Après trois ans de travaux et quelques imprévus, le Swac du CHPF est entré en fonction en fin de semaine dernière. La puissante climatisation de l’hôpital fonctionne donc désormais uniquement grâce à ce système de refroidissement à l’eau de mer, le plus gros du monde. De quoi faire baisser de 2% la consommation électrique totale de Tahiti.
« Plus de doute » pour le Pays : le Swac de l’hôpital est bien lancé. L’ouvrage à 3,7 milliards de francs a été réceptionné « sans réserve » en fin de semaine dernière, comme l’avait annoncé Yvonnick Raffin à Tarahoi début juillet et comme l’a confirmé Tahiti Infos ce weekend. Ce système de climatisation à l’eau de mer (ou Sea Water Air Conditioning), qui va puiser de l’eau à 5°C à 900 mètres de profondeur pour refroidir le circuit interne de l’hôpital, avait fini d’être installé en novembre dernier à Taaone. L’entrée en fonction était alors programmée pour la fin d’année, mais des problèmes avaient été repérés au niveau du réseau secondaire et du local technique construit à proximité du centre hospitalier. De nouveaux travaux et surtout de nouveaux tests avaient alors dû été lancés.
Des « aléas » mais un « ouvrage qui fonctionne »
Des aléas « inhérent à tout marché », notamment pour un ouvrage innovant de cette ampleur, explique Pierre Boscq. Le directeur du Service des énergies (SDE), organe qui a piloté ce projet porté par la Polynésie, rappelle que le chantier, débuté en 2019 après plusieurs années d’études, avait déjà été retardé par la crise Covid, avant même le transport, forcément complexe, des 3,8 kilomètres de tuyaux depuis la presqu’île jusqu’à Pirae. Les difficultés de livraison en matériel de ces derniers mois n’ont pas non plus aidé. « Mais d’un point de vue technique, on n’a pas de difficultés, pointe le responsable. On a aujourd’hui un ouvrage qui fonctionne tel qu’il a été prévu, et qui permet d’alimenter l’hôpital dans son entièreté en climatisation ».
Les puissants groupes du Taaone ont donc été coupés ; seul un petit apport électrique permet de faire tourner le nouveau système de refroidissement. Une bouffée d’air financière pour le centre hospitalier à qui la gestion de l’ouvrage a été transférée par arrêté, et qui versera au Pays 110 millions de francs par an pour le rembourser. La somme est à comparer avec l’économie sur la facture d’électricité : 250 à 350 millions de francs par an, en fonction de l’évolution des besoins de l’hôpital. L’investissement – réalisé par le Pays sur la base de prêts de l’AFD, de la Banque européenne d’investissement, d’une subvention de l’Ademe, mais aussi grâce à des fonds propres de la Polynésie – sera amorti sur 20 ans. Le Swac, le plus long et le plus puissant du monde devant ceux de Bora Bora et Tetiaroa, doit, lui, rester en fonction pour 30 ans. « C’est un ouvrage qui s’inscrit dans le plan de transition de la Polynésie, qui consiste à réduire le besoin et de produire des énergies renouvelables, reprend Pierre Boscq. Là on fait d’une pierre de coup : on va permettre d’économiser 10 GWh d’électricité. C’est la consommation de 3 000 à 4 000 foyers et également 2% de toute l’électricité dont a besoin l’île de Tahiti ».
À quand un nouveau projet ?
Vu ses dimensions et son rôle, le Swac du Taaone a éveillé des intérêts hors de la Polynésie. Le Service des Énergies a plusieurs fois été sollicité pour présenter ou faire visiter les installations à des « opréateurs intéressés par cette technologie ». Une technologie particulièrement adaptée aux îles polynésiennes et leur tombant raide et proche de la côte, mais qui est « transposable à toutes les zones à la topographie similaire ». Avant d’inspirer à l’international, la climatisation à l’eau de mer pourrait aussi se développer davantage dans le pays. Des études ont notamment été menées pour équiper la cité administrative et judiciaire de Papeete, le long de l’avenue Pouvanaa a Oopa. « Techniquement possible, reprend le directeur du SDE. Financièrement c’est un peu plus difficile puisqu’on a pas des bâtiments qui consomment de manière permanente. L’hôpital, son besoin est constant tout au long de l’année et sur 24 heures. C’est moins le cas quand on a des bâtiments tels que des bureaux« .
Le projet d’un Swac le long de l’avenue Pouvanaa n’est toutefois pas entièrement enterré : « il faudra sûrement trouver des portages différents si on veut trouver une rentabilité économique », précise le responsable.