Nîmes (AFP) – Le gouvernement présentera à l’automne un plan « spécifique, concret, précis » et surtout « financé » pour le parc pénitentiaire, a promis lundi Manuel Valls lors d’une visite à la maison d’arrêt de Nîmes, qui détient le record français de surpopulation carcérale.
La « pause » estivale du gouvernement à peine entamée, le Premier ministre et le garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas ont passé plus de deux heures à la maison d’arrêt de Nîmes, Manuel Valls relevant sa situation « particulièrement critique ». Elle accueille à l’heure actuelle 406 détenus, hommes et femmes, pour une capacité théorique de 192 places, selon son directeur Luc Joly.
Le 1er juillet, le nombre de détenus dans les prisons françaises a atteint un nouveau record avec 69.375 personnes incarcérées pour 58.311 places.
Le Premier ministre s’est gardé de toute annonce définitive, martelant que « le gouvernement agit, et tout particulièrement depuis que Jean-Jacques Urvoas est garde des Sceaux », dans une allusion à peine cachée à son inimitié notoire pour l’ancienne ministre de la Justice Christiane Taubira.
M. Valls a indiqué que « des réflexions sont en cours qui permettront de faire face à l’accroissement de la population carcérale à moyen terme ». « Des pistes seront présentées à l’automne, avec un plan spécifique, concret, précis, financé – car par le passé il y a eu tant d’annonces mais jamais financées – sur le parc pénitentiaire ».
M. Urvoas a rappelé qu’il devait présenter au Parlement en septembre un rapport sur l' »encellulement individuel », un « impératif de sécurité », alors que la vague d’attentats en France pose de façon aiguë la question de la radicalisation en prison.
« Nous luttons (…) avec détermination contre la radicalisation en prison », a assuré M. Valls.
– « Alternatives à la détention » –
Citant des travaux de rénovation en cours dans des établissements vétustes, comme la Santé à Paris, ainsi que l’ouverture de nouveaux établissements, à Beauvais ou Valence, il a estimé qu' »il reste cependant beaucoup de travail à faire ».
« Nous avons créé plus de 1.100 postes dans l’administration pénitentiaire », a fait valoir le Premier ministre, annonçant qu’il se rendrait cet automne, avec le ministre de la Justice, à Agen, à l’Ecole nationale de l’administration pénitentiaire.
La maison d’arrêt de Nîmes, sanctionnée il y a un an par le Conseil d’Etat, « concentre les difficultés: surpopulation féminine, augmentation du nombre de matelas par terre », a-t-il relevé, se refusant cependant à toute annonce spécifique sur cet établissement. Une enveloppe de 200.000 euros a été débloquée pour établir différents scenarii de réfection et d’extension, a précisé M. Joly.
« La première décision de François Hollande a été de revenir sur la création de 8.000 places de prison supplémentaires » décidée sous Nicolas Sarkozy, a dénoncé le parti Les Républicains, plaidant pour « construire 20.000 places supplémentaires ».
« La disparition de toute politique judiciaire et pénitentiaire digne de ce nom, à partir de 2012 et jusqu’à 2016, est une faute dont la France continue à payer le prix », a aussi critiqué dans un communiqué le porte-parole du parti LR, Guillaume Larrivé.
« Si le gouvernement n’avait pas sacrifié le programme de construction de places de prisons supplémentaires au nom d’un antisarkozysme primaire, la France n’en serait pas là », a déploré le député LR des Alpes-Maritimes Eric Ciotti, regrettant « la prise de conscience tardive du gouvernement ».
Sur twitter, le député Gilbert Collard (proche du FN) a aussi estimé que l’exécutif, « toujours en retard », aurait dû présenter ce plan « depuis quatre ans ».
« L’Histoire a montré que plus on construisait de places, plus elles étaient remplies », a mis en garde la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) Adeline Hazan, plaidant pour que « la prison soit véritablement, comme la loi l’indique, le dernier recours ».
Pour l’ancien secrétaire d’Etat à la justice Jean-Marie Bockel (UDI), il faut « poursuivre l’humanisation des conditions de détention (…) améliorer la mise en œuvre des peines alternatives », ou encore développer les « prisons ouvertes ».
© AFP SYLVAIN THOMAS
Le Premier ministre Manuel Valls à la maison d’arrêt de Nîmes le 8 août 2016