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La loi travail à l’Assemblée, sous haute pression de la rue et d’une partie de la majorité

Paris (AFP) – Le très contesté projet de loi travail, vanté mardi par François Hollande comme « texte de progrès », arrive dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale sous pression de la rue et d’une partie de la majorité, pouvant contraindre l’exécutif à recourir au 49-3, qui n’est cependant pas son « choix privilégié ».

Alors que salariés, syndicats et participants à « Nuit debout » étaient toujours mobilisés, jusqu’aux abords du Palais-Bourbon, François Hollande a défendu à la mi-journée « un compromis dynamique et juste ». Pour la ministre du Travail, Myriam El Khomri, qui ouvrira les débats, après quatre journées nationales de mobilisation, le 1er mai et le mouvement « Nuit debout », « l’heure du Parlement est venue ».

Les débats sont programmés jusqu’au 12 mai, sur quelque 5.000 amendements (près de la moitié du Front de gauche), quasiment autant que pour l’épique bataille sur la loi sur le mariage pour tous. Le vote global est prévu le 17. 

A l’appel de la CFE-CGC (réformiste), d’un côté, et des syndicats contestataires (CGT, FO, FSU et Solidaires), accompagnés de représentants des étudiants et lycéens, des rassemblements étaient organisés non loin de l’hémicycle avant le démarrage des discussions.

Des centaines d’opposants ont demandé aux députés de « prendre leurs responsabilités ». « Assez de cette société qui n’offre que le chômage et la précarité » ou « Retrait total, grève générale » figuraient parmi les slogans.

Depuis le matin et un sit-in de Nuit Debout, les abords de la chambre basse étaient sous haute surveillance, un député LR évoquant sur Twitter des allures de « camp retranché ».

Hasard du calendrier, ce 3 mai marque les 80 ans du Front populaire. Jean-Claude Mailly (FO) a appelé l’exécutif à ne pas « trahir » un de ses héritages en « flinguant la négociation de branche ».

Côté patronat, Pierre Gattaz (Medef) a menacé de se retirer de la négociation sur l’assurance chômage si « rien ne bouge ».

– Premier test avec une motion de rejet –

Le texte a été remanié avant même sa présentation, reportée de deux semaines, en conseil des ministres en mars, puis amendé en commission. 

Primauté de l’accord d’entreprise en matière de temps de travail, nouvelles modalités pour les licenciements économiques ou les référendums d’entreprises, ou encore création du Compte personnel d’activité: les 54 articles font l’objet de milliers d’amendements. « C’est pour aller vers une obstruction », a dit le chef de file des socialistes, Bruno Le Roux.  

Les parlementaires LR défendent un retour à la version initiale, jugeant le texte désormais « édulcoré ». « Il ne reste plus grand-chose », dit François Fillon, le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde confirmant mardi que les centristes voteraient contre, eux qui étaient « prêts à voter la version I ».

A gauche, le rapporteur Christophe Sirugue (PS) a jugé possible que le « déficit » de quelque 40 voix pour une majorité, évoqué la veille en citant les « frondeurs » socialistes mais aussi « les opposants +de bonne foi+ » dans la majorité, soit en train de se « résorber » avec la suite du travail pour « rééquilibrer le texte ». 

D’où des amendements sur le périmètre d’appréciation des difficultés économiques d’une multinationale (international et non national) et sur les accords d’entreprise, qui pourraient être soumis à un contrôle de la branche professionnelle.

Devant un groupe socialiste pas comble et à l’ambiance « un peu tendue » mardi matin, Manuel Valls a tenté de convaincre les hésitants. « Nous avons conclu un accord avec les syndicats réformistes! Il faut en tenir compte », a-t-il notamment plaidé.

Le groupe PS, qui n’a pas seul la majorité absolue, peut compter sur des voix de radicaux de gauche et d’écologistes réformistes. Mais écologistes contestataires, Front de Gauche et surtout une majorité des LR et UDI vont probablement voter contre l’une des dernières grandes réformes du quinquennat.

L’exécutif pourrait donc recourir à l’article 49.3, comme en 2015 pour faire passer sans vote la loi Macron. Ce « n’est pas un choix que nous privilégions », a cependant assuré Manuel Valls dans la nuit. 

Dans une telle hypothèse, les groupes LR et UDI sont prêts à dégainer une motion de censure. 

Dès la fin de journée, le texte sera soumis à un premier test avec un vote sur les motions de rejet et de renvoi en commission des députés Les Républicains.

Le Front de gauche votera ces motions sur un « texte de régression sociale », tandis que les écologistes contestataires voteront le seul renvoi en commission. Les « frondeurs » n’avaient pas tranché officiellement, même si l’un d’entre eux a fait savoir qu’il ne voterait pas ces motions.

Manifestation contre la loi travail à Paris, le 3 mai 2016. © AFP

© AFP ERIC FEFERBERGManifestation contre la loi travail à Paris, le 3 mai 2016

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