La cérémonie d’ouverture de la Shiseido Tahiti Pro a eu lieu à Teahupo’o, ce mardi soir. Au milieu de l’élite du surf mondiale, deux locaux déterminés à hisser au plus haut le drapeau polynésien. Vahine Fierro, troisième l’an dernier, et qui est aussi là pour répéter ses gammes avant les JO, et Mihimana Braye, qui n’est pas qualifié pour l’épreuve olympique, mais est bien décidé à prouver qu’il y avait sa place. Sur le plateau de Radio1, le surfeur de 28 ans parle de ses objectifs et de sa préparation, de son lien à Michel Bourez ou de sa certitude de pouvoir rivaliser avec les meilleurs mondiaux… à condition de créer cette « connexion » avec la vague de Teahupo’o.
Un « beau trophée », et de nouveaux espoirs pour Mihimana Braye, qui a remporté samedi les Trials de la Tahiti Pro. Pour le surfeur de 28 ans, qui avait connu les meilleurs résultats de sa carrière au Brésil et à Hawaii en milieu d’année dernière, cette victoire arrive après un début de saison très décevant sur les étapes australiennes des Challengers Series WSL. Les Trials, face aux « copains » et à la crème du surf tahitien, c’était l’occasion de se relancer, de « retrouver la confiance », malgré des galères de transports internationaux et un retour tardif à Tahiti. « J’étais un peu au bout de ma vie et au final, j’étais là, pointe-t-il. Les trials, c’est peut-être la compétition plus prestigieuse, ici, en Polynésie, et c’est la seule qui me manquait. C’est beaucoup d’émotion de l’avoir gagnée, et un vrai soulagement. ».
« Je n’ai jamais été aussi bien dans mon surf et dans ma tête »
Un soulagement et une grande porte qui s’ouvre. Car cette première place est surtout synonyme de qualification pour le main event de la Shiseido Tahiti Pro qui, si la météo le permet, doit débuter ce mercredi. Mardi soir, à Teahupo’o, toute l’élite du surf mondial était réunie pour une cérémonie de l’eau, des danses, chants et orero, un buffet partagé et quelques discours d’accueil. Mihimana, bien sûr, était là, après trois jours de pause en famille et un bref retour à l’eau dans l’après-midi. Le Tahitien le sait : sa wildcard ne lui donne pas le droit à un tableau plus favorable que les autres. Bien au contraire : au premier tour, il doit affronter Griffin Colapinto, numéro 1 mondial et favori pour le titre WSL cette année, ainsi qu’Italo Ferreira, ex-champion du monde.
Pas de complexe pour Mihimana : l’Américain, qui a trois ans de moins que lui, il l’a déjà battu plusieurs fois, notamment dans cette même passe de Havae lors de la Tahiti Pro de l’an dernier, quand il avait fini en quart de finale. Quant au Brésilien, âgé de 30 ans, et qui évolue depuis deux ans en milieu de tableau du CT après en avoir squatté le podium pendant plusieurs années, il le suit « depuis longtemps », et sait à quoi s’attendre. « J’ai travaillé pour être là et je pense que j’ai ma place dans ce WCT, pour ce qui est du niveau. Cette année, je vais tout donner. Je suis prêt physiquement, mentalement. Je pense que je n’ai jamais été aussi bien dans mon surf et dans ma tête, assure-t-il. Et au final, c’est juste une question de temps pour moi : il faut continuer à persévérer, ça va payer. Ça reste de très bons surfeurs que je respecte. Et encore une fois, on verra le jour J : c’est Teahupo’o qui nous envoie la vague et nous, on va être là pour la surfer et profiter. »
« Si la connexion avec Teahupo’o se fait, il y a des choses magiques qui peuvent arriver »
Mihimana part d’autant plus confiant qu’il a changé « beaucoup de choses » dans sa préparation, et que ces nouveaux outils peuvent payer. « Avec la maturité, avec le temps, avec les expériences, avec tout ce qui s’est passé, on apprend, on grandit. J’ai essayé de vraiment plus me focaliser sur la partie mentale, j’ai un préparateur mental, un coach qui m’aide beaucoup et qui arrive vraiment à me remettre dans le bain à chaque fois qu’il y a une victoire, qu’il y a des défaites, détaille-t-il. C’est très important, ça m’aide beaucoup et je le vois. Ça se reflète dans mes résultats depuis l’année dernière. »
Gagner, c’est bien sûr le « rêve » absolu. Aucun Tahitien ne l’a jamais fait en 25 ans d’étapes de la WSL à Teahupo’o, même si Manoa Drollet en 2008 et Kauli Vaast en 2022 sont passés tout près. Mais pas question de s’emporter : « On a du taf sur la planche, comme on dit. Il faut prendre série après série et vraiment profiter du moment et être connecté avec Teahupo’o, dit-il. Et je pense que si la connexion se fait, il y a des choses magiques qui peuvent arriver. »
Michel Bourez « me donne un vrai boost de confiance »
Le Tahitien, déjà très populaire sur les réseaux sociaux, pourra compter au PK0 sur le soutien de ses proches et de tout le surf local. « C’est une bonne pression, c’est du mana, c’est tout Tahiti qui est derrière toi, sourit-il. Du coup, ça fait super plaisir et ça me donne le boost dans des moments difficiles. Tu as toutes ces personnes, ma famille, ma copine, ils sont tous là. Et qu’est-ce qu’ils veulent ? Ils veulent qu’une chose, c’est te voir réussir. Donc tu lâches rien, tu continues et après, ça passe. » Parmi ses grands soutiens, Michel Bourez, qui n’a jamais manqué d’éloges envers son cadet, qui évolue depuis tout de même une dizaine d’années sur des compétitions régionales et internationales.
« Vers la fin de sa carrière, on a commencé à voyager ensemble, on a eu des liens très proches, il était là pour moi, j’étais là aussi pour lui dans des moments difficiles… Il a beaucoup d’expérience, il nous a montré à tous le chemin, et il est derrière moi pour m’aider et me conseiller sur tout, dans les choix à faire, comment réagir dans certaines situations, détaille-t-il. J’ai toute une équipe autour de moi, mais Michel, il est passé par là, il a passé 10 ans sur le WCT, et il me donne un vrai boost de confiance. »
Malheureusement, cette confiance ne pourra pas lui servir pour les JO, puisque Mihimana n’a pas obtenu son ticket pour cet autre grand rendez-vous de Teahupo’o cette année. « Ça a été une vraie blessure, ça a été difficile pour moi de digérer tout ça parce que c’était un gros objectif de se qualifier pour les JO », commente-t-il. Le Tahitien regrette le mode de sélection choisi par les instances internationales – et qui se basait beaucoup sur les championnats du monde ISA, auquel il n’a pas participé.
« Je n’étais pas forcément d’accord », dit-il, précisant qu’il a tout de même eu « une opportunité que je n’ai pas pu saisir, mais sur un autre spot que Teahupo’o ». Dommage, car au PK0, « j’ai pu prouver l’année dernière que j’avais ma place dans ces Jeux. » Quelques regrets, donc, mais pas de quoi se laisser déconcentrer. « Ça s’est fait comme ça, on ne peut pas revenir en arrière, on ne peut pas remettre toutes les choses en question, dit-il. On avance et on va dire qu’en quelque sorte, je ne suis peut-être pas dans les JO cette année, mais demain, ça commence et ça va être mes propres JO à moi. »