Alors que des discussions sont en cours avec la WSL sur l’avenir de la tour des juges à Teahupo’o, le Pays, propriétaire de la structure, réfléchit aussi à l’utiliser ailleurs. Et notamment sur les reefbreaks de Taapuna ou Vairao, où des compétitions pourraient profiter de cette plateforme de 14 mètres de haut pour l’organisation ou la prise d’images. Mais vu les contestations soulevées par son installation à Teahupo’o, et les craintes environnementales liées aux fondations, au ministère des Sports on prévient d’avance : rien ne se fera sans concertation avec la population, les habitués des spots, la fédération et les élus locaux.
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À Teahupo’o, c’est la passerelle du PK0 qui restera probablement le témoin le plus visible du passage des JO. Avec la rénovation de la marina et, peut-être, les futurs aménagements du domaine Rose, entre valorisation agricole, sportive ou sociale. Des choix qui restent à être entérinés. Mais dans tous les esprits, l’emblème de l’organisation de cette compétition, pour le meilleur et pour le pire, c’est bien la tour des juges. 525 millions de francs de coût pour le Pays et l’État, des mois de contestations, de débats, de révisions de plan, de travaux d’assemblage ou de fixation, pour une utilisation, pendant les épreuves qui semble avoir atteint tous ses objectifs, tant du point de vue audiovisuel que compétitif. Pas question de refaire le débat sur l’utilité de cet investissement, imposé par le besoin olympique en normes de sécurité et le manque de garanties offerte par l’ancienne structure en bois. Pour Nahema Temarii, « ce qu’il faut retenir, c’est qu’on a cette tour qui aujourd’hui est aux normes », et peut donc être réutilisée.
Discussion en « finalisation » avec la WSL
Une tour de 14 mètres, filmée sous tous les angles pendant la période olympique, et dont le démantèlement a bien commencé, comme nous l’annoncions la semaine passée. « Il y a beaucoup de gens qui m’appellent à ce sujet, note la ministre des Sports. La tour sera bel et bien démontée, le poteau sera bel et bien démonté lui aussi. Donc sur le plan d’eau au niveau de la passe de Hava’e, il n’y aura plus rien si ce n’est les fondations qui sont immergées ».
La structure en alu, propriété du Pays, sera elle stockée en attendant d’être réutilisée pour un autre évènement. On pense bien sûr à la Tahiti Pro, dont la place dans le calendrier du Championship tour doit toujours être officiellement confirmée pour 2025. Dans le milieu du surf, on s’interroge sur la date qui sera retenue par la WSL – en dernière étape du CT, en août, comme c’était le cas depuis plusieurs années, ou en mai, comme l’édition 2024 et comme cela avait déjà été fait par le passé ? – mais on s’inquiète assez peu de la volonté de la « League » de maintenir son étape polynésienne. Parce que, côté vagues, images, compétition, émotions, « Teahupo’o delivers » (« Teahupo’o tient ses promesses ») comme l’avait répété le président de l’ISA Fernando Aguerre après les JO. Aussi parce que, d’après Nahema Temarii, la WSL « finalise des discussions », en ce moment même, avec le gouvernement sur l’organisation des prochaines Tahiti Pro et l’utilisation de la tour. Des discussions qui impliquent à la fois le ministère des Sports, précise l’intéressée, et celui du tourisme, et donc la présidence.
« Aujourd’hui on sait comment le faire »
Mais les autorités du Pays ont aussi, plusieurs fois par le passé, émis l’idée d’une utilisation de la tour sur d’autres spots que Teahupo’o. Une façon de rentabiliser cet investissement important, lancé sous la mandature d’Édouard Fritch, et dont le « redimensionnement », acté par Moetai Brotherson, n’a pas fait baisser le coût. La tour des juges et ses 9 tonnes (contre une quinzaine au début du projet) est démontable et peut donc, à conditions de fondations adaptées, être équipée devant un autre spot de surf, à la Presqu’île, sur la côte Ouest ou ailleurs. Cette possibilité n’est pas abandonnée par le gouvernement. Mais vu les tensions engendrées par la première installation, Nahema Temarii préfère prévenir : « la principale préoccupation, ça va être la concertation de la population, que ce qui s’est passé à Teahupo’o ne se reproduise plus… parce que le 15 septembre 2023, on avait une population, je reviens encore dessus, qui découvrait ce qui allait leur arriver. Donc, on là, on tire des leçons du passé ».
Et donc on évite d’annoncer quoique ce soit avant d’avoir pris le pouls du terrain. « L’objectif, ce n’est pas d’aller faire des fondations n’importe comment, n’importe où. On a fait la démonstration qu’avec beaucoup d’humilité, beaucoup d’humanité, ça peut fonctionner. Avoir redimensionné cette tour des juges, ça a permis de ne plus aller sur le récif, sur la barrière, avec des grosses machines, mais « à main d’homme » quasiment, avec quelques outils. Donc aujourd’hui on sait comment le faire, on sait que c’est faisable, mais il faut concerter la population ».
Bientôt des discussions à Taapuna ?
À la Fédération tahitienne de surf, donc, de faire des propositions de spots à explorer. L’idée d’utiliser la nouvelle tour sur des beachbreaks, et donc de l’installer sur la plage plutôt que sur un récif, avait été un temps évoquée. Mais les deux spots fréquemment utilisés pour des compétition sont déjà équipés : Papara dispose d’une structure efficace et Papeeno a bénéficié, d’après la ministre, d’une rénovation de sa tour de l’embouchure à l’occasion des JO.
Restent donc les reefbreaks, synonymes de travaux de fondation à prévoir pour permettre l’installation de la tour. Un des spots de Vairao, où quelques compétition ont déjà lieu mais qui mériterait d’être mieux mis en valeur, a été évoqué. Comme, bien sûr, le site de Taapuna, très populaire, mais aussi très sensible vu les pressions environnementales importantes dont il fait déjà l’objet, et à ce titre surveillé de près par les riverains, associations locales et habitués. « Ça fait partie des sujets que j’ai abordé à plusieurs reprises avec Tavana Simplicio Lissant de Punaauia, reprend Nahema Temarii. Mais encore une fois, et c’est une grande satisfaction qu’aujourd’hui, les Tavana ne veulent pas s’engager sans avoir concerté leur population. Et je pense que c’est ça l’avenir ».