ACTUS LOCALESPOLITIQUE Le Pays veut faire encore durer la « cotisation exceptionnelle » d’assurance-maladie Charlie Réné 2024-11-07 07 Nov 2024 Charlie Réné Créée en 2019 pour quatre ans, ressuscitée en fin d’année dernière, cette cotisation maladie à 2,5 milliards de francs, « indolore » puisque compensée par une baisse de cotisation sur les accidents du travail et les prestations familiales, pourrait être reconduite en 2025 par le Pays. Toujours de façon « exceptionnelle », et toujours en attendant les « réformes structurelles » de l’assurance-maladie, qui ont avancé, mais restent à être votée… La mesure fait pourtant tousser le patronat, qui s’agace d’un « jeu de chaise musical » qui dure. C’est un transfert indolore pour les salariés, invisible, même si ce n’est une petite ligne sur les fiches de paie. Mais une ligne qui pesait tout de même l’année dernière un peu plus de 2,5 milliards de francs. Et ce n’était pas une première. 2019, le Pays avait créé, dans une loi du Pays, la « cotisation exceptionnelle d’assurance-maladie » (AME), destinée à résorber le déficit passé de la banche principal du RGS en puisant dans une autre branche alors excédentaires, celle des prestations familiales. Cette dernière avait donc vu baisser de 0,75 point son taux de cotisation patronal, et une cotisation équivalente avait été affectée à l’assurance maladie. La loi du Pays est alors claire : cette AME devait durer quatre ans maximum et donc disparaitre définitivement à la fin de l’année 2022. Un an plus tard, pourtant, le Pays revient à la charge et demande aux administrateurs CPS leur avis sur la réinstallation de cette cotisation, cette fois réhaussée à 0,96% et répartie entre les régimes Prestations familiales et Accidents du travail. Recettes attendues : 2,56 milliards de francs. De quoi limiter le déficit de l’assurance maladie pour l’année 2024, alors estimé à 4,3 milliards. Peu de succès pour la consultation en ligne Mais les partenaires sociaux sont clairs : cette cotisation « exceptionnelle » doit le rester, et donc être supprimée au 31 décembre 2024. Le gouvernement acquiesce : il s’agit seulement de se laisser le temps pour mener des réformes de fonds qui vont participer à rééquilibrer les comptes. « Elle est créée pour une durée maximale d’une année pour soutenir l’apurement du déficit cumulé du régime d’assurance-maladie dans le cadre de la réforme de la protection sociale généralisée », lit-on dans le texte finalement voté en décembre 2023 à Tarahoi. L’année est passée, des réformes ont été discutées, mais elles ne sont pas votée… et le gouvernement demande une nouvelle fois à faire perdurer le système. La cotisation, toujours « exceptionnelle » a donc une nouvelle fois été proposée aux administrateurs de la caisse. Pour avis, mais un avis obligatoire, que les autorités auraient aimé avoir au plus tôt pour boucler ses textes budgétaires. Du fait de plusieurs reports successifs du conseil d’administration, le bureau du 29 octobre dernier a lancé une procédure particulière : une consultation par correspondance des administrateurs… Qui ne se sont pas pressés pour répondre. Le scrutin en ligne s’est clos en début de semaine, avec pas suffisamment de votes exprimés – malgré la présence de 5 représentants du Pays sur les 15 sièges du conseil – pour pouvoir valider un avis. Le sujet sera donc mis à l’ordre du jour du prochain conseil d’administration, fin novembre, et le vote à l’assemblée, quoiqu’il arrive décisif, devrait être décalé. Une « garantie » pour 2025 Mais côté patronat, on ne cache pas son agacement. D’abord parce que ce « jeu de chaise musical », comme on le dit côté Medef, cache, une année de plus, la réalité des déficits de l’assurance maladie. « L’année dernière, on nous a dit qu’il fallait maintenir cette AME pour une année de plus, que les réformes, arrivaient, qu’on allait voir ce qu’on allait voir », rappelle un administrateur. « Il ne faut pas que ça devienne un fonctionnement normal : les branches et les cotisations sont séparées, c’est pour une bonne raison », note un autre, qui s’inquiète pour l’état des régimes ponctionnés. Avec l’augmentation des allocation fin 2022, la branche prestations familiales n’est plus aussi excédentaire, et va même basculer dans le déficit avec cette ponction. Quant à celle des accidents du travail, elle est aussi mise à contribution par le mécanisme de transfert vers l’assurance maladie mis en place en 2015 – pour compenser les sous-déclarations des accidents – que le gouvernement veut aussi revoir à la hausse en 2025. Côté Pays, on rappelle que les deux caisses cumulent « une quinzaine de milliards » de francs de réserve, et ne sont donc pas « mis en danger » par l’AME. On explique surtout que cette nouvelle année de « cotisation exceptionnelle » n’est qu’une « garantie » pour l’année 2025, au cours de laquelle certaines des réformes promises porteront bien leurs fruits. À commencer par celles qui visent au rééquilibrage des régimes. Le projet de loi du Pays « sur les conditions d’affiliation au régime des non-salariés et au contrôle de leur respect », a été transmis aux partenaires sociaux. La mise en application – promise de longue date – de la fin de la primauté du RGS devrait suivre, avec l’espoir pour le Pays et la CPS de lever 2 à 3 milliards de francs de nouvelles cotisations chez les près de 9000 salariés ayant aussi une activité patentés. Un an de plus, donc, et pas davantage. « On a déjà entendu ça », doutent certains partenaires sociaux. 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