À l’occasion des « 100 jours » du gouvernement, Jordy Chan a présenté un plan de rénovation d’abribus entamé « dès sa prise de fonction ». Une cinquantaine d’entre eux auraient déjà été repeints, recouvert et réparés, plus d’une centaine d’autres sont en « audit » et des bornes numériques annonçant les prochains bus sont aussi à l’étude… Le Pays, pourtant, le sait : il faudra faire beaucoup plus pour enfin convertir les Tahitiens au transport en commun.
Après la promenade de Motu Uta, le rond-point du Méridien, et le « tourne-à-droite » de l’avenue Pouvanaa a Oopa, le ministre des Grands Travaux et de l’Équipement Jordy Chan a présenté ce lundi une autre de ses mesures « rapides pour répondre aux besoins des usagers ». Cette fois, c’est le transport en commun qui fait l’objet d’une attention particulière : un plan de rénovation lancé « dès le début de la mandature » est en cours, et il fera bien sûr partie du bilan des « 100 jours du gouvernement », qui sera marqué ce mercredi soir par un discours fleuve de son président. Ainsi, une cinquantaine de ces abribus ont vu, ces trois derniers mois, leurs poteaux repeints « aux couleurs de la commune où ils se dressent« , leurs bancs, souvent taggués ou délabrés, être remplacés, et leur toit, pour la plupart en tuiles de bois, être remplacé.
Pas la fin du travail, puisque d’après les premiers résultats d’un audit lancé il y a quelques semaines, au moins 200 abribus, construits par le Pays, mais aussi par les communes, des associations et même des privés, jalonnent les routes de Tahiti. À la Direction des transports terrestres de terminer ce recensement et de commander des réparations à la Direction de l’équipement, qui devrait aussi compléter ce parc pour rendre plus « confortables et pratiques » une partie des 600 arrêts de bus de l’île. Il s’agit aussi d’équiper, à moyen terme, les principaux arrêts de bornes numériques qui permettront d’annoncer « en temps réel » le délai d’attente de chaque passager. « Aujourd’hui, les usagers doivent pouvoir attendre en sachant quand est ce que le bus va réellement passer, explique Lucien Pommiez, le directeur des Transports terrestres. Ça nécessite d’avoir des systèmes de transports intelligents, où on géolocalise des bus et où on va pouvoir dire par exemple ‘sur la ligne 2, prochain bus dans 10 minutes’. Ce sont des éléments d’infrastructures qu’il va falloir implanter ».
Implanter et payer : le coût de ce genre de matériel, qui nécessite une alimentation électrique (ou des panneaux solaires), et une connexion au réseau, n’est pas encore estimé par le Pays. Il ne devrait pas avoir de mal à se renseigner : ce genre de bornes existe par dizaine de milliers en métropole ou ailleurs.
Réforme tarifaire, discussions avec RTCT et voies réservées
Ce petit coup de jeune sur les abribus sera-t-il suffisant pour convertir au transport en commun des Polynésiens encore très accrochés à leur volant ? Pas sûr. D’autant que le réseau tahitien, malgré l’effort de modernisation de la mandature précédente (délégation de service public accordée à RTCT, importation de plus de 200 bus, dont 10% électriques, application smartphone pour vérifier les horaires de passage, arrêts clairement matérialisés avec programme horaire…) souffre encore de nombreux problèmes d’attractivité. Les bus sont toujours en retard, ils n’ont toujours pas la priorité dans le trafic toujours très encombré à l’approche de la zone urbaine, ils sont parfois pleins et sautent donc des arrêts, faisant fuir ceux qui peuvent s’offrir un mode de transport « plus fiable »… Jordy Chan l’assure : le gouvernement veut faire en sorte de « rendre ses lettres de noblesse » au transport public. « Nous réfléchissons à trois axes. Une réforme tarifaire, d’abord, pour simplifier la tarification existante et la rendre plus accessible à une partie de la population. La deuxième chose que l’on peut faire, c’est d’agir sur l’optimisation du service en adaptant mieux les moyens aux besoins, explique le ministre, évoquant des discussions avec le délégataire de service, RTCT. Et enfin à plus long terme, un projet qui est inscrit au programme du gouvernement, c’est celui du transport en commun en site propre. Ça prendra plus de temps à mettre en œuvre, mais nous y réfléchissons déjà. »
En « site propre », c’est-à-dire avec des voies dédiées sur les routes actuelles. Pendant la campagne, Moetai Brotherson avait montré une prudence particulière sur ce dossier qui fait exploser les coûts comme les polémiques. Le programme du Tavini prévoyait tout de même de « réduire l’utilisation des véhicules individuels, en mettant en place un vrai système de transport routier en commun gratuit fonctionnant à l’hydrogène ». Sur le plateau de Radio1, Tony Géros avait aussi, là aussi pendant la campagne, proposé « d’aller voir ce qui se passe ailleurs », et de visiter en particulier des villes qui utilisent des « tramways, des monorails ou des trams suspendus ». Depuis, pas d’annonces, et pas de calendrier. Au ministère des Grands Travaux, un groupe de travail a tout de même déjà été formé.