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« Sur le chemin des étoiles » : l’histoire extraordinaire du peuplement océanien

Éric Conte présentait son dernier livre, paru chez Au Vent des îles, ce mardi à la bibliothèque universitaire : « Sur le chemin des étoiles ». Professeur des universités en ethnoarchéologie océanienne à l’Université de Polynésie française, fondateur et dirigeant du centre international de recherche archéologique sur le Polynésie et directeur de la Maison des sciences de l’homme du Pacifique, il fait la première synthèse en français des connaissances actuelles sur le peuplement de l’Océanie et les techniques de navigation traditionnelles.

Le peuplement des îles polynésiennes a toujours fasciné les chercheurs, les navigateurs et quelques aventuriers, donnant naissance aux théories les plus farfelues, avant d’être désormais un peu mieux connu et expliqué. Parmi les idées les plus originales, Éric Conte cite le continent perdu de Mu, un éden englouti par les eaux ; d’autres ont fait l’objet de tests grandeur nature comme la thèse de Thor Heyerdahl sur l’origine amérindienne des Polynésiens qu’il mettra en œuvre avec la traversée du Pacifique d’Est en Ouest sur le Kon Tiki. Mais les preuves scientifiques et archéologiques ont toutes fait pencher la balance vers le peuplement d’origine asiatique, volontaire et non pas hasardeux. Une « prouesse » qui fait partie des plus grandes aventures maritimes de l’humanité.

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« Courage, intelligence, esprit d’aventure », mais aussi fabrication de bateaux capables d’affronter la haute mer alors que les artisans ne disposaient que d’outils de pierre, de matières végétales et animales… Éric Conte revient sur la fabrication des pirogues, « perfectionnées au fil du temps », listant l’ingéniosité des artisans, de véritables experts dans leur art. « Ces embarcations constituent probablement le produit technologique le plus sophistiqué des civilisations océaniennes. » Il fallait déterminer quel bois utiliser, à quel moment le travailler, de quelle façon, comment calfater les coutures quand les pirogues étaient un assemblage de planches, le tissage des voiles… « Les experts polynésiens travaillaient sans aucun plan et devaient conserver en mémoire la forme de chaque élément entrant dans la construction de l’embarcation dans ses moindres détails. » L’auteur revient également sur la « vision du monde des navigateurs polynésiens » avec notamment la carte de Tupaia qui a longtemps « posé beaucoup de questions à beaucoup de monde ».

Et malheureusement, des connaissances qui ont pratiquement disparu : « De même que les pirogues imposantes ont depuis longtemps déserté les eaux polynésiennes, de même se sont éteints sans disciples les derniers experts en navigation », écrit Éric Conte. « La reconstitution, certes partielle, de ce savoir a été possible en confrontant les bribes de connaissances parvenues jusqu’à nous avec les procédés de navigation encore employés dans certaines îles de Micronésie, les îles Marshall et les Carolines notamment. » Même si des pirogues existent, qu’elles font des traversées, que « cet art se perpétue d’une certaine façon », aujourd’hui, assure Éric Conte, il n’est plus possible de naviguer de manière traditionnelle.

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La recherche se poursuit pour encore mieux appréhender cet exploit scientifique. Beaucoup de questions restent, comme l’explique Éric Conte : comment les gens se sont répartis entre toutes les îles de la Polynésie, sur laquelle lui-même « tente une carte qui reste hypothétique », comment expliquer le contact avec l’Amérique ou encore cette « pause » de 2 000 ans dans le peuplement de l’Océanie.

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Ce livre, surnommé « l’Arlésienne » des éditions Au Vent des îles avec humour par son directeur Christian Robert et l’auteur, a été l’effort de nombreuses années de travail pour sa publication. Éric Conte sera en dédicace ce samedi 8 avril à la librairie Odyssey, à partir de 9 heures.