ACTUS LOCALESSOCIÉTÉ

Les « lois du Pays » : « finalement, ce n’était pas un gadget »

« Le législateur polynésien », c’est le titre de la journée d’études organisée par Alain Moyrand à l’assemblée ce jeudi, et qui réunissait de nombreux universitaires et juristes d’ici, de Nouvelle-Calédonie et de métropole.

20 ans après la mise en œuvre des « lois du Pays », « il était temps de faire un bilan », dit Alain Moyrand, maître de conférences à l’UPF et organisateur de cette journée. « À l’époque on était assez réservés, on s’est dit ‘on s’est fait avoir, ce n’est pas une vraie loi du Pays qui a force de loi, la preuve, elle ne relève pas du Conseil constitutionnel. Et dès le premier contentieux en 2006, on a vu que le Conseil d’État a parfaitement joué le jeu. »

Pour Alain Moyrand, la loi du Pays polynésienne, au fil du temps, a acquis un caractère de norme hybride, « à mi-chemin entre la loi et le règlement (…) et finalement, la Polynésie a gagné en autonomie et en gouvernance. »

Depuis 2004, a détaillé le secrétaire général du gouvernement Philippe Machenaud, l’assemblée a voté 555 lois du Pays, dont 482 de droit commun et 73 de nature fiscale. Et « force est de constater que le Conseil d’État a toujours préservé l’autonomie de la Polynésie française, » affirme-t-il. Le « SG » voit dans la légistique locale « un processus de créativité », et non pas des « copier-coller qui sapent les fondements de l’autonomie », malgré les critiques récurrentes et souvent justifiées sur ce point.

« Je voulais aussi faire du droit comparé, poursuit Alain Moyrand, j’ai fait venir un spécialiste du droit comparé (Félicien Lemaire, professeur à l’université d’Angers, ndr) sur les états autonomiques qui votent aussi des lois du Pays, et un professeur de Nouvelle-Calédonie (Mathias Chauchat) puisqu’ils ont aussi ce système de lois du Pays. »

Cette année, à la faveur de la réforme constitutionnelle qui doit doter la Nouvelle-Calédonie d’un nouveau statut post-référendum, la Polynésie pourrait être tentée d’avancer sur ce point, en demandant au Parlement de conférer aux lois votées par l’assemblée de la Polynésie française la force de véritables lois, soumises au contrôle du Conseil constitutionnel, comme c’est déjà le cas sur le Caillou. Et sur ce point, Alain Moyrand qui reconnaît l’attrait « symbolique » d’un tel changement, a « un doute », lié à sa « grande méfiance à l’égard du Conseil constitutionnel, (…) hautement politisé. »

En effet, et ce n’est pas une nouveauté, « on ne nomme pas la plupart du temps des magistrats dans le conseil, on nomme des hommes et des femmes politiques. Parce qu’il faut aborder les questions en termes politiques et pas seulement en termes techniques. » Et le Conseil constitutionnel statue souvent pour l’État, notamment « parce qu’en ce moment il n’y a plus aucune représentation de l’autonomie dans la composition de cette juridiction, alors qu’à un moment (1965-1974, ndr) il y avait eu le président François Luchaire qui lui avait fait avancer l’autonomie d’une manière phénoménale. Voilà ce qui m’amène à freiner un peu en disant ‘réfléchissons bien’. »

 

 

Article précedent

Atamai : la nouvelle plateforme destinée aux matahiapo

Article suivant

L'ISPF passe l'emploi à la loupe

Aucun Commentaire

Laisser un commentaire

PARTAGER

Les « lois du Pays » : « finalement, ce n’était pas un gadget »