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Malgré la baisse de l’épidémie, le couvre-feu est maintenu et les restrictions d’alcool pourraient revenir


Dominique Sorain a annoncé le maintien, dans les semaines à venir, de mesures de restrictions sanitaires comme le couvre-feu ou les limitations de rassemblements. Le Haussariat comme le Pays jugent pourtant l’épidémie « maitrisée ». Édouard Fritch, qui veut rétablir les restrictions de vente d’alcool malgré leur annulation par la justice, invoque les risques que présentent les fêtes alcoolisées pour justifier ces mesures.

« La situation est enfin maîtrisée en Polynésie ». C’est le constat établi par le Haut-commissaire lors de son allocution ce midi. Les données sont effectivement « claires, vérifiées et rassurantes » : un seul patient en réanimation Covid à Taaone, plus aucun décès depuis le 8 mars, et « un taux d’incidence inférieur à 10 cas pour 100 000 habitants (par semaine, ndlr), quand il était supérieur à 20 encore début mars 2021 et supérieur à 1 000 à l’automne dernier ». Cette « réussite de tous les Polynésiens et de toutes les Polynésiennes » ne se traduira pourtant pas dans les mesures de restrictions sanitaires en place en Polynésie. Si le haut-commissaire et le président ont annoncé une réouverture progressive des vols internationaux, assortie d’un protocole d’entrée renforcé, l’interdiction des rassemblements festifs sur la voie publique, l’interdiction de circuler la nuit, ou encore le port du masque obligatoire dans certaines zones restent d’actualité.

Les bringues dans le viseur

Après des prolongations successives et des aménagements à la marge, le couvre-feu, désormais en vigueur entre 22 heures et 4 heures du matin, va même bientôt fêter ses 6 mois à Tahiti et Moorea. Si Dominique Sorain assure que le maintien de ces mesures fait l’objet de discussions importantes, l’État et le Pays paraissent en parfait accord sur la question. « Le risque existe toujours », a plusieurs fois rappelé le haut-commissaire dans son discours ce midi. « Ce qu’il faut éviter, c’est avoir l’impression, comme l’année dernière en juillet ou août, qu’il n’y a plus de virus et qu’on peut y aller, appuie le représentant de l’État. Il ne faut pas vivre dans l’obsession complète mais il faut avoir cette question à l’esprit ».  Le « boom » épidémique d’août dernier semble effectivement toujours dans les esprits : « j’espère que cette année personne n’aura l’idée de fêter les fêtes de Bayonne ici », précise le haussaire. À l’entendre, le couvre-feu serait surtout là pour éviter les rassemblements festifs. « C’est là où il y a des problèmes, que le virus peut se remettre à circuler », dit-il.

Même discours du côté d’Édouard Fritch, qui rappelle « qu’on ne fait pas fait ça pour le plaisir mais pour l’intérêt de nos populations ». « L’origine de ces décisions c’est d’éviter les attroupements, d’éviter les bringues en bord de route, sous les manguiers, sur les plages, avec des boissons fraiches et les gars assis dessus, détaille le président en faisant le lien avec les restrictions d’alcool (lire plus bas). Les grands clusters découverts de par le monde sont nés de ce genre de festivités ». Si certaines études mondiales citent effectivement les rassemblements festifs – alcoolisés ou non – au rang des clusters importants, ce sont surtout les évènements religieux, sportifs, familiaux et scolaires qui sont aussi aux premiers rangs des rendez-vous à risque.

Les restaurateurs espéraient des assouplissements

Beaucoup, pourtant, s’interrogent sur le maintien de ces mesures que la Polynésie, et l’essentiel du monde, n’avaient pas connu depuis des décennies. D’abord, bien sûr, du point de vue juridique. En mai dernier, le couvre-feu avait été suspendu suite à une demande en référé-liberté déposée au tribunal administratif de Papeete. Malgré la demande insistante des tavana, relayée par Édouard Fritch, le Haussariat avait décidé de ne pas réadapter son texte, considérant que le dispositif ne « correspondait plus à la situation sanitaire de la Polynésie », alors complètement débarrassée du virus. Beaucoup d’autres recours ont été déposés au niveau national, mais les juridictions administratives, jusqu’au Conseil d’État, ont souvent confirmé la légalité des couvre-feu et autres restrictions, au regard de l’état d’urgence sanitaire. Malgré tout, et comme le rappelait il y a quelques semaines le professeur de droit public Jean-Paul Pastorel, « le débat juridique n’a jamais cessé d’exister », et grossit même à mesure que les semaines passent.

