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Le Pays veut une « taxe sur les voyageurs internationaux » dès 2025


Invité de la rédaction de Radio1 ce lundi, le ministre des Finances Warren Dexter a annoncé qu’il proposerait à l’assemblée de mettre en place une taxe d’entrée sur le territoire, qui s’appliquera à la fois aux touristes et aux résidents polynésiens. Une taxe forfaitaire perçue par les compagnies, et dont la présidence doit encore définir le montant. Une ancienne mouture travaillée sous la précédente mandature fixait une fourchette de 3 000 à 10 000 francs par aller-retour.

C’est une des mesures fiscales présentées ces dernières semaines par le ministre des Finances aux organisations patronales, et probablement l’une de celles qui fera le plus parler dans les débats budgétaires à venir à l’assemblée. Le gouvernement veut créer une « taxe sur les voyageurs internationaux » qui serait prélevée à chaque vol de l’extérieur vers le fenua.

L’idée de demander une contribution aux visiteurs à l’entrée du pays n’est pas neuve et elle connait dans la région un regain d’intérêt depuis quelques années. La Nouvelle-Zélande, par exemple, a mis en place son « International Visitor Levy » en 2019. Cette « contribution aux services publics et à des expériences de haute qualité lors de leur séjour en Nouvelle-Zélande », dont les Australiens et la plupart des nationaux du Pacifique, contrairement aux Polynésiens, sont exemptés, a même vu son tarif bondir de 35 à 100 NZD tout récemment. Le Japon a aussi mis en place, là encore en 2019, une « Sayonara Tax », qui comme sa version kiwie ne s’applique qu’aux visiteurs de passage et pas aux résidents, mais qui est collectée, elle, au départ du pays.

Au fenua, la question a plusieurs fois été débattue ces dernières années, le ministre des Finances Yvonnick Raffin avait même fait avancer l’idée, avant de buter sur des problématiques juridiques. Si Warren Dexter remet la mesure sur la table, c’est en précisant qu’elle est déjà inscrite noir sur blanc dans un document officiel : la stratégie Fāri’ira’a Manihini 2027, présentée fin 2022 à l’assemblée, et dont il était l’un des coordinateurs.

Toujours « forfaitaire », mais plus uniquement « touristique »

Cette stratégie touristique, qui prônait le « slow tourism » et la limitation des arrivées, a été en grande partie contredite par le gouvernement Brotherson et son objectif de 600 000 touristes (ou, depuis peu, « l’équivalent en recettes »). Mais plusieurs actions de FM27, qui ont l’avantage d’avoir été déjà discutées avec les acteurs de terrains, continuent d’être développée par l’exécutif. Cette taxe, définie dans le document comme une « taxe touristique forfaitaire à l’entrée » qui viendrait « privilégier les séjours longs », en fait partie.

Avec toutefois un changement important : la taxe est certes toujours « forfaitaire » mais elle n’est plus uniquement « touristique ». « Même les résidents qui seraient amenés à faire un vol international seraient redevables de cette taxe », précise le ministre de l’Économie et des Finances dans le studio de Radio1 et Tiare FM. Le responsable précise que c’est à la présidence – en charge du tourisme – de fixer le calendrier d’application. Le débat, au niveau politique, est en tout cas prévu pour cette fin d’année : « Même si elle ne s’applique pas au 1er janvier, on peut envisager un report au courant de l’année 2025″, explique Warren Dexter.

Il faudra bien sûr aussi fixer le montant de ce forfait qui doit être appliqué à quelques 450 000 arrivées chaque année. Sous Édouard Fritch, une large fourchette de « 3 000 à 10 000 francs » par aller-retour était évoquée. La présidence, sur ce point comme sur d’autres, n’a pas terminé les consultations, mais l’idée de faire grimper le prix du billet d’avion n’effraie visiblement pas. « Quand vous savez que le prix du billet d’avion, sur ATN ou sur d’autres compagnies, c’est 100, 200 ou 300 000 francs, payer un forfait de, je ne sais pas, 5 000 francs, je ne pense pas que ça change fondamentalement la donne », reprend le ministre.

Pas d’indication, pour l’instant, d’une affectation de cette taxe. Dans le secteur touristique on en parle pourtant à la fois comme un moyen de « régulation » des arrivées et de financement des investissements dans la filière.

Aux compagnies de percevoir

Quant aux modalités de perception, le Pays se tourne aujourd’hui vers les compagnies aériennes. Car l’idée d’exiger cette taxe à l’arrivée, comme le font certains pays, et donc de la présenter comme une condition d’entrée plus qu’une participation au développement, fait naître des problématiques de compétences et de droit. « Dans le système français, il y a ce qu’on appelle la liberté constitutionnelle d’aller et venir. On a eu déjà des contentieux par le passé on avait essayé de mettre en place une taxe à l’arrivée comme en Nouvelle-Zélande, il nous a été indiqué que c’était pas légal, parce que ça porte atteinte à cette liberté : si vous ne réglez pas la taxe, vous devez reprendre l’avion, détaille Warren Dexter. Là où ça peut passer juridiquement, c’est si ça prend la forme d’un accessoire sur le prix du transport, une majoration sur le prix du billet d’avion, comme c’est le cas de la taxe d’aéroport de l’État ».

Du côté de l’aérien, on prévient d’emblée que cette solution est loin d’être simple sur le plan technique : les compagnies ne sont pas les seules à vendre des billets sur leurs vols, elles ont de nombreux partenaires, qu’ils soient opérateurs touristiques ou alliés aériens, qui font des réservations pour elles. Il ne suffit pas, donc, « d’adapter les logiciels » en interne, comme le suggère le ministre, mais d’échanger à l’international sur cette nouvelle taxe d’entrée.

La mesure fait partie d’une réforme plus large de la fiscalité touristique : le gouvernement veut notamment refondre, à l’occasion du budget 2025, la fiscalité hôtelière.

Retrouvez l’intégralité de l’interview de Warren Dexter ci-dessous :

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