Radio1 Tahiti

La rage à fleur de peau

©PB

A.H. est un écorché vif. S’il présente plutôt bien, sérieux et travailleur, ce jeune homme de 31 ans a vécu une enfance difficile qui parfois se rappelle à lui. Et dans ces cas-là, la rage l’emporte sur la raison et les poings sur la parole. Il a été condamné à six mois de prison ferme pour avoir frappé sa propre mère et sa concubine, alors qu’il était sous l’emprise de l’alcool.

A.H., 31 ans, est un travailleur acharné. Il a une patente d’électricien et ne ménage pas sa peine pour subvenir aux besoins de sa famille, sacrifiant week-ends et jours fériés à son travail et se contentant pour le repas de midi d’un morceau de pain et d’une boite de sardines, afin de faire des économies pour chérir ses proches. Sa concubine et sa fille de six ans.

Mais parfois ses vieux démons reviennent le hanter. Des vieux démons qui l’ont accompagné durant son enfance où il vivait avec son père, un muto’i qui le frappait et le laissait attaché parfois plusieurs jours à l’aide de menottes. Un père que sa mère avait quitté alors qu’il avait quatre ans à cause de sa violence.

Si cela ne l’a pas empêché de s’épanouir intellectuellement, il est titulaire d’un Bac pro et s’exprime dans un langage châtié, c’est le manque total d’affection, dont il a souffert étant enfant, qui revient fréquemment le hanter. Surtout quand il a bu.

Une soirée qui vire au cauchemar

En janvier 2020, il est au restaurant avec sa concubine. Une sortie qu’il ne voulait pas faire, sentant que cela allait mal se passer. Une prémonition qu’il aurait dû écouter comme la suite des événements va le montrer.

Le repas terminé, alors qu’il avait bien bu, il s’éternise à discuter avec le barman malgré les demandes répétées de sa compagne qui désire rentrer. À force d’insister elle arrive à le faire sortir du restaurant. Mais une fois dans la voiture, il la frappe, lui cassant une dent et lui demande de lui restituer les cadeaux qu’il lui avait offerts.

Elle s’extirpe de la voiture et file chez sa mère pour qu’elle l’emmène au domicile de sa belle-mère afin de récupérer leur enfant. Arrivées chez sa belle-mère, elles entendent des cris et voient A.H. en train de frapper sa mère à coups de pieds et de poings et de lui hurler, « c’est à cause de toi si je suis comme cela » tout en la traînant par les cheveux alors qu’elle était au sol. Une scène dont les séquelles pour sa mère laissent imaginer la violence. Fracture du nez et de la mâchoire.

« Je veux être le protecteur qu’elle attend »

À la barre, A.H. ne se souvient plus de rien, même s’il reconnaît qu’il s’est montré violent par le passé envers sa concubine, malgré tout l’amour qu’il lui porte. « Je veux changer, je veux être le protecteur qu’elle attend, c’est grâce à elle que j’ai avancé dans la vie. » Toutefois il lui reproche de ne rien faire à la maison et quand il rentre du travail, c’est lui qui fait à manger car « elle ne fait rien. »

Si le procureur a invoqué la dangerosité du prévenu et requis à son encontre 18 mois de prison dont six avec sursis et mandat de dépôt, son avocate a plaidé un problème d’enfance non résolu. « Il a de la rage en lui, il se sacrifie pour sa famille mais il n’a pas le mode d’emploi pour construire sa vie. » Comme pour lui donner raison, Ariioi porte sur lui un t-shirt sur lequel est inscrit « No Tomorrow ».

Avant d’aller délibérer le juge lui demande s’il a quelque chose à ajouter pour sa défense. « Depuis que j’ai connu ma concubine, mon cœur de pierre est devenu un cœur de chair, et je regrette vraiment ce que j’ai fait. Je demande aussi pardon à ma mère, même si elle ne m’a jamais donné d’amour ».

Il a été condamné à 12 mois de prison dont six avec sursis, sans mandat de dépôt, avec interdiction de rentrer en contact avec ses victimes et aussi une obligation de soins.