groupement « jusqu’à aboutir en 2016 à un blocage ». « Alors que le GIMT avait été créé afin de structurer la filière et de fédérer les producteurs autour d’un objectif commun de développement, force est de constater que ces derniers sont aujourd’hui très divisés », conclut la chambre. Elle recommande au Pays de conserver son appellation d’origine, d’évaluer les performances des groupements de producteurs, de définir son assiette de taxation et ses objectifs afin d’octroyer des aides en fonction.