Paris (AFP) – Le parquet a écarté jeudi « en l’état » un classement sans suite de l’enquête sur le « Penelopegate », mais François Fillon, candidat de la droite à la présidentielle, entend passer outre cette pression judicaire et s’en remettre « au seul jugement du suffrage universel ».
Après avoir reçu un premier rapport des enquêteurs de l’office anti-corruption (Oclciff), le procureur du parquet national financier (PNF), Eliane Houlette, a estimé que « les nombreux éléments déjà recueillis ne permettent pas d’envisager, en l’état, un classement sans suite de la procédure » sur les soupçons d’emplois fictifs de Penelope Fillon.
Une annonce balayée d’un revers de main par l’ancien Premier ministre. « Il n’y a rien de nouveau, ni poursuite ni mise en examen », a-t-il déclaré au Figaro, critiquant un « acte de communication qui nourrit le feuilleton médiatique ».
« Je m’en remets donc désormais au seul jugement du suffrage universel », a-t-il prévenu. Le verdict des urnes plutôt que le verdict du PNF.
En clair, M. Fillon renonce à son engagement, pris devant les Français au début de l’affaire et réitéré encore dimanche, à se retirer de la course à la présidentielle en cas de mise en examen.
Deux options restent ouvertes pour le parquet: citer directement les protagonistes devant un tribunal correctionnel ou ouvrir une information judiciaire en confiant la poursuite des investigations à des juges d’instruction, seuls habilités à placer un acteur du dossier sous le statut intermédiaire de témoin assisté ou à prononcer d’éventuelles mises en examen.
« Le parquet financier attend des éléments d’enquête complémentaires avant de se prononcer », a indiqué à l’AFP une source proche de l’enquête. « Une suspension des investigations en raison de la période électorale n’est pas envisagée à ce stade », a-t-elle ajouté.
Une source proche du dossier estimait toutefois une mise en examen peu probable avant l’échéance électorale « compte tenu des délais extrêmement courts ». D’autant que la justice a pour pratique de s’abstenir de prononcer des mises en examen de candidats avant une élection.
Quelle que soit l’option retenue, rien ne poussera François Fillon à renoncer, affirme-t-il.
– « locomotive lancée » –
« C’est trop tard maintenant. Mon retrait poserait un problème démocratique majeur. La locomotive est lancée, rien ne peut l’arrêter, j’irai jusqu’au bout », a-t-il confié en petit comité, en rappelant que l’ouverture des parrainages d’élus pour les candidats à la présidentielle démarrait dès la semaine prochaine.
L’hypothèse d’un retrait en cas de mise en examen, qu’il juge improbable, est désormais clairement exclue: « la position que j’avais prise, c’était à condition d’avoir face à moi des gens de bonne foi ».
Comme ses avocats, il martèle que le PNF n’est pas compétent dans cette affaire.
Me Antonin Levy et Me Pierre Cornut-Gentille ont de nouveau dénoncé une enquête qui « se déroule en violation des règles de compétence du parquet national financier et, plus grave encore, du principe de la séparation des pouvoirs ».
Même s’il reconnaît que mener campagne n’est « pas facile » pour lui, M. Fillon entend reprendre le combat en s’appuyant sur un « noyau dur » de ténors LR comme François Baroin, Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, et non pas un « tandem » avec le seul Baroin.
Toute solution alternative à sa candidature est, selon lui, désormais caduque car à ses yeux, « le seul plan B possible, c’était Alain Juppé ».
Du coup, il tente de replacer sa campagne sur le terrain du programme. Après la sécurité cette semaine, et sa proposition choc de l’abaissement à 16 ans de la majorité pénale empruntée à Nicolas Sarkozy, il fera mardi des propositions sur la Sécurité sociale pour tenter d’éteindre « les polémiques » sur ses mesures initiales.
Les affaires ne « le bloquent pas du tout » dans la défense de son programme et « même si ça va être très difficile », M. Fillon a « l’impression » qu’il va gagner la présidentielle.
La qualification pour le second tour se jouera à « deux ou trois points : deux de plus, c’est gagné, deux de moins, c’est perdu », analyse-t-il, ce qui le pousse à profiter de chaque intervention publique pour attaquer Emmanuel Macron, son plus sérieux rival.
Selon un sondage Ipsos Sopra Steria diffusé jeudi, M. Fillon est en forte baisse sur un mois (-6,5) avec 18,5% d’intentions de vote (26% pour Marine Le Pen, 23% pour Macron).
© AFP/Archives Eric FEFERBERG
Penelope et François Fillon, le 29 janvier 2017 à Paris