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Le Sénat réserve l’aide à l’installation dans les Outre-mer aux seuls ultramarins

Les sénateurs ultramarins ont obtenu une réécriture de l’article 55 de la loi de Finances. Un article qui prévoyait une aide financière à l’installation dans les collectivités d’Outre-mer, Polynésie comprise, pour tous les résidents de métropole. Plutôt que de le retirer, comme l’avait accepté le gouvernement central, le palais du Luxembourg a préféré le modifier. Le dispositif est désormais réservé aux natifs de l’Outre-mer, à ceux qui y ont résidé 5 ans, où y ont des ascendants. Reste à savoir si la nouvelle version du texte résistera à la navette parlementaire et la censure du Conseil constitutionnel.

Lire aussi : Paris renonce à l’article 55

Plusieurs élus ultramarins s’étaient élevés contre l’article 55 de la loi de finances 2024, passée sans vote ni discussion à l’Assemblée nationale. Cet article, qui devait à l’origine mettre en place une aide au « retour au pays » pour les ultramarins installés en métropole, avait finalement été ouvert à tous les résidents de l’Hexagone. Comme l’avait relevé, Tematai Le Gayic sur les ondes de Radio1, un métropolitain pouvait donc profiter d’une aide au voyage et à l’installation de son entreprise en Polynésie, même s’il n’avait aucun lien avec ce territoire. Cet élargissement de la cible du texte, qui en dénaturait au passage l’objectif, était dû selon le gouvernement central à un avis du Conseil d’État qui mettait en garde sur le caractère discriminatoire d’un dispositif qui ne ciblerait que les ultramarins d’origine. Devant les protestations des députés ultramarins, pour la plupart associés à la Nupes le ministre des Outre-mer Gérald Darmanin avait annoncé le retrait de l’article, se disant toutefois ouvert à une réécriture.

Natifs, anciens résidents et descendants

Mais arrivé au Sénat, le gouvernement central n’affirme pas ses choix : aucune nouvelle version de l’article n’est sur la table. Et les parlementaires, dans leur ensemble, ne souhaitent pas voir disparaitre un dispositif à 2,4 milliards de francs (pour tous les territoires d’Outre-mer, et en comptant les autres aides prévues par l’article, notamment pour l’implantation des entreprises innovantes vers la métropole). Les discussions ont donc été longues dans la nuit de mercredi à jeudi, d’autant que les collectivités n’ont pas toutes les mêmes intérêts et la même vision de la problématique des retours au Pays. L’idée d’une référence au CIMM a été discutée, de même que la mise en place de comités spécifiques à chaque territoire pour évaluer, avec les exécutifs concernés, les demandes d’installation subventionnées…

Les élus du palais du Luxembourg ont finalement voté la proposition d’amendement de l’article 55 mise sur la table de la sénatrice de Saint-Barthélémy Micheline Jacques au nom de la délégation Outre-mer. Le texte prévoit que les aides à l’installation « seront circonscrite aux personnes soit nées en outre-mer, soit à celles y ayant résidé pendant au moins 5 ans, soit celles justifiant de la résidence outre-mer d’au moins un ascendant ». « Ce vote est l’aboutissement d’une démarche transpartisane qui met en échec le gouvernement qui a continuellement cherché à diviser voire à instrumentaliser les parlementaires, à renier les engagements pris devant eux », se félicite le sénateur de Guadeloupe Victorin Lurel dans un communiqué.

En attendant le Conseil constitutionnel

Reste à savoir si cet amendement résistera à la navette parlementaire : la loi de finances doit retourner sur la table de l’Assemblée nationale où le gouvernement avait dégainé l’article 49-3 de la Constitution pour imposer ses choix lors de la première lecture début novembre. Reste à savoir, surtout, si le Conseil constitutionnel validera, le cas échéant, une telle rédaction. Au Sénat, malgré le vote favorable, certains en doutent. Mais à l’heure où s’affirment les demandes de révision constitutionnelle sur le statut des Outre-mer, les élus, dont Teva Rohfritsch, qui avait fait ses propres propositions d’amendement mais a voté la version finale, se montrent très intéressés par la position des Sages. « C’est le moment de savoir ce qui est possible ou non en matière de différenciation », précise le sénateur polynésien. Et de savoir dans quelle mesure il faut faire évoluer la Constitution sur ce point.

[MàJ 12h30 : précisions du sénateur Teva Rohfritsch]

 

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