Dans une question orale, ce jeudi matin à l’Assemblée, la représentante Tepuaraurii Teriitahi a pointé du doigt le recrutement d’un métropolitain fonctionnaire d’État détaché au sein du cabinet du ministre de l’Économie et des Finances. « Une contradiction de plus », pour l’opposition, quand Tevaiti Pomare assume. Il y voit une question de compétence, que l’on ne retrouverait pas dans le vivier local, en raison « du manque d’implication des politiques antérieures dans l’océanisation des cadres ».
« Une contradiction de plus au Tavini ! », fustige Tepuaraurii Teriitahi. Ce matin à Tarahoi, la représentante Tapura a interpellé le gouvernement au sujet du recrutement d’un fonctionnaire d’État détaché (FEDA) métropolitain, au sein du cabinet du ministre de l’Économie et des Finances Tevaiti Pomare. Si elle ne l’a pas cité nommément, il s’agit d’un certain Grégoire Bossin, nommé « conseiller technique économie » en juin. Celui qui se présente sur ses réseaux professionnels comme un spécialiste de l’économie internationale, a travaillé deux ans comme chargé de mission « export, invest, innovation et tourisme » au ministère des Outre-mer à Paris, un poste qui l’avait déjà amené à se rendre en Polynésie. Un recrutement « fait un petit peu en catimini, mais qui est arrivé à nos oreilles », relate Tepuaraurii Teriitahi.
Dans sa question orale, la représentante a rappelé l’adoption, à l’unanimité, de la délibération relative au régime applicable aux fonctionnaires détachés au sein de la fonction publique d’État. « Nous avions voté cette loi pour limiter leurs avantages. Un texte qui avait été assez polémique, car beaucoup associaient les FEDA à des expatriés métropolitains, alors que beaucoup d’entre eux sont des Polynésiens, lauréats de concours, qui demandent un détachement dans l’administration du Pays. Le sens était de favoriser ces fonctionnaires d’État d’origine polynésienne », souligne l’élue des Îles du Vent.
Pour le Tapura, les compétences existent dans le vivier local
Elle a aussi rappelé « les récentes prises de positions hostiles des élus de votre majorité Tavini, de vos ministres ou de vos ex-députés, sur nos frères et sœurs métropolitains ayant choisi la Polynésie française comme pays d’adoption ». Et d’insister sur son « étonnement », de voir « que votre gouvernement continue de procéder à des recrutements de fonctionnaires d’État, originaires de métropole ».
Recrutement, qui, selon Tepuaraurii Teriitahi peut s’expliquer de deux manières : soit « une fois de plus, un renoncement à vos engagements de campagne et aux valeurs de votre parti politique », soit une mauvaise prospection parmi le vivier de fonctionnaires d’État d’origine polynésienne. « On sait qu’il y a des personnes assez compétentes ici, notamment en matière d’économie », assure celle qui voit dans cette embauche « une réelle contradiction, quand on entend les syndicats demander de vraies mesures de protection de l’emploi local ».
Non, répond le gouvernement, qui rejette la faute sur les exécutifs précédents
Nulle contradiction pour Tevaiti Pomare. Dans sa réponse, le ministre précise être « soucieux de rendre accessible le recrutement aux cadres polynésiens, dès lors que les compétences recherchées existent ». Dans le cas de sa recherche d’un conseiller technique, « les compétences dans le domaine prospecté, ainsi que le relationnel professionnel correspondant ne sont hélas pas acquises par des cadres locaux ». Des lacunes qui s’expliquent, selon le ministre, « par un manque d’implication conséquent des politiques antérieures dans la véritable océanisation des cadres« . Tevaiti Pomare rappelle aussi qu’il « est laissé le soin à chaque administration ou ministère d’apprécier et de procéder à la sélection des profils, en fonction des besoins en compétences et en savoir-faire ».
« Le ministre répond que c’est sa liberté, nous prenons acte. C’est faites ce que je dis mais pas ce que je fais », balaye Tepuaraurii Teriitahi. Une « liberté » qui permet tout de même à Tevaiti Pomare de s’entourer d’un joli CV. Outre ses passages au ministère des Outre-mer et à la ville de Paris, Grégoire Bossin a notamment été chargé d’études économiques à la Caisse des Dépôts, économiste spécialiste de l’Asie dans une banque d’investissement, où encore directeur des ventes en Thaïlande pour le leader mondial du luxe. Selon son CV, il parle en outre six langues, dont le mandarin.