Le maintien d’un couvre-feu interroge aussi d’un point du point de vue social et économique. Parmi les activités touchées par cette mesure, les restaurants, bars et snacks, réunis dans un syndicat adhérent à la CPME. Son président se dit aujourd’hui satisfait de la réouverture « très progressive » du fenua au tourisme, en ce qu’elle sera soumise à un protocole sanitaire strict. « Nous avions interpellé sur la nécessité de protéger l’économie endogène de la Polynésie », rappelle Maxime Antoine-Michard. Mais les membres du syndicat sont « beaucoup plus mitigés » sur le maintien en l’état des contraintes sanitaires. Vu la maitrise de la situation en interne et le protocole sanitaire mis en place, « on espérait a minima des assouplissements sur les horaires et sur les capacités d’accueil » explique le vice-président de la CPME. Pour beaucoup de professionnels, les restrictions paraissent aujourd’hui « un peu disproportionnées » au vu du risque épidémique dans le Pays.

Le syndicat des restaurants, bars et snacks ne désespère pas d’obtenir des aménagements dans les semaines à venir. Mais du côté du Haussariat on répète que la vigilance sera de mise tout au long de la réouverture du pays.

Restriction sur l’alcool : Covid ou pas, Édouard Fritch veut un nouvel arrêté

Le président du Pays a lié de lui-même, pendant la conférence, la question du couvre-feu et celle des restrictions de vente d’alcool. Des restrictions qui avaient fait débat tout au long du confinement, et qui viennent pourtant d’être levées par la justice. Attaqué par le groupe Wane, l’arrêté du 27 mai 2020 qui interdisait, au nom de la lutte contre le Covid, la vente à emporter de boissons alcoolisées réfrigérées et la vente d’alcool après 18 heures a été annulé par le tribunal administratif. Les juges ont notamment considéré que de cette restriction de la liberté de commerce était disproportionnée par rapport à son intérêt en termes de protection sanitaire. Édouard Fritch, pourtant, ne baisse pas les armes, et a annoncé qu’il réunirait « très rapidement » les tavana – « révoltés » par cette annulation, dit-il – pour mettre sur pied une nouvelle règlementation restrictive. « Il est évident que depuis qu’on ne vend plus de bières fraiches, qu’on n’en vend plus le weekend, ça va un peu mieux, assure le président, parlant donc plus d’ordre public que de sécurité sanitaire. Je ne dis pas que ça va parfaitement, mais il y a tout de même moins de scènes de bagarre dans les rues, de scènes de violence dans les familles. Tout le monde reconnait aujourd’hui que l’alcool est la source de pas mal de maux dans ce pays ».

L’objectif est donc clair : « Nous reviendrons sur les horaires de vente d’alcool et les dispositions nécessaires pour que cet alcool ne vienne pas pourrir la vie des Polynésiens » assure le président. Un nouvel arrêté – ou des arrêtés municipaux – qui sera probablement pris « sur d’autres motifs » que celui de l’épidémie de Covid.

 

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4 Commentaires

  1. 16 avril 2021 à 5h32 — Répondre

    Le Président Fritch a entièrement raison de vouloir maintenir les restrictions sur l’alcool, ce ne sont pas les Polynésiens, qui s’en étaient accommodés, qui étaient les plus « handicapés » mais les commerçants, qui loin de se soucier de la santé et de la sécurité, voyaient surtout un manque à gagner. Le micro-trottoir et la plupart des maires sont pour un retour aux restrictions.

  2. Bresson Louis
    16 avril 2021 à 7h50 — Répondre

    A propos de  » l’interdiction des rassemblements festifs sur la voie publique », on peut se demander si elle est vraiment effective le week-end sur la plage, notamment entre la pointe des pêcheurs et la mairie de Paea. Lorsque l’on entend les musiques à fond, avec boum-boum à rendre fous les riverains, on s’interroge sur la tolérance dont bénéficient certains. Ils ne sont pourtant pas difficile à trouver, ces « rassemblements festifs », il suffit de se diriger vers la musique.

  3. deodata
    16 avril 2021 à 9h17 — Répondre

    Le couvre-feu à 22 heures garantit la tranquillité des habitants, c’est plutôt bien. Les restriction de ventes d’alcool sont également une bonne chose. Rien de tout ça n’est contraire aux libertés fondamentales, juste un encadrement bienvenu.

  4. 18 avril 2021 à 17h13 — Répondre

    Nous risquons de connaître un bond significatif du virus dans les prochains jours après la soirée de volley ball de vendredi soir où la salle de Fautaua affichait complet. Le Haut Commissaire avait déclaré vendredi qu’il ne souhaitait pas retrouver de nouveau la même situation que l’an dernier avec des « fêtes de Bayonne » à l’origine d’un cluster important, il semble que l’on a oublié dans la population que les gestes barrières sont toujours d’actualité et que les rassemblements sont toujours interdits. Comment a-t-on pu organiser cette soirée de sport sans aucune restriction au niveau sécurité sanitaire ?

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