Plusieurs familles ont reçu des avis d’éviction des terrains situés entre la piste de Faa’a et la pointe dite « du Flamboyant ». Regroupées en association, elles demandent à renégocier les conditions de l’opération de réhabilitation de l’habitat insalubre menée par l’OPH et le Pays à Hotuarea. Et cherchent à s’assurer un logement dans la zone pendant et après les travaux.
« Je vous prie de bien vouloir libérer le site dans les meilleurs délais ». C’est le message reçu, voilà maintenant un mois, par plusieurs familles qui habitent entre la piste de l’aéroport de Faa’a et la route de ceinture, en contrebas du nouveau parc Outuaraea. Le « délai » en question est imparti : depuis ce lundi 17 août, ces personnes – elles seraient entre 30 et 70 selon les sources – peuvent être délogées à tout moment. C’est que le Pays a lancé, depuis plusieurs années, une opération de résorption de l’habitat insalubre sur la zone. De nombreuses habitations, souvent précaires, ont déjà été démantelées pour faire place à de futurs logements OPH. Mais certaines familles font de la résistance. Regroupées dans l’association Marutaha Nui, elles avaient invité la presse mercredi matin, bien décidées à « alerter l’opinion publique » sur ce qu’elle considère être « une violation de leur droit légitime ». « Depuis la mise en demeure, on a cherché à reprendre le dialogue, mais en fin de semaine dernière, on a appris qu’on allait être mis dehors de force, dénonce Bélina Ceran-Jerusalemy, la présidente de l’association. Des huissiers passent dans le quartier aujourd’hui même. Et pourtant personne ne peut nous dire où on doit aller ».
Longue concertation, mais « promesses non tenues »
Difficile, pourtant, d’être surpris par cette annonce d’éviction. Dès mars 2015, le Pays, l’OPH mais aussi la mairie de Faa’a, signaient un accord prévoyant le relogement des familles, dont une partie a construit illégalement des habitations dans la bande de sécurité de l’aéroport. Difficile, aussi, de dire que le projet n’a pas été discuté : en fin d’année dernière, le ministre du logement et de l’aménagement Jean-Christophe Bouissou s’est lui-même rendu sur place pour rencontrer les habitants. Mais d’après eux, les promesses faites ce jour là n’ont pas été tenues. « Il s’est engagé à ce que nos familles puissent être attributaires des logements qui vont être construits, et que nous ne soyons pas sortis de la zone en attendant », assure Logan Moo, le secrétaire de l’association. 27 logements transitoires sont bien prévus dans le cadre de l’ensemble Te Ana Mao Nuutere. « Mais depuis cette rencontre, on n’a pas revu le ministre, et on n’a rien, aujourd’hui, qui nous dit qu’on va avoir une place dans les nouveaux logements » assure le jeune homme.
Jean-Christophe Bouissou n’était pas disponible, ce mercredi, pour un commentaire. Mais le ministère du Logement confirme que des « logements modulaires de type modulaire F3, F4 et F5 » ont bien été proposés aux familles. « Ils sont là illégalement, on leur fait des propositions pour qu’ils soient mieux logés, et ils refusent tout, et ils veulent occuper le terrain », souffle-t-on du côté de l’administration.« On n’est pas des squatteurs », répondent les membres de Marutaha Nui, qui brandissent une attestation du Camica évoquant une affectation de lot à un aïeul en 1952. « Avant même qu’il y ait l’aéroport« , précise Bélina Ceran-Jerusalemy.
Refus d’un relogement « en montagne »
Le document n’est quoiqu’il n’en soit pas un bail, et encore moins un titre de propriété. « Il y a eu un bail jusqu’en 2004, mais depuis ça a été plus compliqué », explique Logan Moo. Pourquoi refuser les propositions de relogement ? « Notre famille compte des personnes âgées habituées à vivre ici, proche du centre de Faa’a et des commerces, ainsi que des pêcheurs qui ont accès au lagon. Nous avons même planté un fa’a’apu partagé avec la fondation Face et l’OPH », explique Marutaha Nui dans un communiqué. Pourquoi veut-on reloger à Teroma ou ailleurs dans la montagne, loin de tout, des personnes qui n’ont pas de voiture, qui cherchent un travail ? » « Une injustice », insiste le secrétaire de l’association.
Marutaha Nui demande la réouverture d’un « vrai dialogue » avec le ministre, l’OPH et la mairie. Le collectif assure avoir le soutien d’Oscar Temaru dans sa démarche et avait même annoncé sa présence à la conférence de presse ce matin. Le tavana n’était pas là. Qu’importe, « sans garanties, on ne partira pas », résume Logan Moo.