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Nouvelle-Calédonie : 3200 personnes bloquées et une situation « loin d’être apaisée »

© Anthony Tejero / LNC

Certes, les dernières nuits ont été un peu plus calmes que celles du début de semaine à Nouméa. Mais la situation reste très tendue : de nouveaux bâtiments, notamment une grande médiathèque, ont été incendiés, une personne a perdu la vie dans une fusillade dans le Nord du Pays, une autre, jeune, s’est tué accidentellement avec une arme à feu dans le Sud. Le gouvernement local a appelé à la libération des axes de circulation de toute urgence, et une vaste opération de gendarmerie est en cours pour libérer l’axe Nouméa – La Tontouta. Le point avec nos partenaires Outremers 360° et les Nouvelles Calédoniennes.

Après sixième nuit d’émeutes en Nouvelle-Calédonie, le bilan a continué à s’aggraver. Dans certains quartiers de Nouméa, les affrontements avec les forces de l’ordre ont été nombreux et les détonations ont résonné à travers la ville. À Rivière-Salée, quartier populaire de Nouméa, la médiathèque construite en 2000 et qui abritait plus de 40 000 documents a été incendiée dans la nuit. Un homme a en outre été tué samedi et deux autres blessés dans un échange de coups de feu sur un barrage érigé par des émeutiers dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, ce qui porte à six le nombre de morts depuis le début des émeutes. Il s’agit du premier mort dans des faits survenus en dehors de l’agglomération de Nouméa. Comme le rapportent les Nouvelles Calédoniennes,  Vaimu’a Muliava a aussi annoncé « qu’un jeune de La Conception est mort accidentellement en jouant avec une arme », se refusant à tout autre commentaire sur les circonstances de ce drame.

Dans une conférence de presse tenue aux côtés de Gilbert Tyuienon, le membre du gouvernement a lancé un appel à l’apaisement et à la libération des axes routiers pour permettre l’approvisionnement de tous et la circulation de ceux qui ont besoin d’assistance. « Voilà six jours que l’on vit dans la peur et le doute, que les gens se demandent comment vont-ils pouvoir se soigner ou même manger. Personne n’aura gagné. Il n’y a pas de victoire car on est tous perdants, qu’on soit indépendantistes, loyalistes ou qu’on se fiche de la politique, a martèle Vaimu’a Muliava. Quand je vois cette misère sociale qui s’exprime aujourd’hui et tous les outils qui sont détruits, je le dis ; vous vous punissez vous-mêmes, vous nous tuez vous-mêmes. Tout cela ne fait qu’attiser la haine. Nous appelons tout le monde à la raison. Réfléchissez, non seulement avec la raison mais avec le cœur ».

La situation en Nouvelle-Calédonie est « loin d’un retour à l’apaisement », a affirmé samedi Sonia Lagarde, la maire de Nouméa à BFM TV. « Les deux dernières nuits, on peut dire qu’elles étaient plus calmes, par contre, les jours se ressemblent, avec son lot d’incendies (…) Au moment où je vous parle, il y a des barricades qui sont montées dans un quartier est de la ville de Nouméa, qui sont tenues (…) par les indépendantistes. À entendre l’édile de la capitale calédonienne, la situation ne s’améliorait pas, « bien au contraire, malgré tous les appels à l’apaisement ». « Quand je vois tous ces dégâts, et que ce soit les biens privés ou les biens publics qui partent en fumée, c’est la désolation », s’est émue Mme Lagarde, parlant d’une « tristesse infinie ». « Est-ce qu’on peut dire qu’on est dans une ville assiégée ? Oui, je pense qu’on peut le dire », a-t-elle déclaré, avant d’évoquer l’arrivée de renforts de forces de sécurité, à qui « il faut laisser un petit peu de temps » pour faire leur travail. La maire s’est dit dans l’incapacité de chiffrer les dégâts à l’heure actuelle. « Il y a des tas de structures municipales qui ont brûlé, des médiathèques, des écoles », a-t-elle rappelé. Selon des estimations de la CCI, les seules trois premières nuits d’émeutes ont causé pour  24 milliards de francs de dégâts.

D’après « les chiffres qu’ont donnés les deux compagnies aériennes » desservant régulièrement la Nouvelle-Calédonie, ce sont « 3.200 personnes au total » qui soit ne peuvent quitter l’archipel, soit ne peuvent y revenir, a indiqué lors d’une conférence de presse à Nouméa un porte-parole du gouvernement, Gilbert Tyuienon. Ces vols commerciaux sont suspendus depuis mardi en raison des émeutes qui ont embrasé ce territoire français du Pacifique sud. La reprise du trafic est à ce stade programmée mardi par Aircalin, mais cette date est très incertaine, car elle est soumise à l’évolution des conditions de sécurité. Air Calédonie, pour sa part, ne propose plus de vols « jusqu’à nouvel ordre ». « Aircalin assure l’hébergement en ce moment de certains Calédoniens qui sont bloqués à Singapour ou à Tokyo », a expliqué Vaimu’a Muliava, membre du gouvernement chargé de la fonction publique. « On ne pourra pas le faire ad vitam aeternam. C’est pour cela qu’on dit: un jour de plus, c’est un jour de trop », a-t-il ajouté. Le gouvernement local est propriétaire à 99% d’Aircalin et à 50,3% d’Air Calédonie. L’Australie et la Nouvelle-Zélande travaillaient samedi à la préparation pour ramener leurs ressortissants depuis la Nouvelle-Calédonie.

Elle a été annoncée par le ministre de l’Intérieure et des Outre-mer Gérald Darmanin sur Twitter et implique plus de 600 gendarmes, dont une centaine du GIGN.

Dans un communiqué, le Sénat a annoncé la création  d’une mission de suivi et de contrôle de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie,  à la demande du sénateur et Président de la commission des Lois du Sénat, François-Noël Buffet. Comme son nom l’indique, cette mission « s’assurera du suivi des mesures individuelles et collectives prises sur le fondement du régime institué par la loi du 3 avril 1995, jusqu’au terme de son application sur le territoire calédonien.» L’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie a été décrété pour une durée de 12 jours. Au-delà de ce délai,  il faut une loi pour le rallonger. L’état d’urgence peut aussi être abrogé en cas de retour à l’ordre avant les 12 jours. Pour rappel, l’état d’urgence a été décrété une première fois en janvier 1985, au moment des événements en Nouvelle Calédonie.