ACTUS LOCALESJUSTICE Marie a tout pris Pascal Bastianaggi 2020-06-15 15 Juin 2020 Pascal Bastianaggi Marie a érigé l’escroquerie en véritable sacerdoce. Des victimes, son parcours en est parsemé, et certaines auront du mal à se remettre d’avoir croisé son chemin. Comparaissant ce lundi pour divers chefs d’accusation, elle a été condamnée à trois ans de prison ferme. La Polynésie est une terre fertile, une terre d’abondance où tout ce qui se plante connait une croissance rapide. Mais à l’image du miconia, il existe aussi un type d’espèce nuisible qui pullule sur le fenua : les escrocs. Que ce soit des ventes pyramidales, des vrais-faux permis de conduire, ou des faux baux de location, il ne se passe pas un mois sans que le tribunal n’ait à étudier ce type de méfaits. Et ce lundi, ont été atteints des sommets de l’entourloupe et au moins pour l’une des victimes, des sommets de naïveté ou de détresse affective. Tromperies en tout genre Déjà en détention pour d’autres faits, Marie, 35 ans, comparaissait ce lundi par visioconférence pour avoir, entre 2018 et 2020, escroqué plusieurs personnes. Ventes de véhicules en endossant l’identité des propriétaires, vente d’engin de chantier inexistant, location d’appartement dont elle n’est pas propriétaire, falsification de chèques… Bref, Marie a érigé l’escroquerie en véritable sacerdoce. Si elle comparaissait ce lundi, c’est parce que cinq victimes avaient porté plainte pour des arnaques diverses et variées. Mais l’une d’entre elle a particulièrement marqué l’auditoire. Et c’est un douanier qui en a fait les frais. Un douanier qui « manquait de flair » comme l’a souligné le juge. C’est via Facebook que Marie l’avait hameçonné. Se présentant sous une fausse identité, elle s’est fait passer pour une belle jeune femme blonde, photo à l’appui. Photo qui ne reflétait pas la réalité comme Marie l’explique elle-même : elle est corpulente et elle a énormément souffert de quolibets quand elle était adolescente, cherchant en cela de possibles explications quant à ce qu’elle est devenue, une abonnée des salles d’audience. Une beauté intérieure Après de longues discussions virtuelles, Marie invite le douanier à la rencontrer, mais celui-ci doit se bander les yeux avant de la voir. « Je me suis fait passer pour une mince et jolie jeune femme, c’est pour cela que je lui ai demandé cela », précise-t-elle. Au bout d’un certain temps, et de plusieurs rencontres à l’aveugle, Marie finit par apparaître aux yeux de sa conquête telle qu’elle est réellement. Enfin, pas exactement. Elle a réussi à faire croire au douanier que son apparence, à mille lieux de la photo qu’elle lui avait transmise, était en fait une combinaison de latex qui cachait sa véritable physionomie, celle d’une femme fatale. Et qui l’eût cru ? Le douanier l’a crue. Même si au bout d’un certain temps, il s’est rendu à l’évidence que ce n’était pas une apparence, mais bien sa véritable enveloppe charnelle. Il a fallu toutefois que ce soit le père de l’accusée qui lui en fasse la révélation. « Elle a ravagé la vie de mon client » S’ensuit alors une relation toxique dans laquelle le douanier s’est fait barboté des chèques, son badge d’accès, ses pièces d’identité, un passe-partout, mais aussi sa voiture qu’elle a tenté de vendre. Et pour couronner le tout, elle a porté plainte contre lui à la direction des douanes pour des coups qu’il lui aurait donnés. Et de fait, il est visé par une enquête et risque une suspension. Comme l’a dit si bien l’avocat du candide, « elle a ravagé la vie de mon client, elle l’a manipulé à 2000% et il a du mal à retrouver une vie normale ». La procureure a de son coté fait le parallèle entre la personnalité de la prévenue et les sectes. « C’est le même processus intellectuel : Elle arrive à convaincre ses victimes de choses qui ne sont pas vraies. Elle a la capacité intellectuelle de s’adapter à son interlocuteur. Elle agit comme une secte pour soutirer de l’argent. » Et de réclamer à son encontre quatre années de prison ferme. Un réquisitoire qui a fait bondir l’avocate de la défense : « ma cliente n’est pas un gourou ! Vous n’allez pas l’envoyer au bagne ! C’est une jeune femme en perdition aux tendances affabulatoires, qui a besoin de soins plutôt que d’un enfermement. » Le tribunal l’a condamné à trois ans de prison ferme. Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)