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Le prêt de 25 milliards demandé par la CPS à l’État : pas besoin ?

Christian Vernaudon n’en a pas fini avec la critique de la gestion de la crise du covid-19. Après avoir vilipendé les mesures de confinement, il s’attaque à la possibilité ouverte à toutes les entreprises, même celles qui continuent de travailler, de reporter sans pénalités à janvier 2021 le paiement de leurs cotisations sociales. Une mesure qui conduit la CPS dans le mur, et l’oblige à solliciter un emprunt de 25 milliards auprès de l’État. Pas besoin, dit le représentant polynésien au CESE. Il a adressé à Édouard Fritch une longue lettre, dans laquelle il propose la limitation de cette disposition à 3 mois, et l’instauration pour 6 mois d’un dispositif de chômage partiel financé à 75% par l’État.

La semaine dernière, la Caisse de prévoyance sociale a fait à l’État une demande de prêt de 25 milliards de Francs, relayée par le gouvernement à Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des comptes publics. Selon Christian Vernaudon, le courrier explique que « l’horizon de viabilité de la Caisse de prévoyance sociale, en matière de trésorerie, n’excède pas deux mois ».

Une délibération extrêmement (trop ?) généreuse de la CPS

Mais cette demande est basée, explique Christian Vernaudon, sur les conséquences d’une délibération du conseil d’administration de la CPS du 9 avril dernier, qui permet d’« exonérer l’ensemble des entreprises du secteur privé des majorations de retard (…) pour le paiement tardif des cotisations sociales afférentes aux périodes d’emploi des mois de février 2020 à décembre 2020. » Résultat prévisionnel pour 2020 : « seuls 9 milliards de cotisations seraient réglés sur les 54 milliards budgétés ».

 « La première remarque qui vient à l’esprit en conséquence est la suivante : pourquoi rendre possible le report du règlement de leurs cotisations sociales jusqu’en janvier 2021 à toutes les entreprises du secteur privé qui durant le confinement (20 mars au 29 avril) auront pu continuer à opérer (par exemple grande distribution, banques, électricité…) mais aussi à toutes les entreprises privées qui à compter du 29 avril puis du 12 mai peuvent progressivement reprendre leur activité normalement ? (…)  Or, les salaires et les charges sociales en droit du commerce font partie des créances dites « privilégiées » qui doivent être honorées en priorité sur les autres dépenses de toute entreprise. »

Christian Vernaudon réclame donc que cette délibération soit révisée pour la limiter à trois mois, ceux de mars, avril et mai 2020.

45 milliards injectés grâce au PGE

Selon les derniers chiffres de l’IEOM, à fin mai 600 TPE et 400 PME auront bénéficié des crédits de trésorerie dispensés dans le cadre du Prêt garanti par l’État à hauteur de 45 milliards de Fcfp. « Plus personne n’aura de problème de trésorerie pour payer les cotisations », dit-il. Et Christian Vernaudon rappelle aussi que l’hypothèse d’une perte de PIB de 120 à 140 milliards de Fcfp « correspond en fait à un modèle où plus aucune activité touristique internationale ne pourrait être constatée avant 2021 », hypothèse catastrophiste qui « n’est pas pour autant certaine ».

Autre source de financement pour éviter à la CPS cessation de paiement et endettement, selon Christian Vernaudon, le règlement « sans délai » des 7 milliards restants de la dette du Fades (Fonds pour l’amortissement du déficit social), qui est payée au RGS par le Pays à raison d’environ 1 milliard par an depuis 2011.

Ainsi, écrit le conseiller du CESE, les flux de trésorerie de la CPS seraient ramenés à la normale, « garantissant le règlement sans retard de toutes les charges du RGS. »

Plaidoyer pour un dispositif temporaire de chômage partiel

 Alors que le dispositif de chômage partiel a assuré aux métropolitains et de nombreux ultramarins la préservation de 84% de leur salaire net, argumente Christian Vernaudon, « plus de 5 000 salariés polynésiens auront donc été les seuls de la République auxquels il aura été demandé d’accepter de renoncer à au moins 84 % de leur salaire net habituel pour se contenter de 100 000 Fcfp. De surcroît, ces « contrats » ne sont pas soumis à règlements de cotisations à la CPS. Le Conseil d’État saisi, aura à juger de la légalité de ces contrats. Il faudra clarifier également le régime prenant en charge la couverture maladie de ces « naufragés économiques » de la crise du covid en Polynésie française. »

Des mécanismes « à la fois totalement inéquitables pour les salariés qui ont été contraints d’y recourir (…) mais aussi dramatiques pour la préservation de la principale richesse des entreprises qu’est leur capital humain, en conduisant les entreprises les plus fragiles à entrer dans ce processus mortifère de destruction de leur capital humain par initiation de plans de licenciements ! »

Il propose donc une loi du Pays « qui institue pour une durée limitée à 6 mois applicable dès mai 2020, le mécanisme de chômage partiel tel qu’appliqué en métropole et dans les Outre-mer pour toutes les entreprises notamment des secteurs touristiques et aériens de Polynésie française. Le coût mensuel maximal pour les pouvoirs publics d’une telle mesure si elle devait s’appliquer à 10 000 salariés concernés dans les secteurs de l’hôtellerie, du tourisme et de l’aérien devrait être de l’ordre de 4 milliards de Fcfp dont 2,5 milliards de salaires nets et 1,5 milliards de cotisations pour la CPS. » Un dispositif qui peut ensuite, en vertu des lois d’urgence adoptées par le Parlement, être co-financé par le Pays et l’État au travers du Fonds de solidarité nationale sur une base de 25%-75%. « C’est OK avec Paris, croit savoir Christian Vernaudon, … si le Pays le demande… »

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1 Commentaire

  1. Tohivea
    13 mai 2020 à 9h22 — Répondre

    Il commence à prendre une stature politique intéressante. Ses arguments sont totalement recevables. Il ne faut pas compter sur la bienveillance de l’État : pas de sous… Notre pays a été tué par des décisions irréfléchies. Notre PIB est torpillé. Sommes-nous politiquement prêts à affronter un tsunami social ?

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