Une grande fresque aux accents océaniques et écologiques a été dévoilée ce matin sur un mur en vue de la Maison de la culture. L’aboutissement, pour un groupe de mineurs de la protection judiciaire de la Jeunesse, de deux mois d’ateliers auprès de structures environnementales du fenua. De quoi « ouvrir l’esprit », mais aussi, pourquoi pas, des portes professionnelles.
Un bout d’océan à la Maison de la culture. C’est à l’entrée du Petit théâtre qu’a été dévoilée ce matin, en présence de plusieurs ministres, représentants du Haussariat et du milieu environnementaliste, la fresque baptisée Te Pi’i o te tairoto. Un mur très en vue donc, pour une réalisation inédite : l’œuvre est signée par des jeunes de la PJJ, encadrés par le street artist Rival. La Protection judiciaire de la jeunesse, un service sous l’autorité du Garde des sceaux, prend en charge chaque année plus de 600 mineurs polynésiens qui ont fait l’objet de poursuites pénales. Depuis novembre, certains d’entre eux – une petite dizaine, au gré des entrées et sorties dans le programme – a enchaîné les ateliers pratiques sur le thème de l’écologie, multipliant les rencontres de professionnels, bénévoles ou scientifiques environnementaux à Tahiti ou Moorea… avant de prendre les bombes et les pinceaux.
Quête de sens
Le résultat témoigne de ces quelques semaines de découverte : sur la fresque on croise des espèces symboliques de la faune et la flore océanique, des éléments clés de l’écosystème terrestres mais surtout, entre déchets plastiques, enjeux climatiques et pollutions diverses, les graves pressions qui pèsent sur ces milieux naturels. La sensibilisation a donc fonctionné, mais pour la directrice territoriale de la PJJ, Liliane Vallois, il s’agissait surtout de « parler différemment » à ces jeunes, qui ont tous fait l’objet d’une décision de justice. « Quand on dit il faut faire ça parce qu’il faut faire ça, il faut trouver un travail, se marier, acheter une voiture, ça ne fait pas forcément sens chez ces jeunes, surtout quand ils ont eu un parcours difficile ou que les modèles qu’ils ont eu ne sont pas forcément positifs, explique la responsable. Travailler pendant plusieurs semaines avec eux sur ce qui va pouvoir l’alimenter, l’intéresser, c’est un gage de réussite. Dans l’histoire de la PJJ, on trouve beaucoup d’artistes, de chefs d’entreprises, ou de travailleurs du secteur sanitaire et social par exemple, qui ont trouvé le sens de leur existence. »
Au delà de la sensibilisation, des opportunités
L’antenne polynésienne de la Protection judiciaire de la jeunesse, qui peut se flatter d’avoir un taux de réitération inférieur à la moyenne nationale (18% contre environ 35%), n’en est pas à son coup d’essai en matière d’actions éducatives. Mais ce si « parcours écologie » est inédit, c’est grâce à l’appui financier de l’Office français de la biodiversité, du Fonds de développement de la vie associative, du Haussariat, et surtout à la participation de la Fape, qui a rassemblé de nombreux intervenants pour encadrer les ateliers jusqu’au début du mois de janvier. Économie circulaire avec les ateliers Tata’i, déchets et recyclage avec Nana Sac Plastique ou Fenua ma, biodiversité avec la Sop Manu, Oceania, Pae pae no te ora ou ou Tamarii Pointe des pêcheurs, jeux à thème à l’espace info-énergie, immersion en agroécologie avec Fare umara… À chaque mini-stage ses spécialistes et sa thématique, de quelques heures ou plusieurs journées. Et là aussi, la Fédération des associations de protection de l’environnement s’est attachée à aller au-delà de la sensibilisation.
« On a essayé de montrer que ces secteurs pouvaient représenter des opportunités » en termes de formation et de carrière professionnelle, explique Marie-Laure Vanizette, coordinatrice du programme pour la Fape. La même démarche a d’ailleurs été appliquée du côté du street art. « Je suis très fier d’avoir pu enseigner à ces jeunes cet art, qui a évolué dans son temps, et qui est un peu en vogue, explique Rival qui dit avoir repéré plusieurs jeunes à potentiel dans le groupe. Et je voulais leur montrer que dans l’art, on pouvait aussi trouver une activité professionnelle. En dehors du savoir-faire, ça a permis aussi de les accompagner sur leur façon d’être, la façon de se comporter au travail. »
Cette première session « d’ateliers pratique d’écologie » devrait se répéter dès la fin janvier et la PJJ travaille déjà à une convention au plus long terme avec la Fape.