Ancien triathlète reconverti aux course de cyclisme d’ultra-endurance, Rudy Gueguen est récemment revenu au fenua. Ce gendarme y prépare la Race Across America, une interminable épreuve de 5 000 kilomètres à parcourir en moins de douze jours et sur laquelle il compte s’engager en 2025. Pour attirer l’attention de sponsors et pour promouvoir la pratique du vélo en Polynésie, le sportif donne rendez-vous le 9 février pour un défi déjà très impressionnant : neufs tour de Tahiti Nui, soit 1 000 kilomètres en 48 heures.
Chaque année, entre 100 et 200 cyclistes accro à l’ultra-endurance se lancent dans une traversée des États-Unis, avec la folle idée de boucler quelque 5 000 kilomètres d’ouest en est, en moins de douze jours, soit environ 400 kilomètres à avaler quotidiennement. Fondée en 1982, cette Race Across America a acquis a fil des ans un statut d’épreuve mythique, de par sa longueur donc, mais aussi son dénivelé positif, près de 50 000 mètres via les Rocheuses ou les Appalaches. Le parcours change chaque année et n’est dévoilé par les organisateurs que quelques jours avant le départ.
« Pousser mes limites et faire ce que personne n’a jamais fait »
Rares sont les Français à y participer : il n’y en avait par exemple qu’un seul l’an passé. Rudy Gueguen, lui, ambitionne d’être au départ de l’édition 2025. A 28 ans, ce plongeur de la brigade nautique de gendarmerie à Papeete vient donc de lancer un appel sur les réseaux sociaux, pour trouver des sponsors prêts à l’aider dans son déplacement, chiffré à 30 000 dollars (3,3 millions de francs). « Il faut payer l’inscription, la nourriture sur place, les ravitaillement en course, les logements et la location d’un véhicule suiveur« , obligatoire pour participer. Le militaire propose ainsi à ses futurs partenaires de faire apparaître leurs noms sur sa tenue et sur sa voiture suiveuse, sur « une course très prestigieuse » et bien relayée par les médias.
Pour attirer la lumière sur ce projet, celui qui se donne jusqu’à juillet ( la date limite des inscriptions) pour boucler son enveloppe prévoit donc de réaliser une sortie longue distance : 1 000 kilomètres en neuf tours de Tahiti Nui – ou demi-tours si la route de la côte Est est toujours bloquée. Il donne rendez-vous le 9 février à Faa’a, pour le départ de cette « sortie » qu’il veut achever en moins de 48 heures. « Je suis un amateur de défis, j’aime pousser mes limites et faire ce que personne n’a jamais fait », souligne le jeune homme, spécialisé dans l’ultra endurance depuis seulement deux ans.
« J’ai longtemps fait du triathlon. Quand j’étais à Tahiti, jusqu’à mes 20 ans, j’ai fait plusieurs fois les X-Terra et j’ai même participé aux championnats du monde à Hawaii, avant d’intégrer l’équipe de la Gendarmerie en métropole », raconte celui qui a finalement délaissé le triple effort pour les longs raids à vélo par goût pour « l’aventure ». « J’ai commencé par une course en Bretagne de 1 300 kilomètres, sans savoir comment aborder le truc, et j’ai terminé deuxième. Deux mois après je fait 4e sur une course de 500 km et je me suis dit que c’était peut-être fait pour moi. Et en juin j’ai décroché ma qualification pour la traversée des États-Unis », à la faveur d’une huitième place sur une course traversant la France.
Promouvoir le vélo et le covoiturage
De retour en Polynésie Française depuis quelques mois après avoir obtenu sa mutation, Rudy prépare son rêve américain avec le club de la Punaruu, là même où il avait débuté le triathlon plus jeune. Et il goûte à l’aventure dès qu’il pose ses roues sur les routes du fenua (300 km par semaine en moyenne) loin d’être les plus sûres pour les cyclistes. « Il y a la chaleur et l’humidité, et on tourne un peu en rond. Mais surtout, il y a beaucoup de circulation et il faut être vigilant tout le temps », pointe le sportif. Le coureur souhaite donc apposer un double objectif à son défi des 1 000 bornes : outre la recherche de sponsors, il souhaite inciter les Polynésiens à trouver des solutions contre les bouchons en privilégiant les déplacements doux. « Tout le monde se plaint de la circulation, et quand je roule à côté des bouchons, je vois que huit voitures sur dix sont n’ont qu’une seule personne à bord. Je pense qu’avec un peu d’organisation, on peut privilégier le covoiturage ou d’autres moyens pour soulager la route, comme le vélo ou le VAE pour les petits trajets », dit-il.
En attendant de toucher des partenaires et d’inspirer des solutions aux politiques pour réduire la congestion automobile, Rudy se satisfait déjà d’avoir touché les cyclistes du territoire. Nombreux sont ceux à avoir répondu à son appel, notamment relayé par la Fédération tahitienne de cyclisme. « Tout le monde peut venir rouler avec moi, c’est à la carte. Mon coéquipier comme Kahiri Endeler veut par exemple faire 300 kilomètres. Il y a aussi des clubs de triathlon qui seront là, chacun est libre de venir, même pour dix kilomètres », encourage-t-il. Seul prérequis, être capable de tenir une allure d’environ 29 km/h : « le but n’est pas de gêner la circulation, je veux juste faire mon défi et profiter avec les copains qui roulent avec moi ».
Une fois ce « coup de pub » passé, Rudy Gueguen reprendra le chemin de l’entraînement, physique, mais surtout mental : « sur ce genre d’épreuve, c’est la tête qui gère ».