Sur la vingtaine de candidats qui ont postulé pour devenir président-directeur général de l’OPT, cinq ont été retenus, entendus et classés par un jury d’élus et d’administrateurs. Maria Nouet, Roland Bopp, Damien Charitat, Hina Delva ou Thomas Lefebvre-Segard… Des noms circulent dans les milieux politiques et économiques. À Moetai Brotherson, désormais, de faire son choix, qui devra être soumis à l’assemblée. Le président pourrait aussi décider de scinder de nouveau ce poste en deux.
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Jean-François Martin, ne sera bientôt plus le PDG du groupe OPT. En juillet dernier, le dirigeant avait annoncé son départ en retraite, alors fixé au 31 décembre, et le gouvernement n’avait pas tardé à lancer la recherche d’un remplaçant. Un processus sur le point d’aboutir. Comme l’explique la ministre de la Fonction publique Vannina Crolas, les 22 candidatures déposées fin octobre ont été d’abord analysées par une experte en recrutement, Régine Jouvin, missionnée par le gouvernement pour sélectionner les profils les plus pertinents.
Cinq candidats ont ensuite été convoqués devant un jury la semaine dernière. La ministre, aussi en charge des télécoms, en faisait bien sûr partie – raison pour laquelle elle n’avait pas pu être aux côtés, mardi dernier, de son collègue Tevaiti Pomare dans la tumultueuses commission des finances -, de même qu’une représentante de la majorité Tavini à l’assemblée, un haut-gradé de l’administration… ainsi que des « personnalités qualifiées », dont l’ancien directeur de l’IEOM et actuel président de la Sofidep Claude Periou.
Une candidature interne, plusieurs postulants extérieurs
Cette « shortlist », qui doit être présentée à Moetai Brotherson ces jours-ci, personne ne veut en parler officiellement. Mais l’OPT, ses 22 milliards de francs de chiffre d’affaires et ses 2 milliards de déficit, est assez scrutée pour que les milieux politiques et économiques bruissent des noms de potentiels futurs PDG depuis quelques jours. Certains de ces noms étaient attendus, et notamment celui de Maria Nouet, juriste de formation qui gravit les échelons du groupe depuis une quinzaine d’années. La fille de la ministre des Solidarités Minarii Galenon occupe depuis 2022 le rôle clé de secrétaire générale du groupe, celui-là même qu’occupait Jean-François Martin avant de prendre les rênes de l’établissement. Elle peut donc mettre en avant sa connaissance des dossiers, de la structure et du personnel de l’OPT, sa capacité, aussi, à assurer une transition en douceur tant en interne qu’avec les autorités du Pays.
D’autres candidats, extérieurs au groupe, sont annoncés dont Roland Bopp, que la ministre de la Fonction publique et ancienne secrétaire générale de la mairie de Faa’a connait bien puisqu’il travaille pour la même municipalité depuis une dizaine d’années. L’ancien directeur de cabinet du tavana Oscar Temaru, qui aussi été directeur de la campagne victorieuse de Tematai Le Gayic pour la députation, est depuis quatre ans directeur de l’Environnement à Faa’a. Le jury a aussi considéré une candidature hors de Polynésie, en la personne de Damien Charitat. Cet entrepreneur, qui se définit aussi comme un « mentor et serial investisseur » connait très bien les télécoms, puisqu’il est à la tête de plusieurs sociétés de conseil spécialisées dans le secteur. Il avait beaucoup travaillé avec la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie, notamment sur le déploiement de la fibre et les plans de formation qui y étaient associés. Et il a collaboré directement, et à plusieurs reprises, avec le groupe OPT, notamment sur des réorganisations des ressources humaines.
Le retour de Thomas Lefebvre-Segard ?
D’autres noms ont beaucoup circulé ces derniers temps : celui de Hina Delva, passée par l’OPT entre 2015 et 2017 en tant que directeur de cabinet de Jean-François Martin, ou en tant que directrice de la communication. C’est à ce poste qu’elle a embauché à EDT-Engie il y a 6 ans, ajoutant plus récemment à son portefeuille la direction commerciale et marketing. L’intéressée, pourtant, dément avoir postulé ou été auditionnée pour le siège de PDG de l’OPT. Autre nom, plus étonnant, qui revient ces derniers temps, celui de Thomas Lefebvre-Segard, qui après plusieurs années à la tête de Vodafone Polynésie, avait été débauché pour prendre la tête d’Onati. Un passage d’un peu moins d’un an et demi qui avait fini par sa révocation par l’actuel PDG et un conflit financier devant la justice. Lors de la présentation des comptes 2022 du groupe OPT, catastrophiques avec un record de déficit, Jean-François Martin avait pointé la responsabilité de l’ancien directeur de la branche télécom, dont les offres mobiles « agressives » auraient plombé les recettes. Peut-être que le jury a voulu avoir une autre version de l’histoire.
Rediviser le poste de PDG : une « option qui peut être envisagée »
Les cinq candidatures ont donc été notées, classées par le jury qui n’est toutefois pas décisionnaire : le dossier doit être remis au président Moetai Brotherson. « Le jury a proposé un classement, mais c’est lui qui décidera, insiste Vannina Crolas. C’est lui qui fera le choix. » Un choix qui doit tout de même être entériné en conseil des ministres après avoir été soumis, pour consultation, à la Commission de contrôle budgétaire et financier de l’assemblée. Les tensions dans la majorité Tavini se refléteront-elles de nouveau dans ce processus de sélection ? À voir.
Moetai Brotherson pourrait aussi être tenté de revenir à la gestion bicéphale de l’office qui existait jusqu’en 2015. Un directeur général d’une part pour le travail technique et financier, qui promet d’être ardu vu le besoin de redressement du groupe OPT. Et un président du conseil d’administration, de l’autre, poste qui pourrait être confié à un fidèle politique, à une personnalité qualifiée consensuelle, ou, comme l’avait déjà proposé Jean-François Martin, au PDG actuel dans un premier temps, pour assurer la transition. « Pour l’instant l’appel à candidature est basé sur le poste de PDG, mais on peut toujours envisager de le diviser », explique Vannina Crolas qui précise qu’un « bilan » de la fusion des deux postes – qui avait été largement suggéré par la chambre territoriale des comptes – doit être réalisé. Et qu’une éventuelle division entre PCA et DG « ne devra pas coûter plus cher que ce qu’on a actuellement. »
Autre sujet que le président du Pays doit considérer : la direction d’Onati, branche stratégique car pourvoyeuse de l’essentiel du chiffre d’affaires du groupe, et qui est tombée pour la première fois en déficit l’année passée. Christophe Bergues, nommé en début d’année directeur général pour prendre la suite de Thomas Lefebvre-Segard, doit, jusqu’à preuve du contraire, partir en pré-retraite en février 2024. Et là aussi, il faudra trouver un dirigeant pour le remplacer.