ACTUS LOCALESÉCONOMIE Réforme fiscale : Nuihau Laurey prédit une hausse des prix de 10% Caroline Perdrix 2021-12-16 16 Déc 2021 Caroline Perdrix ©CP/Radio1 Nuihau Laurey, ancien ministre de l’Économie et des Finances, est loin d’être convaincu par le projet de réforme fiscale présenté par le gouvernement. Il prédit une forte inflation, et plaide pour une réduction des dépenses publiques plutôt qu’un « coup de massue fiscale ». Lire aussi : Ce que contient le projet de réforme fiscale À la lecture du projet de loi sur la réforme de la fiscalité polynésienne, Nuihau Laurey a « surtout le sentiment qu’il y a un oubli fondamental. Lorsque le Pays est en difficulté (…), il y a deux leviers : le premier c’est la baisse des dépenses publiques, c’est ce qui avait été fait en 2013, et le deuxième levier c’est l’augmentation des recettes et donc des impôts, lorsque tous les autres moyens ont été épuisés. Aujourd’hui on nous propose une série d’augmentations d’impôts, parfois massives, avec un impact sur la cherté de la vie » https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2021/12/NUIHAU-LAUREY-01.wav Au contraire, dit-il, le gouvernement vient d’annoncer 6 concours « portant sur le recrutement de 344 fonctionnaires, dont près de 320 en concours externe, ce qui veut dire qu’on va augmenter les dépenses publiques de l’ordre de deux milliards par an. Pour moi, il faudrait profiter des départs à la retraite pour optimiser, réorganiser l’administration. Parce que la masse salariale de l’administration et des établissements publics qui sont subventionnés par le Pays, c’est aujourd’hui 47 milliards. Si on ajoute les fonctionnaires d’État payés par l’État, on a une masse de la fonction publique locale qui est supérieure à 110 milliards, c’est-à-dire supérieure à la totalité de la fiscalité polynésienne. » Sans compter la construction du nouveau bâtiment administratif qui va coûter 3,2 milliards, ajoute-t-il avant de citer Georges Clémenceau qui disait ‘la France est un pays extrêmement fertile : on y plante des fonctionnaires et il y pousse des impôts’. » Plusieurs fois au cours de l’entretien, il prononcera le mot « exemplarité » : l’effort qui est demandé au contribuable doit trouver sa contrepartie dans un effort du Pays sur les dépenses publiques. Réduire plutôt les dépenses publiques, en commençant par l’assemblée Nuihau Laurey rappelle qu’avec les membres de A Here Ia Porinetia, « ça fait plusieurs mois qu’on propose une réduction massive des dépenses publiques », comme la réduction du nombre d’élus à l’assemblée, où « être élu c’est une séance ou une commission par semaine. Il n’y a quasiment plus de débat, il y a une majorité pléthorique qui récite, parfois sans les comprendre, les textes qui sont envoyés par le gouvernement. Est-ce qu’il n’est pas temps de réduire ce nombre, à 39 membres, sans prime majoritaire ? Et qui travailleraient du lundi au vendredi ? » Sans évoquer l’instabilité que l’assemblée a connu, il voit dans cette suppression le gage d’une « meilleure représentativité », et une baisse de 700 millions sur un budget de 2 milliards soit, calcule-t-il, l’équivalent du prêt de 17 milliards que devra rembourser la CPS sur 25 ans. Il dénonce aussi au passage l’augmentation de « quasiment un milliard » au budget 2022 pour les CAE, « qui sont des emplois politiques à l’approche des échéances électorales, disons les choses comme elles sont. » Nuihau Laurey n’aime rien dans la « TVA sociale » de 1,5% qui est la première mesure du texte gouvernemental. Il prédit une hausse des prix de 10%. https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2021/12/NUIHAU-LAUREY-02.wav Il souligne que ce qu’il préfère appeler une « taxe sur la consommation » va frapper de plein fouet les plus modestes. Le monde entier se trouve aujourd’hui dans un contexte inflationniste, dit-il, « et nous, on est les seuls à rajouter une taxe non déductible qui va contribuer à accélérer encore plus ce phénomène de cherté qui est déjà particulièrement spécifique à la Polynésie. » Défiscalisation : « totale incompétence en pilotage de projets privés » du gouvernement Nuihau Laurey n’est pas plus tendre avec la défiscalisation locale. « Le gouvernement, en matière de pilotage de projets de la sphère privée, a prouvé sa totale incompétence », citant les projets du Village tahitien et de la ferme aquacole de Hao. https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2021/12/NUIHAU-LAUREY-03.wav « Le problème de la défiscalisation jusqu’à présent, poursuit l’ex sénateur, c’est que c’est quand même une utilisation du bien public, les impôts, pour ne financer quasiment que des projets de grande envergure, qui sont la propriété de personnes qui sont parmi les plus riches de ce pays. Est-ce qu’on ne doit pas davantage orienter ce financement vers des projets moyens, créateurs d’emploi ? » C’est effectivement l’intention du gouvernement, mettre le pied à l’étrier à des projets dont la rentabilité immédiate n’est pas acquise. Mais Nuihau Layrey hausse le sourcil : « Et c’est le gouvernement qui sait ? Le nombre d’appels à manifestation d’intérêt qui ont été lancés, notamment à Papeete, et qui n’ont jamais abouti montre encore une fois que le Pays n’est pas non plus compétent dans ce domaine. » Pas impressionné non plus par la baisse de l’impôt sur les sociétés : « Elle était déjà programmée depuis longtemps, c’est moi qui avais instauré la baisse à 25% et Teva Rohfritsch l’avait interrompue. » Il est aussi dubitatif sur la baisse d’impôt, de 35 à 25%, annoncée pour les banques en contrepartie d’un volume de prêts accru et de taux plus avantageux : « On est totalement en décalage par rapport à la réalité de l’économie ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2021/12/NUIHAU-LAUREY-04.wav Augmentations de la CST : « des coups de massue fiscale » Nuihau Laurey est aussi critique des augmentations prévues de la CST : « 28% à partir de 400 000 Fcfp pour les salariés, 57% pour les non salariés, ce sont des augmentations substantielles. Je suis estomaqué par la capacité des Polynésiens à accepter qu’on les traite de cette manière (…) On est sur des coups de massue fiscale. » https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2021/12/NUIHAU-LAUREY-05.wav Le projet du gouvernement représente « des hausses d’impôt que ce pays n’a jamais connues, et on le fait au moment où 3 000 à 4 000 personnes ont perdu leur emploi, et dans un moment où les inégalités n’ont jamais été aussi grandes. Mais quel est donc ce choix ? » demande Nuihau Laurey. Au final, il ne voit dans cette réforme ni modernisation, ni simplification : « Nous, on est complètement en dehors de ces cheminements ‘intellectuels’. Je pense qu’il faut baisser les impôts pour les petites et les moyennes entreprises pour que ça redémarre, et pas essayer de créer de nouvelles usines à gaz dans lesquelles on est spécialiste depuis longtemps. » Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Tags:réforme fiscale