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Le groupe Degage devra bien payer la facture du Corsaire

Exhorté par le Port autonome de prendre la responsabilité de l’épave du navire qui avait fini par couler en octobre, Eugène Degage explique l’avoir vendu en 2018 à Francky Wong. Mais en l’absence d’enregistrement de cette vente au registre des douanes, le tribunal administratif a estimé qu’il était légitime pour l’établissement public d’adresser une mise en demeure – et à terme, une facture – pour son retrait à son dernier exploitant… « Au moins dans l’immédiat ».

Lire aussi : Fuite d’hydrocarbure du Corsaire : le port autonome dans le flou

Qui paiera pour le renflouement du Corsaire ? C’est la question qui se pose depuis plus de 6 mois au Port autonome. Le 9 octobre dernier, en fin de journée, l’ancienne navette qui avait un temps desservi Moorea ou les Raromatai avait finit par couler, près du pont de Motu Uta, après avoir été immobilisée dans le port pendant plus de 15 ans. Et l’épave de 840 tonnes est plutôt embarrassante : plusieurs fuites d’hydrocarbures ont causé des épisodes de pollution dans la zone, notamment à la mi-mars. Et le navire, qui d’après le port a « servi de débarras » pendant plusieurs années, est désormais couché sur le flanc, « entre 7 et 38 mètres de profondeur »,  sur des câbles optiques et les chaînes de fixation du ponton. Ce qui implique d’importants travaux de découpage pour pouvoir le retirer du fond sablonneux d’ici la fin de l’année. Le Port autonome est à la manœuvre dans ces opérations et pour cause : aucun propriétaire ne s’est manifesté ces derniers mois pour intervenir ou prévenir des dégâts plus importants.

C’est donc au dernier exploitant connu que le Port autonome a adressé une lettre dès le 11 octobre : le groupe Degage, qui avait intégré le Corsaire à la flotte Aremiti entre 2002 et 2005, avant que le bateau ne connaisse des avaries. La missive est plus particulièrement adressée à la société Tamarii Gestion et à la SNC Degage et Cie, structures gérées par Eugène Degage, contrairement à Aremiti, contrôlée aujourd’hui par son fils Tuanua. Le directeur du port met donc l’entrepreneur en demeure de « prendre toutes les mesures nécessaires » pour mettre fin au danger que représente le navire. Et, in fine, de payer la note avancée par l’établissement public.

Un email, mais pas d’enregistrement

C’est cette mise en demeure qui est remise en cause devant le tribunal administratif par le groupe maritime, qui assure, contrat à l’appui, avoir vendu en 2018 le navire à un autre armateur, Francky Wong et sa société Tahitian Cruise. Sans surprise ce dernier n’est pas prompt non plus à prendre la responsabilité de l’épave, et les débats sont entrés dans la technicité du droit maritime. Car la vente de 2018 n’a jamais été inscrite au registre des douanes ou à la DPAM, ni par l’acheteur ni par le vendeur, et la fiche matricule du navire comporte toujours le nom de Degage. La SNC rappelle toutefois avoir informé le port de la vente par un email de 2018. Et l’établissement a bien pris en compte cette information puisqu’il aurait adressé depuis des demandes fiscales au nouveau propriétaire. La société d’Eugène Degage estime en outre que l’état du bateau, « inapte à la navigation », l’exclut de la qualification de « navire » et rend inapplicable l’obligation d’enregistrement de la vente.

Le Corsaire ne navigue pas, mais est bien un « navire »

Suivant son rapporteur public, le tribunal n’a pourtant pas fait droit à cet argumentaire et retient qu’en l’absence d’enregistrement, la vente est inopposable aux tiers : « les obligations nées avant la réalisation de cette publicité sont à la charge du cédant », pointent les juges. Qu’importe si, au moment de la vente, le Corsaire n’avait plus de moteurs et que ses générateurs étaient en panne : « ces circonstances ne sauraient remettre en question la qualification juridique de navire donnée à ce bâtiment, mais sont seulement de nature à démontrer que ledit navire n’est pas armé pour naviguer ». Le tribunal administratif valide donc la démarche de mise en demeure du port autonome et, en creux, la responsabilité du groupe Degage sur le navire coulé… « Au moins dans l’immédiat » comme l’écrit la juridiction en titre d’un communiqué paru ce mardi. L’ancien propriétaire pourrait se retourner, à terme, contre son acquéreur de 2018, pour l’instant resté très discret.

Décision du tribunal administratif – Corsaire

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