Un Wallisien, deux Calédoniens, des Antillais ou des Réunionnais… mais pas de Tahitiens. Contrairement aux Jeux olympiques, le fenua ne compte aucun représentant aux Jeux Paralympiques, dont la cérémonie d’ouverture est programmée ce mercredi matin à Paris. Pas même en va’a, discipline intégrée aux olympiades handisport en 2021. Outre les problèmes d’affiliation aux fédérations métropolitaines et le manque de motivation constaté au moment de s’investir dans le haut niveau, la Fédération polynésienne des sports adaptés et handisport explique se concentrer sur l’accessibilité au sport pour tous plutôt que sur la fabrique à champions.
Il y a un mois, la Polynésie française a pu suivre trois enfants du pays, Vahine Fierro, Teura Tupaia et Kauli Vaast, sur les épreuves olympiques de Paris 2024. Ceux-ci terminés, les Jeux paralympiques prennent le relais, à partir de mercredi. Une compétition dans laquelle aucun tahitien n’est engagé. La plupart des autres territoires d’outre-mer sont pourtant représentés. Dans la région, la Nouvelle-Calédonie compte par exemple deux représentants en athlétisme, trois si l’on compte le Wallisien Vitolio Kavakava, qui s’entraîne à Nouméa. Il y a en avait déjà trois à Tokyo : le fruit d’un long travail mené sur le Caillou, qui compte un pôle France dédié à l’athlétisme handisport depuis 2017.
Au fenua, la Fédération polynésienne des sports adaptés et handisport, créée en 1999, se démène pour valoriser les sportifs porteurs de handicap. Et avoue sans problème se concentrer sur la quantité plutôt que la qualité. « Le haut niveau a un coût. Quand nous avons commencé, nous avons voulu privilégier et valoriser le sport de masse, contrairement à la Nouvelle-Calédonie, qui ne s’occupe que des champions », explique la présidente de la Fédération, Henriette Kamia. Une fois ces bases posées, « nous travaillons vers le haut niveau », assure la dirigeante. Les disciplines potentielles sont identifiées, avec le va’a bien sûr, mais aussi le tennis de table, le tir à l’arc ou l’athlétisme, rares sports dont les déclinaisons handi sont proposées aux Jeux du Pacifique.
Mais réussir à propulser des sportifs aux Jeux paralympiques reste un long parcours du combattant. « Il faut trouver des personnes sérieuses. Nous avons les licenciés, entre 800 et 900. Mais rares sont celles et ceux qui veulent s’investir dans le haut-niveau, qui arrivent à être assidus », poursuit Henriette Kamia. Et réussir à travailler avec les fédérations concernées. « Il faut aussi trouver la bonne personne selon la bonne catégorie de classification », ajoute Christian Chee-Ayee, trésorier de la fédération et figure locale du handisport. Autre condition, « être affilié à un club métropolitain », rappelle le président du COPF Louis Provost, puisqu’une sélection en équipe de France ne peut se faire que sous l’égide de la fédération française. « Les Calédoniens ont un système de ligue, donc ils n’ont pas besoin de faire ça, alors que nous sommes dans un système fédéral », souligne-t-il. Pour participer aux compétitions en équipe de France, Vahine Fierro et Kauli Vaast se sont par exemple licenciés dans des clubs landais, Teura Tupaia l’est en Alsace.
De l’espoir et des écueils pour les rameurs
A l’avenir, « je pense que c’est le va’a qui va nous mener » aux Jeux paralympiques, estime Henriette Kamia. En effet , la pirogue est intégrée au programme paralympique depuis Tokyo 2021, uniquement sur des épreuves individuelles et en sprint, dans les catégories VL2 (athlète pagayant avec les bras et partiellement avec le tronc ou les jambes) et VL3 (athlète pagayant avec les bras, le tronc et les jambes, dans une catégorie qui inclut divers handicaps moteurs et physiques, notamment visuels, et mentaux). Et ce, sur une embarcation qui ne ressemble pas exactement aux va’a polynésiens, ayant la coupe d’un kayak, le ama en plus. Il n’en existe d’ailleurs qu’un seul modèle au fenua, il est utilisé aux Australes par Patrick Viriamu.
Comme de nombreux tahitiens, Patrick Viriamu est multi-champion du monde de parava’a, dont encore la semaine dernière à Hilo. Mais ces résultats ne valent rien dans la course à la qualification paralympique. Aucun des rameurs engagés en VL2 ou VL3 à Paris n’était d’ailleurs présent sur les courses handisport à Hawaii. Car les tickets pour Tokyo 2021 et Paris 2024 sont attribués, non pas par la fédération internationale de va’a, mais par celle de canoë-kayak. Celle ci organise ses propres mondiaux, où sont intégrées les fameuses pirogues handisport. Pour espérer participer à ces courses qualificatives, les rameurs polynésiens doivent donc se rapprocher de la Fédération française de canoë-kayak. Il y a quelques années, les rameurs Raiarii Teuiau et Patrick Viriamu s’étaient ainsi licenciés en métropole, en Bretagne et à Dijon, pour s’engager sur des compétitions locales leur permettant d’intégrer le processus de qualification paralympique. Patrick Viriamu était d’ailleurs dans les clous pour les Jeux de Paris, « mais il a déjà plus de 50 ans et ses concurrents sont de plus en plus jeunes », rappelle Henriette Kamia. A l’avenir, la Fédération polynésienne des sports adaptés et handisport mise beaucoup sur Gervais Aumeran, champion du monde de marathon l’an passé et de sprint cette année.