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L’Autorité internationale des fonds marins choisit une présidente anti exploitation minière

À l’issue de sa conférence à Kingston (Jamaïque), l’Autorité internationale des fonds marins a élu sa nouvelle présidente : la Brésilienne Leticia Carvalho, opposée à l’exploitation des ressources minières sous-marines dans l’état actuel des connaissances scientifiques, remplace le très controversé Michael Lodge, soutenu notamment par les Kiribati et Nauru, qui espéraient lancer l’exploitation au plus vite.

Depuis 10 ans, l’Autorité internationale des fonds marins, une agence de l’ONU, tente de négocier un code minier pour les zones extérieures aux eaux territoriales. Nickel, cuivre, cobalt, manganèse et lithium sous-marins sont indispensables aux nouvelles technologies, et malgré le coût encore prohibitif de leur extraction, les entreprises minières sont à la manœuvre pour obtenir les permis nécessaires.

Michael Lodge, président de l’ISA qui briguait un nouveau mandat, était favorable à une réglementation assez souple qui donnerait le top départ d’une industrie au potentiel multimilliardaire. Et qui fait parfois rêver les petits états océaniens, ou même Oscar Temaru qui, en rappelant la revendication indépendantiste sur toutes les ressources naturelles du fenua, n’a pas toujours été clair sur ses intentions précises dans ce domaine. Moetai Brotherson lui-même, qui avait voté en faveur d’un moratoire alors qu’il était député, avait déclaré « la philosophie du Tavini, c’est de dire qu’on ne peut pas dire qu’on n’exploitera jamais. »

Kiribati et Nauru pressés d’obtenir le droit d’exploiter les fonds marins

Le petit archipel des Kiribati a déjà sa propre compagnie minière, Marawa Research and Exploration Ltd, qui détient une autorisation de l’AIFM pour explorer et potentiellement exploiter 75 000 km2 de fonds marins.  Nauru, à travers Nauru Ocean Resources, filiale du canadien The Metals Company, est également demandeur d’autorisations d’exploitation depuis 2021 : c’est cette demande qui a lancé le compte à rebours juridique pour la création d’un code minier avant 2025.

Une étude inédite – partiellement financée par The Metals Company qui en a immédiatement contesté les conclusions – a été publiée durant la session de l’AIFM : les nodules polymétalliques tant convoités pourraient être des producteurs d’oxygène indispensables à la flore et la faune sous-marines. Pour contrer l’adoption d’un code qui ne serait pas capable de protéger le milieu marin, plusieurs pays dont la France (Emmanuel Macron s’est déclaré, en 2022, en faveur de l’interdiction de toute exploitation) ont lancé une initiative pour la création d’une « politique générale pour la protection et la préservation » de l’environnement, rassemblant toutes les mesures de protection de la biodiversité des fonds marins et qui servirait de garde-fou contre un code minier trop laxiste. Sans surprise, la Chine s’est opposée à cette proposition.

L’océanographe Leticia Carvalho – qui accuse les Kiribati d’avoir tenté de la soudoyer pour qu’elle retire sa candidature – est connue au Brésil pour s’être opposée à l’industrie pétrolière pendant près de 20 ans au ministère de l’Environnement. Avant la semaine dernière, elle travaillait à Nairobi (Kenya) pour le Programme des Nations Unies pour l’environnement. Son élection par 79 voix contre 34 à la présidence de l’AIFM est donc vue comme une victoire pour les opposants à l’industrie minière, saluée notamment par le secrétaire d’État à la mer, Hervé Berville.