Les questions orales de la deuxième séance de la session budgétaire ont été l’occasion d’une cinglante passe d’armes entre Tepuaraurii Teriitahi et la vice-présidente Éliane Tevahitua. Pascale Haiti, elle, a critiqué la politique de lutte contre la vie chère du gouvernement, en proposant une liste d’actions, irréaliste selon le ministre de l’Économie.
Deux questions du groupe Tapura au président Brotherson ont ouvert la séance de l’assemblée, et la vice-présidente Éliane Tevahitua s’est chargée d’y répondre, à contrecœur – « je trouve incorrect d’interroger (le président) sachant pertinemment qu’il n’est pas là » – mais avec le même mordant dont elle faisait preuve lorsqu’elle posait des questions depuis les bancs de l’opposition.
La première question, sur l’utilité des 6 voyages présidentiels en 5 mois, émanait de Tepuaraurii Teriitahi qu’on ne connaissait pas si ironique : un voyage à Paris pour « faire le show », un autre au Vanuatu et en Papouasie Nouvelle-Guinée avec Emmanuel Macron, « une belle leçon de décolonisation », la « tournée des palaces et des grands restaurants parisiens » après l’ouverture de la coupe du monde de rugby, le déplacement à Washington, « arborant votre plus beau lavalava et rompant avec tous les protocoles vestimentaires » avant d’aller à New York « remettre le couvert » sur la décolonisation, alors que couvent plusieurs grèves et que s’ouvrent la foire agricole et le salon du tourisme.
« Schizophrénie » du Tapura
La vice-présidente a enlevé les gants : il a été question de « schizophrénie », de « monomanie », de « déni de la réalité », et d’« autruche », face à un contexte géopolitique où la Chine – « grand pays, grand peuple » – joue un rôle de premier plan. Quant au voyage avec Emmanuel Macron, elle accuse le Tapura de confondre « proximité et subordination ».
Elle n’exclut pas une rencontre entre Moetai Brotherson et Xi Jinping, et estime que « nous devons être fiers de voir notre pays accueilli avec les honneurs et avec respect par les grands de ce monde. » Ces déplacements sont en accord avec le programme du Tavini sur le rôle régional de la Polynésie et sur la décolonisation, a-t-elle martelé, et le rôle du président « ne doit pas se cantonner à couper des rubans ». En l’absence de Moetai Brotherson, Éliane Tevahitua assure qu’elle « veille au grain ».
Lana Tetuanui est arrivée à la rescousse de sa collègue du Tapura : « Où est le fa’atura ? Mais vous vous prenez pour qui ? Apprenez à nous respecter, nous sommes aussi les élus du peuple ! »
Pascale Haiti et son programme contre la vie chère
Autre question orale, celle de Pascale Haiti sur la lutte contre la vie chère. Elle a la recette : la création d’un « service des prix » avec à sa tête un « Monsieur Prix », l’embauche d’une douzaine de contrôleurs, le blocage de certains prix, notamment ceux de l’alimentation, la suppression de certaines taxes à l’importation, ou encore la location de cargos pour assurer l’approvisionnement international de la Polynésie si les grands chargeurs refusent de baisser leurs tarifs… Tevaiti Pomare lui a répondu en listant les actions du gouvernement, en confirmant que 2024 verrait l’installation d’un observatoire des prix et des pouvoir renforcés pour l’Autorité polynésienne de la concurrence, et en soulignant que « vos suggestions n’ont pas été entendues par la majorité précédente. » Et surtout en rappelant qu’on ne supprime pas de taxe sans trouver une autre source de recettes, et qu’on ne s’attaque pas à la liberté d’entreprendre sans risquer des recours en justice.