Rome (AFP) – Les Italiens se prononçaient dimanche sur une réforme constitutionnelle lors d’un référendum qui s’est transformé, en pleine vague populiste, en plébiscite pour ou contre le chef du gouvernement, Matteo Renzi (centre gauche).
M. Renzi a assuré qu’il démissionnerait en cas d’échec, et en l’absence d’alternative claire, l’incertitude quant au résultat provoque des sueurs froides en Europe et sur les marchés financiers, où l’on redoute, après le choc du Brexit et la montée des mouvements populistes, une nouvelle phase d’instabilité dans la troisième économie de la zone euro.
Les bureaux de vote doivent fermer à 23H00 (22h00 GMT) pour plus de 46 millions d’électeurs. Le vote par correspondance des quelque 4 millions d’Italiens de l’étranger s’était clôt jeudi soir.
Selon le ministère de l’Intérieur, la participation a atteint 57,22% à 20H00 (19H00 GMT), un chiffre qui traduit une forte mobilisation de l’électorat.
Les premières estimations issues des sondages de sortie des bureaux de vote sont attendues à la clôture du vote, et les résultats dans la nuit.
Dans une campagne marquée par des attaques de plus en plus féroces entre pro et anti-réforme, une denière polémique est venue émmailler cette journée de scrutin. Elle a concerné les … crayons avec lesquels les électeurs étaient invités à cocher oui ou non dans les isoloirs.
Le ministère de l’Intérieur avait prévu pour cette consultation des crayons indélébiles mais des électeurs ont assuré qu’ils étaient effaçables.
Ce que n’ont pas manqué de dénoncer aussitôt, en criant à l’irrégularité, les leaders du mouvement populiste « 5 étoiles », Beppe Grillo, et de la Ligue du Nord (extrême droite) Matteo Salvini.
Le scrutin porte sur une réforme constitutionnelle qui prévoit une réduction drastique des pouvoirs du Sénat, une limitation des prérogatives des régions et la suppression des provinces, l’équivalent des départements français.
Une large majorité de la classe politique, de la droite classique aux populistes du Mouvement 5 Etoiles (M5S) ou de la Ligue du Nord, en passant par tous les extrêmes et même des « frondeurs » du Parti démocrate (PD) de M. Renzi, appelle à voter « non » en dénonçant une trop forte concentration des pouvoirs dans les mains du chef du gouvernement.
Cette opposition est également unie dans son désir de chasser M. Renzi, arrivé au pouvoir en février 2014 et omniprésent dans les médias et sur les réseaux sociaux pour défendre « sa » réforme, censée simplifier la vie politique dans un pays qui a vu défiler 60 gouvernements depuis 1948.
– ‘Insulte pour l’intelligence’ –
« Renzi a eu le tort, dès le départ, de personnaliser ce scrutin, en disant qu’il démissionnerait en cas de victoire du non. Du coup, il concentre sur lui tout le mécontentement du pays, y compris celui des jeunes », a expliqué Elena Piccolo, 21 ans, étudiante à Naples.
Les derniers sondages autorisés, il y a deux semaines, donnaient 5 à 8 points d’avance au non, mais avec encore beaucoup d’indécis.
« Cette reforme est une insulte pour l’intelligence des Italiens, il est clair que son but ultime est de recentrer le pouvoir dans les mains du président du conseil, dans les mains d’un seul parti », a déclaré Claudia, 34 ans, organisatrice d’événements, à la sortie d’un bureau de vote à Rome.
« J’ai beaucoup hésité mais j’ai voté oui (…). Pour dire la vérité, je pense que je n’ai pas tout compris. Je n’aime pas particulièrement Renzi, il parle beaucoup et surtout de lui. Mais quand on voit tous ceux qui votent non, pour moi ce n’était pas possible », a expliqué de son côté Matteo Rossi, 25 ans, employé dans une salle de sport, en arrivant au stade pour l’autre événement qui passionnait Rome dimanche, le derby entre les deux équipes de football de capitale, la Lazio contre l’AS Roma.
Le président américain Barack Obama, la chancelière allemande Angela Merkel et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker ont ouvertement appelé à voter oui.
Du petit lait pour Beppe Grillo, qui a exhorté vendredi les Italiens à voter « avec les tripes » pour défendre leurs libertés et leur indépendance.
En cas de victoire du non, son mouvement devrait réclamer des élections anticipées, mais le président Sergio Mattarella ne devrait pas dissoudre le Parlement avant une réforme de la loi régissant l’élection des députés.
La réalité d’un retrait de M. Renzi en cas d’échec pourrait dépendre de l’ampleur du score. Même s’il présente la démission de son gouvernement, il devrait en effet rester à la tête du PD, voire même être reconduit à la présidence du conseil. Mais il a répété qu’il ne prendrait jamais la tête d’un gouvernement « technique » chargé uniquement de réformer la loi électorale.
© AFP CLAUDIO GIOVANNINI
Le chef du gouvernement italien Matteo Renzi et son épouse Agnese Landini votent pour un référendum le 4 décembre 2016 à Florence