Conditionner les voyages vers le fenua à une vaccination contre le Covid : c’est une des « pistes » évoquées par Édouard Fritch et discutées avec l’État pour envisager la réouverture des frontières du fenua. Rien n’est fait, d’autant que le sujet est très débattu en France et dans le monde.
Dominique Sorain l’a posé dès les premières minutes de son allocution : « Le contexte mondial ne permet pas d’envisager une évolution à court terme » des restrictions de voyage. En clair : les frontières du fenua restent fermées jusqu’à nouvel ordre aux touristes et aux voyageurs ne présentant pas de « motif impérieux ». Une fermeture imposée début février par Paris et doublée dans la foulée d’une quarantaine de 10 jours mise en place par le Pays pour les voyageurs autorisés à débarquer au fenua. Un protocole qui devrait être levé « dans quelques semaines » d’après Édouard Fritch, qui avait assuré à la population que la fermeture des frontières ne saurait durer plus de « deux à trois mois ». C’est ce que semble confirmer Tahiti Tourisme, qui a informé les professionnels d’une possible réouverture dans le courant du mois de mai. Mais à l’heure actuelle, rien n’est acté, et les autorités échangent sur le calendrier et surtout les modalités de cette levée des restrictions.
« Nous sommes aujourd’hui en situation de créer un dispositif adapté et protecteur » précise le haut-commissaire. Édouard Fritch, lui, va plus loin : « Nous avons l’ambition partagée de parvenir dans les meilleurs délais à concevoir un dispositif innovant et adapté aux enjeux du retour à une vie normale dans un monde où le virus continuera à circuler encore probablement longtemps » explique le président. Qui évoque deux types de protocoles :
- « Les résidents polynésiens qui voudraient voyager à l’extérieur » pourraient être tenus d’être vaccinés avant leur départ pour pouvoir envisager un retour « sans contrainte », et donc sans quarantaine
- « Les voyageurs étrangers et nationaux qui voudraient visiter la Polynésie » pourraient devoir présenter une « attestation valide d’un carnet vaccinal anti-covid ».
Pour Édouard Fritch, aucun doute : ces protocoles basés sur la vaccination sont la « meilleure solution » pour envisager une réouverture du pays.
Débat national et mondial
Conditionner le voyage à une vaccination, l’idée n’est pas neuve. Certains pays tropicaux – voire des collectivités françaises, comme la Guyane – exigent déjà depuis très longtemps certains types de vaccination (fièvre typhoïde, fièvre jaune…), à tous les voyageurs ou à ceux qui ont fréquenté une région à risque. Mais ces « passeport vaccinaux » – un terme critiqué puisqu’il s’agit d’un certificat indépendant du passeport – font un retour à l’heure de la pandémie. Certains pays – Israël, mais aussi la Grèce, Chypre, le Danemark ou la Suède – on déjà fait des annonces concernant plus largement des « passeports sanitaires » qui incluraient, en plus de la vaccination, des preuves d’une contamination passée (théoriquement protectrice contre la maladie) ou d’un test négatif récent. Beaucoup d’autres pays – l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Chine, mais aussi la France et plus largement l’Union européenne – réfléchissent à des mécanismes similaires, et certaines compagnies aériennes ont déjà commencé à s’y préparer depuis plusieurs mois.
Vu la méfiance à l’égard des vaccins anti-covid – beaucoup plus répandue en France que dans la plupart des pays du monde – et leur diffusion encore relativement faible (environ 200 millions de personnes ont reçu au moins une dose de vaccin), le sujet est polémique. Enfin, la faisabilité juridique de cette mesure n’est pas encore établie en France où les juristes débattent des conséquences d’une telle mesure en termes de libertés publiques, ou de protection des données personnelles. C’est d’ailleurs ce que semble relever Dominique Sorain, plus prudent qu’Édouard Fritch sur la question : « C’est tout un débat qui est lancé, il faut pouvoir ouvrir le territoire dans les meilleures conditions de santé et légales aussi ».