Le tavana de Taiarapu – Est Anthony Jamet a profité d’une inauguration de fermes solaires, mardi, pour interpeller le Pays sur les tarifs de l’électricité, qui restent plus chers dans la zone Sud qu’au Nord de Tahiti. Et pourtant c’est bien le Sud qui produit, avec ses barrages et aujourd’hui ses centrales photovoltaïques, l’essentiel de l’énergie renouvelable et à bas coût de l’île. L’élu demande donc un nouveau calcul du mix énergétique facturé au Secosud, qu’il préside. Ce qui permettrait de faire baisser les tarifs et faire gagner en « attractivité » le « deuxième pôle de développement économique du Pays ».
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Quatre nouvelles grandes fermes solaires, seize centrales hydroélectriques qui marchent à plein régime, et un débat qui prend de l’ampleur au Sud de Tahiti. Pas que les habitants de la Presqu’île soient en guerre contre les énergies renouvelables, bien au contraire. Certains se demandent pourquoi ils ne profitent pas davantage de cette électricité propre et surtout moins coûteuse que l’énergie thermique produite à partir de gazole à Punaruu ou Papeete. Comme Anthony Jamet, qui a profité mardi de l’inauguration des deux fermes photovoltaïques – et bientôt apicoles – de la filiale d’EDT Ito Nui pour interpeller le Pays sur les tarifs de l’électricité dans la zone Secosud.
Le tavana de Tairapu – Est connait bien le sujet puisqu’il est le président de ce syndicat qui gère le réseau de distribution entre Papenoo et Mataeia en incluant la Presqu’île. Une zone où se concentrent donc l’essentiel des moyens de production solaire et toutes les installations « hydro » du Pays, et dont les usagers paient « paradoxalement » leur électricité plus cher que dans la concession Tahiti-Nord.
Gagner en « attractivité » et en « compétitivité »
En cause : le système de vente de l’énergie au Secosud, qui se base sur un mix énergétique fixe : « deux tiers de thermique, un tiers de renouvelable ». Un rapport que Anthony Jamet voudrait voir « inverser » pour prendre en compte la réalité de la distribution des moyens de production. « Ce qu’on voudrait, c’est que l’énergie renouvelable constitue la part du mix qu’il faut pour influer sur le tarif, insiste le président du syndicat. Ce qu’on paie pour le mix actuel, c’est 28 à 30 francs (par kWh, ndr). Les fermes qu’on vient d’inaugurer, elles produisent à 20,49 francs, ça fait presque un écart de 8 francs. Les deux autres fermes, c’est entre 17 et 19 francs. Et la production hydroélectrique, c’est 15 francs en moyenne. Imaginez si nous accédons directement à ces tarifs. C’est sûr que les entreprises seront intéressées à venir chez nous ».
Car l’objectif, hormis le gain en pouvoir d’achat pour les consommateurs particuliers, c’est bien de faire gagner la zone Sud en « attractivité », en « compétitivité ». Devenir une « vitrine des énergies renouvelables », avec des tarifs électriques cohérents avec cette activité, ce serait ainsi accélérer « le développement du deuxième pôle de développement économique du Pays ». « Ça permettrait de constituer un ‘produit d’appel’ pour faire venir des investisseurs, des entreprises, avec à la clé, des créations d’emplois et le maintient de notre population pour travailler et rester chez eux », résume le tavana.
Raisonner « réseau » et « solidarité » plutôt que « privatiser la production d’électricité »
Un discours qui a de quoi résonner auprès du gouvernement Brotherson, qui a fait de la décentralisation et du développement du pôle Sud une de ses priorités. Hier, lors des inaugurations, ça n’était pas le président – alors aux Marquises – qui faisait face à Anthony Jamet, mais son ministre des Finances Warren Dexter. Et sans fermer entièrement la porte, il voit aussi les conséquences qu’auraient un tel changement sur la zone Nord : si le Sud s’accapare une plus grande part de l’électricité d’origine renouvelable, le Nord devra se reposer davantage sur le thermique. Et si les factures baissent d’un côté, elles grimperont de l’autre : « Il faut qu’on regarde, mais les grands principes de la politique énergétique, c’est de raisonner en matière de réseau et de solidarité, rappelle-t-il. Donc je dirais que c’est compliqué d’aller dans son sens. Si tout le monde faisait la même chose, on privatiserait en quelques sortes la production d’électricité dans chaque territoire ».
Le ministre reconnait tout de même que le prix de l’électricité au Sud est un « sujet à étudier ». En attendant, le Secosud devrait déjà avoir un petit peu de marges de manœuvre supplémentaires pour faire baisser les prix puisque les deux fermes solaires de Ito Nui inaugurée hier à Taravao n’ont pas été reliées au réseau de transport de Tahiti mais directement au réseau de distribution locale. Un peu d’énergie moins chère dans les tuyaux, donc, et des décisions à prendre du côté du syndicat sur la façon de répercuter aux consommateurs cette nouveauté.