En janvier 2011 Tania, âgée de 6 ans, était agressée sexuellement par un grand-oncle de 66 ans qu’elle appelait « Papi ». Des actes qui se sont poursuivis durant sept longues années. Placé en détention provisoire depuis avril 2018, l’homme désormais âgé de 74 ans a été condamné à six ans de prison ferme.
C’est en 2018 que Tania, alors âgée de 13 ans, s’est confiée à un professeur de son lycée qui a aussitôt signalé les faits à la gendarmerie. « Je faisais un remplacement dans ce lycée quand pour ma première heures de cours, une seule élève était présente. Je lui ai demandé qui elle était, et soudainement elle s’est mise à pleurer. J’ai pensé que j’avais dit quelque chose qui l’avait heurtée. Puis elle m’a dit qu’elle ne voulait pas rentrer à la maison. Pourquoi ? lui ai-je demandé. Elle m’a répondu que son papi l’avait violée et qu’elle n’était plus vierge depuis longtemps. » Voila les faits tels que l’enseignant les a transmis aux gendarmes.
Une audition difficile
Ceux-ci ont aussitôt auditionné Tania dans le cadre d’une procédure appelée Mélanie*, et l’adolescente a alors révélé ce qu’elle a subi de la part de cet homme, son grand-oncle. « Une audition difficile », a assuré le juge Léger en charge du dossier qui a poursuivi la lecture des déclarations de la victime. « Des fois il était saoul. De temps en temps il me donnait de l’argent pour que je ne parle pas. » Aux gendarmes elle déclarera que ce n’est qu’en CE1 qu’elle a appris que ce que lui faisait subir l’homme « était interdit. » Une expertise gynécologique viendra confirmer ses déclarations.
«C’était la gamine qui m’aguichait. »
Dans la salle, l’accusé ne paye pas de mine, loin de l’image qu’on se fait d’un prédateur. Une expertise psychologique l’a déclaré « personnalité à tendance pédophile ». Lors de sa première audition chez les gendarmes, il avait nié les faits, déclarant «C’était la gamine qui m’aguichait », avant d’avouer à la seconde audition. Au tribunal, il répète que la jeune fille l’aguichait et qu’il est tombé dans son piège. « Elle regardait des vidéos pornos et ça l’a influencée. Elle se mettait nue sur le lit et faisait des signes avec sa langue ». Il avoue un comportement inapproprié, mais réfute l’avoir pénétrée, indiquant qu’il avait des problèmes d’érection.
Le père de la victime et sa femme, assis au premier rang et visiblement très émus et en colère, n’ont pas souhaité s’exprimer à la barre.
« Elle ne pourra vivre pleinement sa vie de femme. »
La procureure de la République a estimé que l’accusé « n’est pas convaincant. Il n’y a pas de remise en question et il y a un risque de récidive. » Pour cela, elle réclamait cinq années d’emprisonnement.
Pour Me Bambridge-Babin, avocate des parties civiles, « Les séquelles sont importantes pour cette jeune fille. Si elle n’a rien dit à ses parents durant ces années, c’est pour ne pas leur faire de la peine ! Elle était devenue un objet sexuel ». Assénant: « Elle ne pourra vivre pleinement sa vie de femme. » L’avocate du « papi » a mis en avant les problèmes de l’accusé qui a connu tout au long de sa vie « une vraie disette sexuelle », et son caractère plutôt « gentil et pas violent ». Elle a demandé un sursis avec mise à l’épreuve.
Le parquet a été au-delà du réquisitoire et a condamné l’homme à six ans de prison ferme, assorti d’un suivi socio-judiciaire durant trois ans après sa sortie, avec interdiction de rentrer en contact avec des mineurs. Le tout assorti d’une inscription au fichier judiciaire des délinquants sexuels. Il devra aussi verser à la mineure une somme de 2 millions de Fcfp et de 1,6 million à ses parents.
À l’annonce du verdict, l’homme n’a pas pipé mot. Mais sa victime restera elle aussi prisonnière de ce qu’elle a subi. Ce que craint son père qui n’a pas voulu qu’elle soit présente dans la salle, et qui fait tout son possible avec sa mère pour qu’elle se change les idées.
* Afin d’éviter les traumatismes liés à la multiplication d’auditions, l’enregistrement sonore ou audiovisuel d’un mineur est obligatoire. Mais cela requiert son consentement ou celui de son représentant légal. Ces auditions sont menées dans le cadre d’une procédure appelée « Mélanie », du nom de la première petite fille à avoir été entendue dans ces conditions.