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« Tout va bien mieux », déclare Moetai Brotherson à l’assemblée

« Cap inchangé » pour le gouvernement qui soumettra à l’assemblée, le mois prochain, sa proposition de budget 2025. Les premières mesures de la réforme de la PSG et de la réforme de la fiscalité restent encore mystérieuses, tandis que l’opposition qui l’accuse de profiter d’une bonne conjoncture globale, et des restes de l’ancien gouvernement, prédit une année 2025 difficile.

Dans son discours d’ouverture de la session budgétaire de l’assemblée de la Polynésie, le président du Pays a d’abord tiré un bilan de l’action du gouvernement ; un bilan qu’il juge forcément positif et aligné avec les « trois piliers » de la campagne électorale, mais il est resté assez vague sur les moyens qu’il va se donner en 2025. « Je n’allais pas tout spoiler aujourd’hui, donc j’ai fait des teasers, effectivement », disait-il à la sortie, comme un producteur aguerri dont le « pitch » est rôdé bien avant le lancement du tournage.

Il a estimé que « en une année et demie de gouvernance, la politique conduite par le gouvernement avec le soutien de sa majorité a produit des résultats importants et intéressants ». Il a notamment mis à son crédit le retour de « l’inflation à un niveau plus qu’honorable » (1,2% contre 1,9% en métropole, ndr) : « notre politique a permis de maintenir la stabilité des prix », un PIB à « un niveau historique de 706 milliards qui ne tient pas uniquement à l’inflation, mais aussi aux excellents résultats dans le tourisme », « une évolution très favorable de l’emploi » et le retour de « la confiance des opérateurs économiques ». Une confiance toute relative – les entreprises se plaignent du manque de visibilité à moyen terme, disent l’ISPF et l’IEOM – ce que n’a pas manqué de relever l’opposition.

14 milliards de soutien au BTP

Moetai Brotherson a également fait l’éloge de l’action de son gouvernement en matière de grands travaux, citant l’amélioration des délais de traitement et de paiement, et il a glissé que le soutien au BTP pour 2025 serait de l’ordre de 14 milliards sans en donner le détail. On a également appris que des postes supplémentaires sont prévus à la Direction de l’aménagement et de la construction, permettant « une accélération notable des délais d’instruction des permis de construire », et que l’OPH va augmenter son budget pour la construction de fare.

Un budget jeunesse en hausse de 25%

Côté jeunesse, après avoir éteint la menace de grève que Nahema Temarii avait allumée à la direction de la Jeunesse et des Sports, Moetai Brotherson a salué l’« énergie de notre jeune ministre qui prépare le schéma directeur de la jeunesse », un secteur qui verra son budget augmenté de 25% l’an prochain. Il a également eu un mot pour Ronny Teriipaia, félicité pour la conduite de la réforme des bourses post-bac, dont les bénéficiaires sont passés de 600 à plus de 2 000. Un ministre qui travaille à la nouvelle charte de l’Éducation – c’est l’ancien vice-recteur Philippe Lacombe qui tient la plume – et devra ensuite écrire et signer à Paris la prochaine convention décennale.

Protection sociale généralisée : « La réforme est prête »

Sur la santé, le président du Pays affirme que les « propositions de loi sur le tabac et les produits néfastes à la santé sont en bonne voie d’achèvement » sur le bureau de Cédric Mercadal, sans préciser de date pour cet exercice qui va sans aucun doute provoquer un intense effort de lobbying. « Il aura besoin de votre soutien », a ajouté le président. Il a également annoncé pour le premier trimestre 2025 les 80 premiers « éducateurs de santé et d’alimentation » qui seront déployés dans les communes – ils seront 200 en 2026.

Mais surtout, la réforme de la PSG « est prête », a-t-il annoncé, les premières concertations avec les partenaires sociaux sont faites, et les premiers textes seront bientôt présentés à l’assemblée, mais la réforme va s’étaler sur plusieurs années. Ses orientations ont « déjà été présentées au comité de majorité, qui les a validées », assure Moetai Brotherson.

La réforme fiscale va « favoriser la création d’emplois »

Le président annonce une réforme fiscale qui va favoriser la création d’emplois, tout en générant des recettes « autour des 25% du PIB » – autrement dit autour de 175 milliards. Il promet de rendre la fiscalité « juste et équitable », avec entre autres « moins de fiscalité indirecte » et « une meilleure appréhension des revenus ».

