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Législatives : le face-à-face Nicole Bouteau – Tematai Le Gayic

Ce jeudi dans le studio de Radio1 se faisaient face Nicole Bouteau, qui a réuni 41,9% des suffrages au premier tour, et Tematai Le Gayic, qui en a récolté 20,11%. La candidate du Tapura est tout aussi certaine de la victoire de la coalition « Ensemble » que Tematai Le Gayic l’est de la victoire de la Nupes. Les deux candidats parlent de « citoyenneté » locale, inspirée du dispositif calédonien, pour protéger l’emploi local et le foncier, mais l’une envisage une durée de résidence obligatoire de 5 ans, l’autre de 15 ans. L’une dit « pourquoi pas » à une exploitation future des ressources sous-marines, l’autre s’y oppose. Quant au sauvetage de la PSG, Nicole Bouteau l’envisage grâce à une nouvelle « convention solidarité » avec la France, tandis que Tematai Le Gayic veut une réforme fiscale pour le financer. 

La candidate du Tapura, contrairement à ce qu’ont suggéré certains analystes, ne pense pas que son départ du gouvernement  – elle était en désaccord avec Édouard Fritch sur le maintien de Tearii Alpha – lui ait servi auprès des électeurs. Elle attribue plutôt son excellent score, le meilleur de son camp, au travail de terrain qu’elle a mené notamment dans les îles, accompagnée de Maina Sage qui a pu tirer un bilan de son action. « Il nous faut maintenant convaincre dans les îles du Vent », dit-elle. Tematai Le Gayic, lui, crédite une campagne qui a commencé dès la fin de l’année dernière, et le « trio » qu’il forme avec Steve Chailloux et Moetai Brotherson, et estime que davantage de jeunes électeurs se sont mobilisés samedi dernier.

Si elle est élue, Nicole Bouteau siégera et se dit « extrêmement confiante » sur la victoire de la coalition autour d’Emmanuel Macron, « et même sur une majorité absolue », mais elle affirme que les gouvernements autonomistes ont démontré leur capacité à travailler « de manière intelligente » avec tous les gouvernements centraux de ces dernières années. Tematai Le Gayic, pour sa part, est tout aussi confiant dans la victoire de la Nupes, qui représente « une bifurcation sociale et écologique ». Si la victoire échappe à la Nupes et que ce front de gauche éclate, le candidat Tavini suggère qu’un groupe pourrait être constitué par des députés ultramarins.

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Citoyenneté polynésienne vs. citoyenneté ma’ohi

Si le statut de 2004 permet de prendre des dispositions spécifiques en matière d’emploi, cela ne concerne que les emplois du secteur privé. Nicole Bouteau, ministre du Travail lors de l’élaboration de la loi sur la protection de l’emploi local qui n’est toujours pas applicable, veut profiter de la réforme constitutionnelle prévue en 2023 à propos de la Nouvelle-Calédonie, pour renforcer l’autonomie locale en la matière, notamment en l’étendant à la fonction publique territoriale et communale. L’hypothèse de travail côté Tapura est une durée de résidence d’au moins 5 ans pour devenir citoyen polynésien et obtenir le droit de travailler ou de devenir propriétaire au fenua.  Côté Tavini, on revendique un accord politique avec Paris, similaire à celui de la Nouvelle-Calédonie qui est explicitement « un outil de décolonisation et d’accession à la pleine souveraineté », avec « un gel du corps électoral » menant à un processus référendaire, mais « nous sommes plus sur une durée de résidence de 15 ans », dit Tematai Le Gayic.

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Et si Nicole Bouteau rappelle le soutien de l’État, particulièrement au cours des deux dernières années, et le soutien qu’espère le Tapura pour sortir de la crise, Tematai Le Gayic affirme aussi que le Tavini ne veut pas couper les ponts avec la France, mais « sortir du rapport de subordination ». « Moi j’alerte, dit Nicole Bouteau, sur le fait que si trois députés Tavini sont élus à l’Assemblée nationale, et bien ce sera tout de suite le référendum que demandera Oscar Temaru. »

Exploitation des ressources sous-marines : non d’un côté, pourquoi pas de l’autre

Les deux candidats s’opposent également sur les ressources sous-marines : Tematai Le Gayic se méfie des intentions de la France dans la ZEE polynésienne et doute qu’elles s’arrêtent à la simple exploration, tandis que Nicole Bouteau dit « pourquoi pas » à une éventuelle exploitation « à long terme » des ressources minières sous-marines.

« Il y aura remboursement » des frais de la CPS pour les maladies radio-induites », affirme Nicole Bouteau

La CPS et la Délégation au suivi des conséquences des essais nucléaires travaillent au chiffrage précis demandé par la France, et Nicole Bouteau se dit confiante, même si elle évoque toujours une future « négociation » sur le sujet. Mais cela ne dispensera pas le Pays de réformer la protection sociale généralisée, qui est « au bord de l’asphyxie » et ne pourra pas faire face à ses dépenses de l’année. Son sauvetage nécessitera « une convention solidarité spécifique » avec l’État. Tematai Le Gayic pointe un discours autonomiste à géométrie variable sur le fait nucléaire et ses conséquences : « Il a fallu que le rapport Toxique sorte pour que tout le monde commence à bouger. » Moetai Brotherson a l’intention de poursuivre à l’Assemblée nationale ses tentatives pour modifier la loi Morin. Concernant la PSG, de compétence locale, il ne pense pas « qu’il faut à chaque fois faire du député quelqu’un qui va chercher de l’argent à Paris. » La solution, dit-il, réside plutôt dans « un système fiscal plus juste. »