ACTUS LOCALESFAITS DIVERS

Nouvelle-Calédonie : la situation et les réactions après une nouvelle nuit d’émeutes

Malgré le couvre-feu, la nuit a encore été marquée par des incendies d’entreprises, des pillages de magasins et des blocages de route sur le Caillou. Les forces de l’ordre, qui comptent une cinquantaine de blessés, attendent des renforts, notamment des escadrons de GIGN de Polynésie. Les appels au calme s’enchaînent, y compris du côté des indépendantistes et des coutumiers kanak, mais à Paris, le gouvernement central compte bien faire voter le projet de loi constitutionnelle contesté sur l’élargissement du corps électoral.

  • Deuxième nuit chaude à Nouméa 

Après les dizaines d’incendies volontaires, les cambriolages, les dégradations et affrontements de la nuit de lundi à mardi, Nouméa va de nouveau se réveiller d’une nuit agitée. Et ce malgré le couvre-feu et les interdictions de rassemblent ordonnés par le Haut-commissariat. Plusieurs commerces et entreprises ont été de nouveau pillés et vandalisés, comme le grand magasin Decathlon de Koutio, en proie aux flammes cette nuit. Le complexe sportif de Magenta et son mur d’escalade a aussi été incendié, comme le rapporte Nouvelle-Calédonie la 1ere et des feus sont visibles dans plusieurs quartiers autour de la capitale. Le site industriel de la Société Le Froid continue de brûler à Montravel. Hier soir, une trentaine de jeunes manifestants étaient retranchés sur le site, en feu depuis la nuit précédente, et dont les cuves d’hydrogène menaçaient d’exploser. La veille, plusieurs personne, dont le père octogénaire de l’ancienne secrétaire d’État et présidente de la province Sud Sonia Backès, ont dû être évacués de leurs habitations par crainte des incendies. Une nouvelle mutinerie – après la prise d’otages de trois gardiens, résolue par le Raid la veille – a été contrôlée au camp Est, principal centre de détention du Caillou.

  • Des renforts attendus, la Tontouta fermée

Des affrontements ont aussi eu lieu entre force de l’ordre et manifestants. Selon le ministre de l’Intérieur et des outre mer Gérald Daramanin, qui s’exprimait dans la nuit, au moins 82 personnes ont été interpellées et 54 policiers et gendarmes blessés sur les quelques 2000 qui ont été mobilisés. Les renforts arrivent a annoncé le haut commissaire calédonien, et notamment depuis la Polynésie. Deux escadrons du GIGN ont décollé de Tahiti pour se poser à Nouméa. Ils seront les seuls à atterrir, puisque l’aéroport de la Tontouta restera fermé au moins jusqu’au 16 mai.

  • Les indépendantistes appellent au calme

La situation a engendré de nombreuses réactions politiques dans la journée de mardi. Celles des indépendantistes étaient les plus attendues. La CCAT, collectif informel d’action de terrain à l’origine des appels à la mobilisation, ne s’est pas exprimée. En revanche, le président de l’Union calédonienne, Daniel Goa, a diffusé un communiqué ce mardi soir. Il demande à la jeunesse de « garder son calme, faire preuve de patience et cesser toute exaction, tous pillages qui ne nous honorent pas. Ce n’est pas cela la dignité et la liberté. » Le président de l’UC, qui juge tout de même que les violences de ces deux derniers jours sont la preuve de « la détermination de nos jeunes de ne plus se laisser faire par la France« , « l’avenir de notre pays ne doit pas s’écrire avec le sang de nos jeunes, car la France pour rester et continuer à piller nos ressources, n’hésitera pas à les sacrifier« , or « il n’y a pas de sacrifice utile« . « J’appelle au calme toutes nos bases et j’appelle à la responsabilité chacune de nos structures politiques mais aussi les clans et les familles qui doivent rappeler à l’ordre et tenir leur jeunesse. L’avenir ne peut pas se bâtir dans la guerre« , conclut Daniel Goa.

