Paris (AFP) – Le chauffeur du camion qui a foncé dans la foule jeudi soir à Nice, tuant au moins 84 personnes, était « totalement inconnu » de l’antiterrorisme mais sa course meurtrière correspond aux appels aux meurtres d’organisations « terroristes islamistes », a déclaré vendredi le procureur de Paris.
François Molins a déploré « la mort de 84 personnes, dont 10 enfants et adolescents », a-t-il détaillé lors d’une conférence de presse au palais de justice de Nice. Le magistrat a également recensé « 202 blessés, dont 52 en état d’urgence absolue ».
Le magistrat a affirmé que l’auteur du carnage, Mohamed Lahouaiej Bouhlel, un Tunisien de 31 ans domicilié à Nice, était « totalement inconnu des services de renseignement, tant au niveau national qu’au niveau local. Il « n’avait jamais fait l’objet de la moindre fiche ni du moindre signalement de radicalisation », a souligné M. Molins.
Il était en revanche « connu des services de police et de justice pour des faits de menaces, violences, vols et dégradations commis entre 2010 et 2016 », a souligné le magistrat.
Le 24 mars 2016, il avait été condamné une fois par le tribunal correctionnel de Nice à 6 mois de prison avec sursis pour des « violences volontaires avec arme » commises en janvier 2016.
Des violences commises dans une altercation en raison d’un accident de la circulation, avec une « palette », selon un communiqué du ministre de la Justice jean-Jacques Urvoas.
Il n’était plus sous contrôle judiciaire depuis sa condamnation, a précisé le ministre. Il n’a « jamais été incarcéré » et « ne faisait plus l’objet d’aucun suivi de la part de l’autorité judiciaire au moment de l’attentat », a-t-il ajouté.
A ce stade, aucune revendication n’est venue apporter de signature à l’attentat. Pour autant, « ce type d’action correspond très exactement aux appels permanents aux meurtres des ces organisations terroristes, tels qu’elles le prescrivent notamment dans leurs revues ou vidéos », a affirmé le procureur en évoquant les groupes jihadistes.
Les groupes Al-Qaida et l’organisation Etat islamique exhortent régulièrement les volontaires à attaquer des cibles, par tout moyen disponible.
Selon le récit du procureur, les premières exploitations de la vidéosurveillance ont permis de repérer le camion, un 18 tonnes frigorifique, dans le quartier Auriol dans l’est de Nice où il était garé depuis le 13 juillet. Arrivé seul à vélo, Mohamed Lahouaiej Bouhlel est venu récupérer l’engin le 14 juillet à 21H34, soit un peu plus de deux heures avant l’attaque. Il s’est ensuite rendu vers l’ouest de la ville.
Le camion réapparaît à 22H30 dans le quartier Magnan avant de prendre la direction de la Promenade des Anglais. « Des perquisitions ont été réalisées ce matin à deux adresses connues du mis en cause. Divers matériel informatique et de téléphonie ont été saisis ainsi que différents documents », selon le procureur.
Dans la cabine du camion, les enquêteurs ont mis la main sur un téléphone portable et divers documents « en cours d’exploitation », ainsi qu’un curieux assortiment d’armes: un pistolet automatique de calibre 7.65 mm, un chargeur, des cartouches percutées de 7.65 mm et des cartouches non percutées du même calibre, un deuxième pistolet automatique lui factice, deux fusils d’assaut factices (Kalashnikov et M16) et une grenade percée.
Les enquêteurs vont désormais s’atteler à exploiter ces éléments ainsi que « de très nombreuses données de téléphonie et de vidéosurveillance » pour tenter de comprendre les motivations de cette attaque, qui restent à ce stade inconnues.
L’enquête devra également permettre d’éclaircir dans quelles circonstances l’auteur « a pu se procurer l’arme dont il a fait usage et le camion utilisé pour ses crimes » et de déterminer s’il a pu avoir des complices et d' »éventuels liens » avec les organisations criminelles terroristes islamistes »
© AFP GIUSEPPE CACACE
Le Procureur de Paris, François Molins, lors d’une conférence de presse au tribunal de Nice, le 15 juillet 2016