Trois associations, Tamarii pointe des Pêcheurs, Tamarii no te moana et Mata ‘Avei’a, ont présenté leur projet Toa Nuuroa, à l’université jeudi soir. Cette expérience scientifique et artistique ambitieuse vise à restaurer les récifs avec une méthode innovante et limiter la prolifération de l’algue turbinaria ornata.
Les quatre élus de la mairie de Punaauia qui étaient présents dans l’amphithéâtre de l’université, jeudi soir, ont assuré avoir été bluffés par la présentation du projet Toa Nuuroa. Ce n’était pas la première fois qu’ils en entendaient parler évidemment car la mairie est partenaire de cette vaste opération mais ils ont pris le micro pour saluer le travail des trois associations, leur ambition et assurer de leur soutien. Le projet Toa Nuuroa vise à augmenter la couverture corallienne sur trois sites de Punaauia, la pointe des pêcheurs, la Source et Saint-Étienne, et y limiter la prolifération de l’algue turbinaria ornata. C’est en 2019, que les habitants de ces quartiers, les pêcheurs, les surfeurs, les plongeurs, observent un épisode massif de blanchiment de corail et décident d’agir ensemble. « La plus grande peur est que les générations futures ne voient pas les mêmes choses que nous dans le lagon », explique Bastien Allegret, professeur d’arts plastiques au collège Henri-Hiro, cofondateur et président de l’association Tamarii no te moana et chef du projet Toa Nuuroa.
Tester la « micro-fragmentation »
L’objectif est d’expérimenter un protocole de restauration corallienne qui pourrait devenir réplicable ailleurs s’il fonctionnait. Les scientifiques du projet ont comparé les différentes méthodes et choisi celle de la « micro-fragmentation » : « C’est une technique éprouvée et la plus rapide. Les recherches ont été faites aux Caraïbes où un scientifique a fait plusieurs expériences avec plusieurs tailles de morceaux de coraux pour finalement trouver ce carré de 1cm2. » Une taille adéquate où le corail reprend vie et se développe rapidement. Ces expériences sont devenues une méthode complète que les trois associations souhaitent tester ici. Très concrètement, une colonie de coraux en bonne santé est identifiée, les parties supérieures sont cassées pour en faire des petits carrés de 1cm2. Ces micro-fragments sont posés sur des plugs, mis en nurserie, sélectionnés, puis transplantés sur des cookies avant d’être replantés sur le récif. Les plugs et cookies sont comme des boitiers dans lesquels s’insèrent les fragments de coraux. Au départ importés, ils sont désormais fabriqués sur place. Cette opération est complétée par l’arrachage de l’algue turbinaria ornata et sa valorisation. « Il y a deux aspects : corail et algue. On a une petite ambition sur le côté corail car on est en train de tester une nouvelle technique et de la mettre en œuvre sur le terrain. Par contre le côté algues, on a un choix des possibilités plus larges, sur des idées de valorisation, avec un laboratoire qui fait des recherches. »
C’est l’entreprise Pacific Biotech qui est actuellement en recherche et développement pour la transformer en alimentation animale notamment aquacole, en biofertilisants et biostimulants pour l’agriculture, en matériel biomédicale… Une étude est également menée pour mieux comprendre le développement de cette algue et l’impact de son arrachage.
Utiliser l’art contemporain pour communiquer les données scientifiques
Tout ce travail scientifique a déjà commencé et se terminera en 2025. « Notre objectif est d’être le plus transparent possible car on communiquera sur ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Ce sera forcément des avancées », explique Bastien Allegret. C’est à ce moment-là que la troisième association Mata Avaei’a intervient. Car les organisateurs du projet Toa Nuuroa souhaitent « sensibiliser » à leur cause via l’art contemporain et communiquer les données scientifiques. « Il s’agit d’informer en mettant en scène visuellement et scénographiant les résultats de l’étude scientifique, en démocratisant et vulgarisant les informations scientifiques ; d’inspirer en touchant le public autrement et en utilisant la cause environnementale comme vecteur de créativité ; et de questionner en remettant les enjeux du projet au cœur des préoccupations éthiques, philosophiques et humaines », explique Yiling Changues, président de l’association. Un appel à candidatures a été lancé et les artistes ont jusqu’au 31 octobre pour y répondre (tous les détails se trouve sur le site : toanuuroa.com).