Dans un autre communiqué, le Sénat coutumier a adressé « à la jeunesse » un appel solennel pour un retour au calme. « Il est impératif que la jeunesse fasse preuve de retenue et de civisme, et privilégie le dialogue et la concertation pour exprimer ses revendications et ses aspirations légitimes. » Le Sénat coutumier s’adresse également aux responsables politiques locaux, les enjoignant de reprendre les discussions « dans un esprit de respect mutuel et de recherche de solutions partagées » afin de trouver un accord localement.

Sur Nouvelle-Calédonie la 1ere, le président Louis Mapou a appelé, « au nom du gouvernement collégial », à ne pas « détruire tout d’un coup ce qu’on a détruit depuis 1988 ». Quelles que soient les « frustrations, les colères », il ne peut y avoir de violences ni de « rupture » de la construction d’une « communauté de destin », explique-t-il. « On ne peut pas cautionner ce qui se passe, insiste-t-il, appelant tous les responsables politiques que ce soient ceux de la CCAT, du FLNKS, des partis politiques indépendantistes et non-indépendantiste à ne pas verser dans la surenchère « au nom de je ne sais quelles idéaux ».

  • Sonia Backès parle de « racisme anti-blancs »

Côté loyalistes, le sénateur Georges Naturel, Georges Naturel, sénateur de Nouvelle-Calédonie, a surtout insisté sur « l’apaisement des esprits, car seule la paix civile permettra un nouvel accord« . « Aucune violence, aucune lutte armée n’est tolérable en démocratie !« , écrit-il. Sonia Backès, elle, a dénoncé mardi les « insultes racistes » de ceux qui ont incendié la maison de son père à la Vallée-du-Tir. « S’il n’a pas été attaqué parce qu’il était mon père, il a au moins été attaqué parce qu’il était Blanc », a affirmé Sonia Backès, interrogée sur BFMTV. « Pendant cinq heures, il a été insulté, caillassé, ils l’ont vu, ils savent qui il est », a-t-elle ajouté, déplorant des « insultes racistes ». « Il y a une incompréhension pour cette génération […] d’entendre des gens qui leur disent de rentrer chez eux alors qu’ils sont là depuis quatre-vingts ans, nés ici pour la plupart et qu’ils n’ont pas d’ailleurs », a souligné l’ex-secrétaire d’Etat. « A écouter les indépendantistes, on devient des étrangers dans notre propre pays et c’est particulièrement triste. »

  • Gabriel Attal : « La violence n’est jamais justifiée ni justifiable »

Réaction aussi en métropole, où Gabriel Attal s’est exprimé sur le dossier calédonien. « La violence n’est jamais justifiée ni justifiable », a estimé le Premier ministre. « La priorité, évidemment, pour nous, c’est de rétablir l’ordre, le calme et la sérénité ». Gabriel Attal, pressé par trois de ses prédécesseurs de reprendre la main sur ce dossier piloté historiquement par Matignon, a aussi assuré qu’il « serait au rendez-vous […] pour avancer dans le dialogue » dans ce dossier très sensible.

  • Tematai Le Gayic propose un groupe de contact et un nouvel interlocuteur

Après le président Moetai Brotherson c’est Tematai Le Gayic qui, entouré d’élus de son groupe GDR, a proposé une médiation, qui serait cette fois assurée par un « groupe de contact » parlementaire. Surtout, le jeune député demande, comme l’avait aussi suggéré le président du Pays, de retirer le dossier au ministre de l’Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin, qui selon lui « prend fait et cause pour une des parties », à savoir le camp loyaliste. Moetai Brotherson avait suggéré un transfert du dossier à Matignon, comme lors des négociations d’accord. Tematai Le Gayic demande surtout la suspension des travaux sur le projet de loi constitutionnelle.

Article précedent

Journal de 7h, le 14/05/2024

Article suivant

Tendance habitat 14/05/2024

Aucun Commentaire

Laisser un commentaire

PARTAGER

Nouvelle-Calédonie : la situation et les réactions après une nouvelle nuit d’émeutes