Le Tapura et Ahip ont déposé un amendement à la proposition de résolution d’Anthony Géros appelant l’État à ouvrir le dialogue de décolonisation. Ils demandent qu’une consultation des électeurs soit organisée avant toute démarche en ce sens. L’amendement est également signée de l’élue Tavini Hinamoeura Morgant. L’exposé des motifs rappelle que le Tavini ne domine l’assemblée que grâce à la prime majoritaire, et que la demande à l’État, voire une action en justice contre lui, ne saurait avoir de « réelle légitimité» sans consultation populaire.
Les 19 élus de l’opposition, ainsi que Hinamoeura Morgant, ont déposé une « proposition de modification » à la proposition de résolution du Tavini qui demande à l’assemblée de la Polynésie française son blanc-seing pour appeler officiellement à l’État à « ouvrir le dialogue de décolonisation sous l’égide de l’ONU ». Cette proposition de résolution portée par Anthony Géros doit être examinée avant mercredi, dans le cadre de la dernière séance budgétaire de l’année. Elle va de pair avec une proposition de délibération autorisant le président de l’assemblée à « à déposer un recours préalable auprès de l’État et, au besoin, à ester en justice devant toutes les juridictions françaises et internationales et les organismes onusiens compétents, en vue de faire cesser la violation du droit du peuple polynésien à l’autodétermination.»
Les 20 signataires de la proposition de modification de la résolution demandent l’insertion d’un alinéa ainsi rédigé : « Préalablement à cette démarche d’ouverture du dialogue de décolonisation, il sera organisé une consultation des électeurs sur le sujet conformément aux dispositions de l ’article 159-1 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d ’autonomie de la Polynésie française. »
En octobre dernier, de retour de New York et déçus du peu d’avancées, les élus Tavini avaient tenu une conférence de presse pour dénoncer le « déni diplomatique » de la France et pour prévenir qu’ils envisageaient d’adopter une « ligne beaucoup plus ferme ». Anthony Géros disait alors que la base serait reconsultée lors d’un congrès du Tavini en février ou en mars 2025. Le 7 novembre dernier, c’est le Conseil des droits de l’Homme, instance onusienne basée à Genève, qui rappelait la France à l’ordre sur le sujet.
« Ne commettons pas à nouveau les erreurs du passé ».
Dans l’exposé des motifs, ces élus estiment que « face à l’échec manifeste de ses démarches sur la scène internationale, le Tavini Huiraatira semble aujourd’hui opérer un virage stratégique. Il cherche désormais à s’appuyer sur les institutions de la Polynésie française pour porter et légitimer son combat en faveur de l’indépendance. » Mais l’opposition rappelle le poids de la prime majoritaire dans la composition de l’APF : le Tavini ne dispose que d’une « majorité relative » dans l’électorat. D’où l’interrogation : « Dans ces conditions, pour qu’une proposition de résolution de cette nature puisse être portée avec une réelle légitimité, ne serait-il pas judicieux de consulter nos populations sur le principe fondamental de notre évolution statutaire ? »
L’exposé des motifs rappelle aussi que « aucune consultation populaire n’avait eu lieu sur les essais nucléaires », pas plus que sur la réinscription sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU : « Ne commettons pas à nouveau les erreurs du passé ».
Les élus autonomistes profitent de l’occasion pour demander au Tavini ce qu’il prévoit sur les compétences régaliennes : « Quel est votre plan ? (…) Comment remplacer la prise en charge de l’éducation de nos enfants, dans les secteurs public et privé ? Comment assurer la sécurité de nos populations dans un monde en proie aux conflits ? Comment garantir la justice pour les Polynésiens ? Notre population a le droit de savoir ce qui l’attend dans votre projet de société ? » Et donc, poursuit l’exposé des motifs, « il est impératif de consulter préalablement le peuple de la Polynésie française sur (…) la mise en place rapide d’un processus d’autodétermination. »