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Les branquignols de la cambriole

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Émile, 24 ans, est déficient mental et est suivi par un psychiatre à l’Institut d’insertion médico-éducatif. Heiva, 30 ans, ne semble pas souffrir du même mal, mais manque visiblement d’un brin de jugeote. Tous deux ont dérobé trois scooters à l’intérieur de la caserne de la gendarmerie à Faa’a. Ils ont été condamnés à six mois de prison dont quatre avec sursis avec leur maintien en détention.

En mai dernier, Heiva venait de se disputer avec sa femme car il était saoul et était parti dehors cuver son vin. Émile qui était dans le coin avec une paire de cisailles, le rejoint. Les deux se connaissent pour avoir joué au foot ensemble. Mais ce soir ce n’est pas au foot qu’ils vont jouer, mais aux « chaplins ».

Émile a repéré dans la journée des scooters, et il les veut. Léger inconvénient, les scooters sont parqués dans la cour de la caserne de la gendarmerie de Faa’a, car ce sont des véhicules saisis. Si cela n’inquiète pas plus que cela Émile, chose que l’on peut mettre sur le compte de sa déficience mentale, cela n’en dissuade pas pour autant Heiva qui pourtant semble jouir de toutes ses facultés. Car lorsque Émile le met au courant de son projet, Heiva le suit. Ils cisaillent donc le grillage de la cour d’enceinte et dérobent trois scooters.

Le lendemain, les gendarmes s’aperçoivent de la disparition des engins et mènent une enquête de proximité qui les mène tout droit aux deux délinquants. Sur les trois scooters volés, il n’en reste qu’un, les autres ayant été refourgués à un receleur qui sera appréhendé par la suite.

« Si Émile souffre de déficience mentale, cela ne l’a pas empêché d’amener une cisaille »

À la barre ce mardi, Heiva reconnait les faits, expliquant qu’il était « sous tension et saoul » parce qu’il s’était disputé avec sa femme. Reconnaissant qu’une fois sobre, il était « plutôt ennuyé avec ses scooters volés sur les bras », il suggère que s’il n’avait pas accepté de suivre Émile, celui-ci n’aurait peut-être pas mis son projet à exécution. Du côté d’Émile, pas de regret ni d’explication, « j’étais bourré et ça m’est venu comme ça. »

Si ce ne sont pas de gros délinquants – Heiva à cinq condamnations à son actif et Émile, trois dont une pour exhibition sexuelle – pour le procureur ces faits sont graves. « Ils ont pénétré dans une enceinte militaire et de toute évidence, c’était prémédité, car si Émile souffre de déficience mentale, cela ne l’a pas empêché d’amener une cisaille. Ce ne sont pas de grands délinquants, mais ils ont déjà eu à faire à la justice. Je demande une peine de six mois ferme avec un mandat de dépôt ou une peine de 10 mois avec un sursis pour que l’un puisse se soigner de son addiction à l’alcool et l’autre pour continuer à voir son psychiatre. »

Pour l’avocat de Heiva, dans cette affaire, il y a un incitateur et un suiveur. « Si Émile n’était pas arrivé, il n’y aurait pas eu de vol. Cela fait un mois que mon client est en détention provisoire, c’est son premier séjour, et il a eu le temps de la réflexion. Il n’a pas envie de retourner en prison et il va se tenir désormais à carreau. (…) Je demande une peine assortie d’un sursis total. »

De son côté, l’avocat d’Émile a insisté sur la déficience mentale de son client. « C’est une idée débile que d’aller cambrioler la gendarmerie. Mon client raisonne simplement ‘ je le veux, je le prends’. Il ne réfléchit pas comme tout le monde. (…) d’un coté vous avez un déficient mental qui soumet une idée débile, ‘viens on va cambrioler la gendarmerie’, et de l’autre vous avec un gars normal qui dit ‘ok, on y va’. Lequel est le plus coupable ? » Et de réclamer à l’encontre d’Émile un sursis assorti d’un travail d’intérêt général.

Après en avoir délibéré le tribunal les a condamnés à six mois de prison dont quatre avec sursis avec leur maintien en détention.