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Procurations frauduleuses aux municipales : sanctions confirmées pour les policiers

La Cour administrative d’appel de Paris a rejeté, ce 15 décembre, les recours des policiers nationaux suspendus temporairement de leur fonction à la suite d’affaires de procurations irrégulières lors des municipales de 2020. L’un deux avait enregistré pas moins 289 procurations pour la commune d’Arue, où l’élection avait finalement été annulée et deux colistière de Teura Iriti, finalement réélue, avaient été déclarées inéligibles. Les deux autres procédures portaient sur des procurations accordées pour les communes de Papeete et Rurutu.

Cela avait été le coup de théâtre de l’après-élections municipales, à la mi-2020. Le maire sortant Philip Schyle tout juste battu d’une courte tête par sa rivale Teura Iriti, affirmait qu’au moins une centaine de procurations utilisées lors du second tour avaient été récoltées, remplies et validées de façon frauduleuse par des agents de la police nationale. Suite à ces allégations, une enquête interne avait été lancée à la DTPN. Menée son ex-directeur Mario Banner, elle avait abouti à la suspension de cinq agents de leurs fonctions. Au terme de l’enquête administrative, il a été retenu à l’encontre d’un des agents incriminés, le fait d’avoir enregistré 289 procurations de vote pré-rédigées, hors la présence du mandant. La majeure partie de ces procurations lui avait été remise par sa sœur, elle-même candidate aux élections municipales sur la liste de Teura Iriti, une centaine étant par ailleurs validées, à sa demande, par deux collègues.

L’agent, exclu temporairement de ses fonctions en février 2022, pour une durée de vingt-quatre mois dont six avec sursis par le ministère de l’Intérieur, avait porté l’affaire devant le tribunal administratif de Papeete. Premier rejet pour le policier, qui avait donc déposé une requête auprès de la Cour administrative d’appel de Paris pour faire annuler la première décision, et dans le même temps, son exclusion. Parmi ces arguments : le manque d’impartialité du directeur de la DTPN en qualité d’enquêteur, la disproportion de la sanction, l’absence de fraude, puisque le parquet avait fini par classer, en juillet dernier, le volet pénal de l’affaire, l’audition qui aurait « intimidé » le policier…

Conflit d’intérêt et sanction proportionnée

Pas de quoi convaincre la Cour administrative d’appel. L’agent « ne pouvait ignorer, au regard de son expérience professionnelle, qu’il se trouvait dans une situation de conflit d’intérêt en acceptant de prendre en charge les procurations remises par sa sœur, écrivent les juges parisiens. L’autorité disciplinaire n’a pas, en l’espèce, pris une sanction disproportionnée en décidant d’exclure l’intéressé temporairement de ses fonctions (…) nonobstant la circonstance que le procureur de la République a classé sans suite la plainte pour fraude électorale, au motif que l’infraction était insuffisamment caractérisée ». Appel rejeté, donc, et mise à pied maintenue.

À noter que cette affaire de procuration pour les élections municipales de Arue avait eu pour conséquence l’annulation des élections et que deux des colistières de Teura Iriti, finalement réélue à la tête de la commune début 2022, avaient été déclarées inéligibles.

À Papeete aussi…

Toujours dans le cadre des procurations litigieuses, mais cette fois pour les municipales de Papeete, un autre agent de la DSP avait fait l’objet d’une enquête pour établissement irrégulier de procurations dans la perspective du second tour des élections municipales du 28 juin 2020. Au terme de cette enquête, il a été retenu à son encontre le fait d’avoir pris en compte une cinquantaine de procurations de vote pré-rédigées, hors la présence du mandant, remises par une amie de sa compagne, engagée dans la campagne de l’un des candidats à la mairie de Papeete. Là aussi le ministère de l’Intérieur l’avait sanctionné d’une exclusion temporaire de trois mois dont deux avec sursis. Là aussi, le tribunal administratif avait écarté son recours. Et là aussi, l’appel a été rejeté à Paris.

…Et même à Rurutu

Troisième décision d’appel et troisième rejet, pour un autre policier national. Il était reproché à un brigadier-chef de s’être vu remettre par sa compagne, dans le cadre du premier tour de ces mêmes municipales, une cinquantaine de procurations pour la commune de Rurutu. Des procurations pré-rédigées, récupérées par elle-même et une candidate sur une liste opposée à celle du maire sortant. L’agent, note les juges parisiens, ne pouvait lui non plus « ignorer leur irrecevabilité », au motif qu’elles étaient déjà complétées et signées par les mandants sans leur présence physique, pourtant obligatoire. Ce qui n’a pas empêché le brigadier de solliciter un officier de police judiciaire de permanence pour les contresigner. Après une enquête interne, le ministère de l’Intérieur, en février 2022, l’avait exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de six mois dont deux avec sursis. Les juges parisiens ont là encore estimé que le « manque de discernement » du policier, face à ce « conflit d’intérêt » et cette violation de la procédure. La sanction, déjà purgée, est donc confirmée a posteriori.

 

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