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Rémunération de Carlos Ghosn: le gouvernement accroît la pression sur Renault

Paris (AFP) – Le ministre de l’Economie Emmanuel Macron a accru mardi la pression sur Renault, en menaçant de légiférer sur la rémunération des grands patrons si le groupe ne tirait pas les conséquences pour 2016 du vote négatif des actionnaires sur la rémunération de Carlos Ghosn.

Le conseil d’administration du groupe au losange a décidé vendredi de maintenir la rémunération de M. Ghosn pour l’année 2015 en dépit du vote consultatif des actionnaires (dont l’Etat qui détient 20% de l’ex-régie nationale), qui se sont prononcés contre à 54,12%.

Il a toutefois annoncé avoir chargé le comité des rémunérations « de la mission d’examiner les évolutions utiles de la structure de rémunération pour les années 2016 et suivantes ». 

Carlos Ghosn a gagné l’an dernier 7,251 millions d’euros au titre de PDG de Renault, dont 1,737 million en numéraire. Il va également percevoir une rémunération en qualité de PDG de Nissan, ce qui devrait porter sa rémunération totale à plus de 15 millions d’euros.

Interrogé sur le sujet face aux députés, Emmanuel Macron a rappelé mardi que le gouvernement avait fait jusqu’ici le choix de « ne pas légiférer sur le sujet », sans préciser s’il faisait référence à toutes les entreprises ou seulement à celles dont l’Etat est actionnaire.

« Ce que nous avons fait, c’est de renvoyer à la gouvernance d’entreprise », a-t-il déclaré, ajoutant néanmoins que suite au vote de l’assemblée générale de Renault, il y avait eu un « dysfonctionnement en matière de gouvernance ».

« Ce que nous demandons, c’est que M. Ghosn prenne ses responsabilités dès à présent pour que sur sa rémunération de 2016, les conséquences soient tirées de ce vote », a demandé le ministre, qui exige par ailleurs que le conseil d’administration de Renault « se réunisse à nouveau ». 

Il faut « tirer toutes les conséquences » de ce vote « dans les prochaines semaines sans quoi nous serions conduits à légiférer », a-t-il menacé.

Interrogé sur les propos du ministre, un porte-parole de Renault a souligné que le conseil d’administration avait déjà chargé « le comité des rémunérations de la mission d’examiner les évolutions utiles sur la structure de rémunération » de M. Ghosn pour les années 2016 et suivantes.

– « Deux salaires » –

Mais dans le cas de Renault, c’est la rapidité avec laquelle le conseil d’administration a pris sa décision de maintenir la rémunération 2015 de M. Ghosn qui a surpris. 

Le président du Medef Pierre Gattaz s’est lui-même déclaré « gêné » par ce qu’il a qualifié de passage « en force ».

« Je suis un peu choqué que l’on ait entériné aussi vite des conditions de rémunération », a-t-il déclaré, rappelant que le code de recommandations Afep-Medef, qui propose d’organiser un vote consultatif des actionnaires sur les salaires des patrons, prévoit que le conseil d’administration attende « deux ou trois mois » pour se prononcer.

Dans un communiqué, le Medef a annoncé mardi soir que le Haut comité de gouvernement d’entreprise, chargé du suivi de l’application du Code Afep-Medef, avait « décidé d’examiner cette situation », qui « constitue une première depuis l’instauration du +say on pay+ (vote consultatif sur le salaire des dirigeants, ndlr) en France ».

Le président du comité des rémunérations de Renault Patrick Thomas, réagissant aux propos du ministre, a assuré pour sa part que le conseil avait « respecté et appliqué les dispositions du Code Afep-Medef ». 

Selon Proxinvest, un cabinet de conseil aux actionnaires, la part fixe du salaire de M. Ghosn « excède déjà de 25% la médiane de la rémunération des présidents exécutifs du CAC 40 » tandis que « sa rémunération totale, Nissan compris, représente 400% de la rémunération médiane des dirigeants du secteur automobile ».

Le cabinet pointe par ailleurs le manque de transparence de la rémunération versée à M. Ghosn en qualité de patron de Nissan. Lors de l’assemblée générale, le président de Proxinvest Pierre-Henri Leroy avait interpellé Carlos Ghosn en mettant en cause la composition du CA, avec des administrateurs qui, selon lui, lui « mangent dans la main ».

© AFP FRANCOIS GUILLOT
Le ministre de l’Economie Emmanuel Macron à l’Assemblée Nationale à Paris, le 3 mai 2016