Paris (AFP) – Patrick Henry, détenu depuis près de 40 ans pour le meurtre d’un enfant, s’est vu une nouvelle fois refuser jeudi le bénéfice d’une libération conditionnelle par la cour d’appel de Paris.
Condamné en 1977 à la prison à vie, le détenu de 63 ans, symbole dans les années 1970 de la lutte contre la peine de mort, espérait une deuxième chance de réinsertion, après l’échec de sa première libération en 2001, après 25 ans de détention.
Le tribunal d’applications des peines de Melun l’avait accordée en janvier, mais jeudi, la cour d’appel de Paris a estimé que le détenu, l’un des plus anciens et des plus célèbres en France, n’était pas prêt.
Les juges ont considéré les projets de réinsertion de Patrick Henry « pas très tangibles et concrets » et estimé qu’il « devait encore effectuer un vrai travail sur lui-même », « en profondeur », a-t-on appris de source judiciaire.
« Je vais me pourvoir en cassation dès aujourd’hui », a prévenu son avocate Me Carine Delaby-Faure, très en colère contre une « décision pas courageuse et bien dans l’air du temps », en plein débat en France sur la condamnation à perpétuité incompressible.
Les magistrats continuent selon elle à ne voir en Patrick Henry qu’un « symbole », « sans remettre en question les conditions de sa sortie » ratée de 2001.
Le 7 janvier, le tribunal d’application des peines de Melun, où il est détenu, lui avait accordé une nouvelle libération mieux accompagnée, soumise à la réussite d’un parcours de probation de 19 mois.
Patrick Henry avait convaincu les juges d’avoir tiré les leçons de sa rechute, notamment après une psychothérapie de six ans entreprise après son retour en prison en 2002. Mais le parquet avait fait tout de suite appel, jugeant le projet « pas assez encadrant ».
– ‘Vous n’aurez pas à le regretter’ –
Celui-ci prévoyait d’accorder des permissions de sortie à Patrick Henry sur trois mois, puis de le conduire six mois dans un centre de semi-liberté à Lille et de le suivre pendant dix mois sous bracelet électronique, avant la mise en place de la libération conditionnelle proprement dite avec un suivi de sept ans.
« C’est un moment difficile pour Patrick Henry, même s’il a une carapace et s’est protégé contre cette décision », a précisé son avocate, estimant qu’il « a encore l’énergie pour continuer ».
Depuis 2002, Patrick Henry a déjà présenté trois autres demandes de libération conditionnelle, dont une avait déjà été acceptée en 2007 par le tribunal avant d’être rejetée après un appel du parquet, selon son avocate lilloise. Un recours en grâce avait également été rejeté en 2014.
Après sa libération en 2001, ce détenu modèle devenu informaticien avait cassé son image après son interpellation en Espagne en 2002 avec 10kg de cannabis, le ramenant en prison jusqu’à aujourd’hui.
Condamné à la réclusion à perpétuité en 1977 pour le meurtre de Philippe Bertrand, un enfant de 7 ans, Patrick Henry avait échappé de justesse à la peine de mort, grâce notamment à la plaidoirie de son avocat Robert Badinter.
L’affaire, le rapt crapuleux et cynique contre une demande de rançon, avait provoqué en France une émotion et une polémique sans précédent à l’époque.
L’enfant avait été étranglé le lendemain du rapt, le 31 janvier 1976, caché sous le lit d’une chambre d’hôtel louée par Henry, qui était ensuite parti en week-end avec des amis. Gardé une première fois à vue puis relâché, il avait expliqué à la presse qu’il faudrait tuer les assassins d’enfants.
Le corps avait été retrouvé le 17 février. « La France a peur », lançait le soir-même le présentateur du JT, Roger Gicquel.
A la cour d’assises qui venait de lui sauver la tête, Patrick Henry avait répondu: « Vous n’aurez pas à le regretter ».
© AFP/Archives MYCHELE DANIAUPatrick Henry et son avocat Me Thierry Levy à leur arrivée le 22 août 2002 au tribunal de Caen