La loi immigration votée par le Parlement mardi introduirait une forme de « préférence nationale », ce que dénonce la gauche et dont se félicite le camp de Marine Le Pen. Une expression utilisée depuis des décennies et théorisée dans les années 1980 par un ancien membre du Front national.
C’est un concept qui n’est pas nouveau. Les Français ont découvert pour la première fois l’expression de « préférence nationale » dans les années 1980 par la voix du leader du Front national (FN), Jean-Marie Le Pen. Un principe qui souhaite donner la priorité aux Français dans l’accès au logement, à l’emploi et aux allocations sociales et familiales, excluant ainsi les étrangers.
Une notion théorisée en 1985
En 1988, alors candidat à la présidentielle, le co-fondateur du FN décrit ce principe. « Les Français auront du travail en priorité, et les Européens, en vertu de nos accords, la priorité aussi dans les services sociaux, dans l’attribution des HLM, dans la politique familiale », énumère-t-il avant d’ajouter qu’avec ces mesures, « les gens n’auront plus de raisons de rester, car ils ne seront plus entretenus par les contribuables français ».
Si Jean-Marie Le Pen l’a utilisée à de multiples reprises, il n’est pas l’inventeur de cette notion. Cette expression a été théorisée par Jean-Yves Le Gallou, essayiste, haut fonctionnaire, homme politique, ancien membre du Front national, dans son ouvrage La Préférence nationale : réponse à l’immigration, publié en 1985.
Une durée de résidence minimale en France pour toucher des prestations sociales
La préférence nationale s’est imposée ces derniers jours dans l’examen du projet de loi immigration. Un texte définitivement adopté par le Parlement mardi soir avec 349 députés votant pour et 186 contre.
La semaine dernière, une motion de rejet portée par les écologistes avait été adoptée par l’Assemblée, entraînant le passage du texte en Commission mixte paritaire. Les sept députés et sept sénateurs membres de cette instance auront finalement réussi à parvenir à une version commune, bien plus à droite qu’elle ne l’était au départ.
Le texte voté mardi soir conditionne, pour les étrangers non-européens en situation régulière, les prestations sociales à cinq ans de résidence sur le territoire français. Pour bénéficier des allocations familiales, pour le droit au logement opposable ou l’allocation personnalisée d’autonomie, un délai de cinq ans est ainsi prévu pour ceux les étrangers non travailleurs, de 30 mois pour les travailleurs. Concernant l’Aide personnalisée au logement (APL), une condition de résidence est fixée à cinq ans pour ceux qui ne travaillent pas, et de seulement trois mois pour les autres. Ces nouvelles restrictions ne s’appliquent pas aux étudiants étrangers.
71% des Français favorables à la préférence nationale
Manuel Bompard a estimé que « des lignes rouges fondamentales ont été franchies ». « Ce sont les positions défendues par l’extrême droite française depuis 50 ans qui sont dorénavant portées par le pouvoir en place », a-t-il tonné sur le réseau social X.
De son côté, Marine Le Pen s’est félicitée d’une « victoire idéologique ». Depuis que le Front national est devenu le Rassemblement national, l’expression de « préférence nationale » est devenue « priorité nationale ». Un changement de lexique mais la même définition. Si la notion de préférence nationale est souvent liée au Rassemblement national, en matière d’emploi, « cette question est portée partout dans le monde, parfois par des partis politiques moins ostracisés, affirmait la politologue Chloé Morin à nos confrères du Figaro en 2019.
Selon un sondage CSA pour Europe 1, CNews, et le Journal du Dimanche, 71% des Français sont favorables à la préférence nationale en matière de logement, d’emploi et d’allocations sociales et familiales.