De quoi alarmer certains, comme Teva Rohfritsch qui aurait aimé un peu plus de clarté : « Est-ce que cela signifie qu’il y a une taxation nouvelle sur les revenus, est-ce qu’on parle d’impôt sur le revenu, ou d’un ajustement des taux de CST ? » Le président du Pays tient à rassurer : « Tout sera fait pour favoriser la création d’entreprises ».

Rappelons que le gouvernement a jusqu’au 15 octobre pour transmettre aux élus le document d’orientation budgétaire qui servira de support aux débats. En attendant, rendez-vous est fixé aux élus mardi prochain, parce que le gouvernement veut consacrer son jeudi à la foire agricole qui s’ouvre ce jour-là.

 

Édouard Fritch : « Ce gouvernement n’est pas capable de grand chose »

Pour le président du Tapura, les Polynésiens ne trouveront pas dans le discours du président la réponse à leur question principale, comment faire baisser les prix. Édouard Fritch ironise sur le fait que cette fois, Moetai Brotherson a préparé son discours, mais il aurait voulu moins de bilan et plus de perspectives, surtout en matière de cherté de la vie : « Il faut à tout prix qu’il se batte là-dessus, sur les moyens dont disposent les familles pour continuer à vivre, puisque que c’est une promesse électorale. Ce qui lui plaît c’est d’aller faire le facteur à Bora Bora pour livrer des arrêtés, dit-il en référence à la pharmacie de Teano Cojan. Il se satisfait des résultats obtenus, mais la grande question, c’est dans quel monde il vit ? »

Édouard Fritch pointe ce qui a peut-être été l’angle mort du discours présidentiel, le social. « Les CAE ont été supprimés, c’est 5 000 postes de 100 000 Fcfp par mois qui n’existent plus, dit-il, très critique du dispositif qui doit les remplacer et qui avait donné lieu à un débat agité à Tarahoi le mois dernier. Vous avez vu ? À 50 000 Francs par mois ? Et vous avez vu qui y a droit ? C’est fait pour certaines communes, avec des associations qui seront montées demain par le Tavini Huiraatira, et comme pour les fameuses maisons de communication (les fare ora, ndr) ils mettront des gens à eux pour faire de la politique dans les communes. C’est ça qui va se passer, c’est du détournement annoncé. » Pour lui, le gouvernement vit sur les restes des politiques impulsées par l’ancienne équipe, et « l’année prochaine on verra ce que ce gouvernement est capable de faire, mais il n’est pas capable de grand chose. »

 

Teva Rohfritsch : « il faut un débat de société sur la réforme de la PSG »

Le sénateur partage la satisfaction sur la bonne santé économique de la Polynésie, due principalement, dit-il, aux bons résultats du tourisme qui surfe sur « une économie mondiale qui reste dynamique ». Il voit sur plusieurs points « une certaine forme de continuité de programmes dits autonomistes, comme le développement de la Presqu’île ou des archipels. » S’il attend le débat d’orientation budgétaire pour les développements de « beaucoup de grands titres », il s’intéresse au premier chef à la réforme de la protection sociale, et à celle de la fiscalité, mais aimerait qu’elles fassent l’objet d’un grand débat de société avant leur transmission à l’assemblée.

Enfin Teva Rohfritsch note, moqueur, que Moetai Brotherson n’a pas évoqué une seule fois « l’objectif d’indépendance du Pays », ni le calendrier pour y parvenir.

 

Nuihau Laurey : « Aucune anticipation de la part du président » sur l’investissement

Nuihau Laurey de A Here ia Porinetia reste, comme Teva Rohfrisch, « sur sa faim » après le discours du président. « Ce qui nous déçoit c’est que finalement on retombe dans les mêmes travers que les gouvernements qui s’installent dans une forme de déni. L’activité économique, elle est ce qu’elle est, elle est surtout le résultat de décisions qui ont été prises il y a plusieurs mois, plusieurs années. » Nuihau Laurey veut lui aussi en savoir plus sur la réforme fiscale, et fustige « les choix qui ont été faits en matière de défiscalisation » qui ont conduit selon lui à l’annulation de « la quasi-totalité des projets. » « Ça veut dire une activité économique qui va baisser dans les mois qui viennent, et de ce point de vue on ne voit aucune anticipation de la part du président. »

 

 

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