ACTUS LOCALESENVIRONNEMENT Le plastique dans la perliculture : un polluant physique, chimique et biologique selon Maeva Goulais Vaitiare Pereyre 2025-01-05 05 Jan 2025 Vaitiare Pereyre Pendant quatre ans, Maeva Goulais a étudié l’impact des matériaux plastiques utilisés par les perliculteurs sur les huîtres, les bactéries et l’équilibre des écosystèmes. Ses recherches sur les atolls des Tuamotu révèlent une pollution généralisée et des effets toxiques parfois insoupçonnés. La chercheuse propose des pistes concrètes pour limiter les dégâts : mieux réglementer les matériaux, réduire leur usage et aussi renforcer la gestion des déchets. La perliculture, deuxième ressource propre du fenua, est-elle aussi une menace pour les écosystèmes marins ? Maeva Goulais, doctorante de 30 ans, a consacré quatre ans de recherches à cette question. Dans sa thèse, elle examine l’impact des plastiques perlicoles sur les lagons et propose des pistes pour rendre cette activité plus durable. Pour comprendre les effets de la pollution plastique sur les écosystèmes, Maeva Goulais a mené plusieurs expériences concernant principalement quatre atolls des Tuamotu : Takapoto et Takaroa, où la perliculture est bien implantée, ainsi que Tikehau et Anaa, deux atolls peu ou pas concernés par cette activité. L’un des volets de ses recherches portait sur la croissance des huîtres perlières. Ces dernières ont été réparties en quatre lots et immergées sur chaque atoll pendant six mois. « On a remarqué des différences significatives dans la croissance des animaux selon les atolls. Anaa, par exemple, était l’endroit où les huîtres se développaient le mieux », explique-t-elle. Les multiples origines de la pollution plastique Mais en analysant la quantité de plastique présente dans les huîtres et dans l’eau, un résultat inattendu est apparu : « On a retrouvé autant de particules plastiques dans les huîtres des atolls perlicoles que dans celles des atolls non-perlicoles », souligne Maeva Goulais. Un constat qui a poussé la chercheuse à creuser davantage. Elle a découvert que les fibres de cellulose, d’origine naturelle ou anthropique, jouent un rôle dans la croissance des huîtres. « Plus une huître contenait de ces fibres, moins elle se développait », précise-t-elle. En fait, cette cellulose-là peut être naturelle parce qu’on sait, par exemple, dans les Tuamotu, il y a beaucoup de cocoteraies. Donc là, on ne peut rien y faire. Mais il y a aussi un gros apport entropique, qui vient des hommes donc, et qui pourrait être dû au rejet des eaux usées, notamment des eaux de machines à laver dans le lagon ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/11/MAEVA-GOULAIS-1-.wav Toxicité des plastiques perlicoles : des résultats alarmants Des résultats qui viennent donc confirmer que la contamination d’un lagon est due, certes, à la pollution locale, celle produite par les habitants, mais provient aussi en grande partie des apports extérieurs. Au-delà de la contamination directe des huîtres, Maeva Goulais s’est intéressée également aux effets biologiques des plastiques perlicoles sur d’autres espèces marines. En utilisant des tests larvaires, elle a observé le développement des œufs de cinq espèces marines placés dans des solutions plastiques à différentes concentrations. Les résultats sont clairs : « Certaines larves présentaient des anomalies ou des retards de développement, confirmant la toxicité des lixiviats plastiques. » La doctorante insiste donc sur la nécessité d’identifier les additifs chimiques les plus toxiques parmi ceux utilisés dans les collecteurs et cordes de perliculture. « Certains additifs sont peut-être inoffensifs, mais d’autres doivent être très toxiques. L’intérêt, ce serait idéalement d’en interdire l’utilisation pour des matériaux qui sont voués à finir dans l’eau. Donc déjà, ça, ce serait un gros pas de pouvoir vraiment limiter réglementer les additifs utilisés dans les matériaux plastiques perlicoles, aquacoles. » https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/11/MAEVA-GOULAIS-2.wav Bactéries pathogènes et risques pour les lagons Un autre volet de sa thèse explore les effets biologiques des déchets plastiques sur les lagons effets. Entendez par là, leurs impact sur les bactéries. Des organismes invisible mais « extrêmement importants » pour les écosystèmes marins. « c’est vrai qu’on en prend rarement conscience, parce que c’est invisible. C’est un petit peu le compartiment oublié », dit la doctorante. Pendant deux mois, Maeva Goulais a donc suivi leur évolution dans des aquariums contenant des quantités variables de plastique. « Dans l’aquarium le plus pollué, certaines bactéries pathogènes étaient surreprésentées » explique-t-elle. Ces bactéries, tout en représentant un risque pour la perliculture, menacent également l’équilibre des écosystèmes marins. https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/11/MAEVA-GOULAIS-3.wav Face à ces constats, Maeva Goulais appelle à des actions prioritaires qui doivent venir des pouvoirs public. « Les perliculteurs sont conscients de leur impact et prêts à collaborer, mais des politiques publiques ambitieuses sont nécessaires pour accompagner cette transition », assure-t-elle. Son travail est à rapprocher de celui d’une autre doctorante de l’UPF, Margaux Crusot, dont les recherches sur un biomatériau capable de remplacer le plastique dans les élevages perlicoles lui ont valu un prix prestigieux l’an dernier. À rappricher aussi de recherches sur une méthode de collecte des déchets dans les atolls producteurs de perle. Pour Maeva Goulais, il est urgent de réglementer l’importation et l’utilisation des plastiques perlicoles en contrôlant leur composition chimique. Il faudrait aussi réduire les quotas actuels, qu’elle juge « extrêmement élevés » mais aussi mettre en place des campagnes systématiques de récupération et de traitement des déchets issus de la perliculture. Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)