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OPT : « Si on ne fait rien, la situation risque d’être catastrophique »


Les comptes de l’Office sont plus que jamais « dans le rouge », et le Pays est une nouvelle fois appelé à la rescousse pour renflouer son établissement public. S’ajoutent des accords d’entreprises qui doivent être renégociés sous 10 jours et une crise sociale qui couve. Vannina Crolas, Invitée de la rédaction de Radio1 ce jeudi, veut bien croire aux plans de hausses de recettes de la direction, mais la ministre n’en doute pas : il faudra sacrifier « quelques avantages » du personnel pour permettre à l’OPT de rebondir. 

Pas de conseil d’administration à l’OPT, le 18 septembre dernier. La date avait été fixée, lors de la dernière rencontre des administrateurs, pour mettre sur la table le « plan de redressement des finances du groupe », mais la direction aurait demandé « plus de temps », d’après Vannina Crolas. « Les premières estimations, en fait, les premières projections n’étaient pas concluantes puisqu’elle se limitaient à trois ans, explique la ministre du Travail, de l’Emploi et de la Fonction publique, en charge des télécoms. Le PDG du groupe a demandé de différer ce conseil d’administration pour qu’on puisse faire des projections jusqu‘en 2028. » Des projections capitales d’un point de vue budgétaire : l’OPT affiche plus de 6 milliards de francs de déficit cumulés en 2022… Et c’est la collectivité, après avoir longtemps profité des largesses de l’office en termes de dividendes, qui doit désormais subventionner : 1,7 milliards de francs l’année dernière, un milliard cette année, et une rallonge de 500 millions aujourd’hui demandée par la direction. « C’est un établissement qui est dans le rouge, reprend Vannina Crolas, mais qui dispose encore d’un fonds de roulement confortable. Pour l’instant, ça n’est pas catastrophique, mais si on ne fait rien, ça le sera. » 

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Pour redresser la barre, « il n’y pas beaucoup de solutions, reprend la ministre, il faut baisser les coûts et augmenter les recettes. » La première version du plan de redressement présenté par la direction présente bien des nouvelles opportunités de chiffres d’affaires dans les branches postale (avec une récente refonte tarifaire et en développant les services payants dans le réseau de Fare Rata), télécom ou financière, Marara Paiements étant en plein développement. Il est aussi évoqué l’idée de vendre une partie du riche patrimoine immobilier de l’OPT. Mais pour le gouvernement, cette ébauche de plan est encore bien trop timide sur la question des baisses de dépenses et notamment des dépenses de personnel. Dix milliards de francs par an au bas mot, dont, toujours environ 2 milliards pour les seuls « avantages » du statut social des agents – de droit privé – de l’office.

2 milliards de francs d’avantage et une baisse de… 147 millions

La solution – et en même temps l’embrasement – pourrait arriver du renouvellement des accords d’entreprises, dénoncés début 2022, prorogés un an plus tard mais qui doivent être renégociés entre la direction et les syndicats avant la fin du mois. Faute de quoi, l’ensemble des avantages des agents pourraient « tomber ». Les discussions, forcément tendues, ont débuté et un « projet de convention » a été transmis aux syndicats et à la Direction du travail, explique la ministre. Là encore Vannina Crolas a « fait part de son inquiétude : il n’y a pas beaucoup d’économies en fait »… 147 millions de francs de rabotage des avantages, pas assez en termes « d’impact financier », insiste la ministre, qui avait déjà déclaré, quelques mois après sa prise de fonction, vouloir faire la chasse aux « privilèges » dans les administrations et établissements publics. Le gouvernement dit laisser la direction mener les négociations, mais veille au grain côté comptes… De quoi rendre la situation explosive, face, notamment, à un syndicat majoritaire, la CSIP de Cyril Le Gayic, qui menace depuis déjà des semaines de partir en grève. « Ça dépendra vraiment du positionnement de chaque partie. Il s’agit pour nous d’abord de protéger l’emploi et donc faire en sorte qu’il n’y ait pas 1 200 personnes à la rue d’ici quelques années. Donc de notre point de vue, il faudrait peut être geler quelques avantages pour pouvoir rebondir. »

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Aux manettes de ces négociations, le PDG Jean-François Martin, qui devrait rapidement passer la main : Vannina Crolas a annoncé un appel à candidature pour ce poste de Président – Directeur général « dès la semaine prochaine. 

La « Maison des communes » devra se trouver un autre site

Voilà 10 ans déjà que le Syndicat de promotion des communes (SPC-PF) cherche à créer sa « maison ». Un nouveau siège qui accueillerait surtout le Centre de gestion et de formation, destiné à accompagner les équipes municipales. Et le SPC avait cru voir la lumière au bout du tunnel, avec le projet de nouveau siège de l’OPT, sur Prince Hinoi, dans lequel le syndicat avait réservé toute une aile, et dont les premiers contrats de construction devaient être, là aussi après des années d’attente, passés cette année. Sauf que le nouveau gouvernement a retoqué le projet, ou en tout cas demandé aux dirigeants de l’OPT de le « redimensionner ». Pour des raisons financières d’abord : la note était passée de 11 à 13 milliards avec l’inflation, et le « plan de financement n’était plus viable » d’après Vannina Crolas. Pour des raisons politiques aussi : « notre principe de gouvernance, c’est la décentralisation et donc de regrouper tant d’agents, plus de 800 personnes en un seul endroit », près du centre de Papeete, « ça n’allait pas dans le bon sens ». La Maison des communes, d’après la ministre, représentant un surcoût qui atteignait 4 milliards, « avec un financement sur le FIP ». « On ne pouvait raisonnablement pas octroyer une grande partie du FIP à ce seul projet qui mettrait en cause en fait tous les projets d’investissement des autres communes », conclut Vannina Crolas, qui semble écarter la piste ouverte par René Temeharo, président du Centre de formation et de gestion, de racheter à l’OPT tout ou partie du terrain de Prince Hinoi. La Maison « va se faire quand même », mais ailleurs. « C’est un projet qui doit se faire, maintenant l’idée c’est de trouver un emplacement qui convient le mieux, notamment à nos tavana qui viennent des îles éloignées ».

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