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Mort de Rémi Fraisse: l'enquête bouclée, « risque » de non-lieu, selon le père

Toulouse (AFP) – L’enquête judiciaire est close sur la mort du militant écologiste Rémi Fraisse, tué par une grenade tirée par un gendarme en 2014 à Sivens (Tarn), et « risque », selon son père, de s’achever par un non-lieu.

« Un non-lieu ? C’est le risque, un risque important », a réagi mercredi auprès de l’AFP Jean-Pierre Fraisse, qui a été informé de la clôture de l’instruction sur la mort de son fils, alors âgé de 21 ans. Aucune personne n’est en effet poursuivie dans le dossier.

Rémi Fraisse a succombé à l’explosion d’une grenade tirée par un gendarme lors d’affrontements sur le chantier de la retenue d’eau controversée de Sivens, le 26 octobre 2014.

Afin d’essayer de « relancer l’enquête », M. Fraisse jette ses dernières armes dans la bataille et a annoncé le dépôt, mercredi, de deux plaintes, confirmant une information du Monde.

La première, à Toulouse, accuse d’homicide involontaire Thierry Gentilhomme, préfet du Tarn à l’époque de la mort de Rémi Fraisse, ainsi que son directeur de cabinet, Yves Mathis. Elle vise également, pour subornation de témoins, le gendarme responsable de l’enquête sur la mort du militant.

La deuxième plainte, déposée à Paris, accuse de « faux témoignages » trois gendarmes, dont l’auteur du tir de grenade présumé responsable de la mort.

Faisant part de ses « doutes » quant à la capacité de la justice à faire éclater la vérité, M. Fraisse a dénoncé « une proximité entre les gendarmes et la justice ». 

Me Jean Tamalet, avocat du gendarme qui a tiré la grenade présumée mortelle, a confirmé à l’AFP la clôture de l’instruction, à Toulouse, estimant que « l’issue inéluctable du dossier (était) un non-lieu ». 

Le maréchal des logis J. avait été entendu en tant que témoin assisté le 18 mars 2016 et n’avait pas été poursuivi.

– Un « accident » –

« La conclusion aujourd’hui est la même que lors de son audition : c’est un abominable accident mais un accident », a déclaré Me Tamalet.

Un rapport de l’Inspection générale de la gendarmerie (IGGN) avait déjà blanchi le gendarme en décembre 2014. Il avait estimé que les avertissements nécessaires avaient été effectués avant le tir de la grenade.

Les forces de l’ordre se trouvaient alors face à « cinq opposants agressifs qui (jetaient) constamment toutes sortes de projectiles », selon le compte-rendu de la gendarmerie.

Le parquet a trois mois, après la date de la clôture le 11 janvier, pour rendre son réquisitoire définitif, un délai durant lequel les parties peuvent déposer des demandes de complément d’enquête.

Puis un autre mois s’écoulera pour laisser le temps aux deux juges d’instruction toulousains de prononcer leur ordonnance.

Le père de Rémi Fraisse compte bien utiliser ce délai pour faire pression sur la justice. Il a ainsi déposé plusieurs requêtes, notamment la demande que soit entendu l’ancien préfet, accusé de négligence. 

Selon la famille de Rémi Fraisse, ce dernier n’aurait pas pris au sérieux l’importante tension qui régnait sur le chantier du barrage, où se succédaient alors les opérations d’expulsion et les affrontements.

Le 7 octobre 2014 en particulier, soit trois semaines avant la mort du jeune homme, une militante de 25 ans avait été grièvement blessée par le tir d’une grenade dans sa caravane. 

Hasard du calendrier, le gendarme auteur de ce lancer a été lui mis en examen, mardi à Toulouse, pour « violence avec arme par personne dépositaire de l’autorité publique », a indiqué le parquet.

Le 20 octobre 2014, soit six jours avant la mort de Rémi, la députée EELV Cécile Duflot avait souligné le « risque de dérapage à tout instant », selon l’enregistrement d’une conversation, cité par Le Monde, qu’elle avait eue avec l’ancien préfet et son directeur de cabinet.

Les opposants au projet de retenue d’eau n’avaient eu de cesse, avant la mort de Rémi, d’avertir des dangers d’escalade.

Le projet de barrage a depuis été abandonné, mais un autre, réduit de moitié, est à l’étude. Les zadistes qui occupaient le site en ont été délogés le 6 mars 2015.

© AFP/Archives KENZO TRIBOUILLARD
Photo prise le 6 novembre 2014 de fleurs et bougies devant une photo de Rémi Fraisse, à Paris