Tribune Le développement des archipels passe par la décentralisation Cédric VALAX 2013-03-26 26 Mar 2013 Cédric VALAX Depuis novembre 2010, la Communauté de communes des îles Marquises (CODIM) regroupe les six communes de l’archipel et rassemble tous les maires autour d’un projet commun. La CODIM est le fruit d’une gestation longue et difficile. Les conseils d’archipels, introduits dans le statut de la Polynésie française en 1990 en furent les prémices, mais ils ne virent pas le jour et la réforme statutaire de 1996 les supprima tout simplement. Pour que soit possible cette nouvelle forme d’intercommunalité, il aura fallu attendre 2008 et l’adoption du nouveau code des collectivités territoriales, puis 2010 avec la loi de Pays permettant le transfert de compétences du Pays aux communes. La CODIM est ainsi venue bousculer le mode de fonctionnement des institutions du Pays, dont les décisions sont traditionnellement prises « en haut » par le gouvernement puis l’Assemblée, avant de « redescendre » vers les îles. La déconcentration administrative lancée par un précédent gouvernement en est une illustration: c’est l’administration centrale qui « descend » vers les administrés. La Communauté de communes permet, dans certains domaines, d’inverser le processus en faisant partir la réflexion de la base, là où s’expriment les besoins et les attentes de la population, et en faisant remonter les décisions vers Tahiti. Son existence implique ainsi une organisation politique nouvelle, où le niveau central se nourrit des volontés exprimées par la base. Être les acteurs de notre propre développement Cette expression a pris la forme d’un Plan de développement économique durable pour l’archipel des Marquises, à l’horizon de 15 ans. En effet, la CODIM vient de finaliser ce document de planification et de programmation, fruit d’une large concertation et d’un travail soutenu dans les domaines de compétences classiques (obligatoires) des communautés de communes, à savoir le développement économique et l’aménagement. L’objectif était d’appréhender ensemble un développement réaliste, construit sur les potentiels de l’archipel et la vision de l’avenir que nous souhaitons, notamment dans les secteurs du tourisme, de la pêche, de l’agriculture biologique, de l’art et de la culture. Notre force, c’est qu’au-delà des convictions et des engagements politiques de chacun, nous avons appris à travailler ensemble, à échanger, et nous sommes aujourd’hui unis pour envisager l’avenir des Marquises, qui sont ainsi devenues un espace de projets et de solidarité. Nous attendons beaucoup du nouveau gouvernement qui sera mis en place après les élections, en souhaitant qu’il soit issu du mouvement A Ti’a Porinetia, notamment la confiance du Pays et l’accompagnement et les moyens nécessaires pour la mise en œuvre de ce plan de développement. Créer un rapport de confiance La confiance, car le nécessaire transfert des compétences du Pays aux communes est source d’inquiétude au niveau central. Ce qui avait été traduit comme étant un « partage de compétences » par le ministère de l’Outremer en 2011 a finalement été considéré en 2012 par le Tribunal administratif comme un transfert définitif et irréversible. Cela n’a pas été sans générer certaines « crispations » du côté du Pays qui a vu là une véritable dépossession de compétences. Pourtant, les compétences de la CODIM ne peuvent s’exercer qu’avec le Pays, et uniquement dans le cadre de sa politique générale. Cette confiance réciproque est indispensable pour la sérénité des relations et la réalisation du plan de développement. La nécessité de décentraliser s’appuie sur deux aspirations. Il convient de mettre un terme d’une part à la « pensée unique », conçue à Tahiti du fait d’un pouvoir centralisé, et d’autre part à la « culture unique », celle issue d’une assimilation visant à noyer la culture marquisienne dans un tifaifai polynésien aux cotes mal taillées. Les Marquises sont fières de porter une culture qui lui est propre et qui a traversé les temps et l’histoire. Nous avons conservé notre langue et nos traditions et nous souhaitons les faire vivre au sein d’une Polynésie riche de ses diversités. Tout comme le gouvernement français a fait confiance aux Polynésiens en leur accordant un statut de large autonomie, le gouvernement polynésien doit faire confiance aux élus marquisiens pour construire pas à pas l’identité de leur archipel et reconnaître ainsi leur spécificité au sein de l’ensemble polynésien. Éloignée d’un simple affichage politique, la CODIM est l’expression présente d’un avenir où les archipels doivent pouvoir se construire eux-mêmes. La CODIM est une communauté de destin et de partage, une communauté faite d’élus responsables, de femmes et d’hommes fiers d’être marquisiens, polynésiens et français. Nous sommes convaincus que l’engagement de A Ti’a Porinetia en faveur de la décentralisation nous permettra enfin de vivre et concrétiser cette vision de la Polynésie française. Par Joseph Kaiha, président de la CODIM Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)