Juba (AFP) – Le président sud-soudanais Salva Kiir et son rival, le vice-président Riek Machar, ont répondu lundi à l’appel de la communauté internationale en décrétant un cessez-le-feu après quatre jours de combats meurtriers entre leurs troupes dans la capitale Juba.
Presque au même moment, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a réclamé « un embargo immédiat sur les armes » destinées au Soudan du Sud et de nouvelles « sanctions ciblées » contre les fauteurs de troubles.
« Le président a réitéré son engagement à la mise en oeuvre de l’accord » de paix du 26 août 2015 et signé un décret ordonnant « la cessation des hostilités avec effet immédiat » à partir de 18H00 locales (15H00 GMT), a annoncé le ministre de l’Information, Michael Makuei, dans une allocution retransmise à la télévision d’Etat (SSBC).
Tous les commandants de l’armée gouvernementale (SPLA) ont « ordre de cesser tout combat et d’obéir à ce décret, de contrôler leurs forces et de protéger la population civile et ses biens », a poursuivi M. Makuei.
Riek Machar a également annoncé, dans un entretien à la radio locale Eye Radio Juba, avoir ordonné à ses troupes « un cessez-le-feu immédiat » à partir de 20H00 (17H00 GMT).
Juba est le théâtre depuis vendredi soir de combats entre les forces loyalistes, fidèles à Salva Kiir, et les ex-rebelles aux ordres de Riek Machar. Les affrontements ont impliqué lundi de l’artillerie lourde près de l’aéroport (nord-est) et dans le quartier de Tomping (centre), selon une source diplomatique occidentale.
Les affrontements ont été provoqués par une altercation meurtrière jeudi soir à un des nombreux barrages de la ville.
– ‘Hélicoptères de combat’ –
Ces combats ont fait « plus de 300 morts » dans la seule journée de vendredi, a indiqué le ministre de l’Information. Aucun bilan n’est disponible pour les jours suivants, alors que deux Casques bleus chinois ont été tués par une « bombe » ayant touché dimanche un véhicule blindé de l’ONU.
Des coups de feu sporadiques ont été brièvement entendus lundi soir à Juba.
Ces nouvelles violences, qui coïncident avec le cinquième anniversaire de l’accession à l’indépendance du Soudan du Sud, font craindre une reprise des combats dans tout le pays, déchiré depuis décembre 2013 par une guerre civile qui a déjà fait plusieurs dizaines de milliers de morts et près de trois millions de déplacés.
Ban Ki-moon a exhorté lundi le Conseil de sécurité de l’ONU à « renforcer la mission de l’ONU au Soudan du Sud » (Minuss) en la dotant notamment d’hélicoptères de combat.
Réuni en urgence à New York dimanche soir, le Conseil de sécurité de l’ONU avait déjà dit envisager de renforcer la Minuss et demandé aux pays de la région « de se préparer à fournir des troupes supplémentaires au cas où le Conseil le déciderait ».
Washington a une nouvelle fois exigé lundi l’arrêt des combats. « Les Etats-Unis condamnent dans les termes les plus forts le retour de la violence au Soudan du Sud. Cela doit cesser », a déclaré dans un communiqué Susan Rice, conseillère à la sécurité nationale du président Barack Obama.
Mme Rice a dénoncé « Cette violence insensée et inexcusable, menée par ceux qui placent encore une fois leurs propres intérêts au-dessus du bien-être de leur pays et de leur peuple ».
– ‘Pris dans les combats’ –
Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de l’Igad, organisation des pays de la région, se sont réunis à Nairobi lundi et ont indiqué qu’ils demanderaient une révision du mandat de la Minuss pour « permettre la présence de plus de soldats (de l’ONU, ndlr) dans la capitale Juba » si les armes n’étaient pas déposées immédiatement.
Le président de la Commission de surveillance et d’évaluation de l’accord de paix signé le 26 août 2015, Festus Mogae, a exhorté lundi à « une mise en oeuvre immédiate » de cet accord.
Des milliers de civils ont dû fuir les quartiers les plus touchés par les affrontements. Parmi eux, le correspondant de l’AFP a décrit une « situation terrifiante ».
Selon la Minuss, 7.000 civils se sont réfugiés dans deux de ses camps, dont un à proximité duquel les combats ont éclaté, et qui abrite déjà 28.000 déplacés. D’autres se sont réfugiés par centaines dans les églises de la ville.
Déclarant que son camp a été « pris directement dans les combats », la Minuss a indiqué que 67 personnes avaient été blessées, dont huit sont ensuite décédées, dans ou autour de sites de protection réservés aux civils.
© UNMISS/AFP BEATRICE MATEGWA
Des civils réfugiés dans une camp le 11 juillet 2016 à Tomping à Juba