INTERNATIONALMONDE

Trafic d’influence : deux ex-ministres britanniques piégés

© JUSTIN TALLIS / AFP

© JUSTIN TALLIS / AFP

GOSH- Munis d’une caméra cachée, des journalistes du Daily Telegraph se sont faits passer pour des entrepreneurs et ont proposé à des parlementaires de se payer leurs services.

Si le concept de lobbying est ouvertement assumé et légalisé aux Etats-Unis, il n’en est rien au Royaume-Uni. Rien d’étonnant donc à ce que l’attitude des deux parlementaires Jack Straw (travailliste) et Malcom Rikfind (conservateur) ait déclenché un tollé outre-Manche. Et pour cause, les deux élus, accessoirement anciens ministres des Affaires Etrangères, ont monnayé leur prise de position et leur influence auprès d’une entreprise chinoise, leur proposant entre autres de « leur ouvrir les portes de toutes les ambassades britanniques » ou de « modifier discrètement un texte de loi européen » contre 60.000 livres (soit 82.000 euros) par an.

>> LIRE AUSSI – Le lobby nucléaire très présent à l’Assemblée Nationale française selon Noël Mammère

Investigation en caméra cachée. Problème, les entrepreneurs chinois qui les avaient démarchés étaient en fait des journalistes du Daily Telegraph, munis d’une caméra cachée. Les journalistes ont contacté 12 parlementaires : six d’entre eux n’ont pas répondu, un a dit que ses contacts « n’étaient pas à vendre ». Seuls Jack Straw et Sir Malcolm Rifkind ont accepté de les rencontrer. La vidéo, largement relayée, n’a pas vraiment plaidé en la faveur des deux députés, mis à pied par leurs partis respectifs pour soupçon de trafic d’influence.

>> Regardez les vidéos tournées en caméra cachée (en anglais)

Quelques extraits traduits de l’entretien avec Jack Straw :  » Je suis bien conscient que je vais apporter mon nom. (…) Normalement, si je fais un discours ou quoi que ce soit d’autre pour vous, j’ai l’habitude de facturer 5.000 livres par jour. « 

Trafic d'influence : deux ex-ministres britanniques piégés

© Jack Straw, député britannique dans la tourmente.

Une législation obscure. Ces extraits mettent surtout des images et des visages sur une pratique aux contours très flous en Grande-Bretagne. Et pour cause, la loi britannique autorise les élus à toucher des revenus complémentaires, elle exige que ceux-ci soient déclarés et que les députés soient entièrement transparents à ce sujet. Difficilement conciliable avec le petit coup de pouce « en toute discrétion » que proposait Jack Straw donc. Autre point de la législation en vigueur outre-Manche, les parlementaires n’ont pas le droit d’utiliser des ressources parlementaires, dont leurs locaux (ni leur influence ou leur droit de vote), pour leurs activités commerciales privées.

Un tiers des députés ont une activité en dehors de leur mandat. Histoire d’achever de brosser un portrait peu flatteur de Jack Straw, le Telegraph affirme que le travailliste devrait bientôt prendre un poste de directeur au sein d’une entreprise, réelle celle-ci, pour laquelle il aurait déjà fait du lobbying auprès de Francis Maude, membre du gouvernement Cameron, sur deux contrats publics d’envergure (l’un d’entre eux vaut 102 millions d’euros). Jack Straw a réagi en arguant qu’il avait « agi en accord avec les règles parlementaires ». Si les deux députés sont montrés du doigt par ce coup de bluff des journalistes du Daily Telegraph, un tiers des députés exercent des activités déclarées de conseil.

>> LIRE AUSSI – Comment définit-on un lobby ?

« Irréaliste » de vivre avec 80.000 euros par an. Dans la vidéo, on peut voir également Sir Malcolm Rifkind proposer ses services pour 5.000 livres (6.800 euros) par jour et expliquer qu’il était « assez irréaliste » d’imaginer qu’un parlementaire puisse vivre avec seulement 60.000 livres par an (le salaire annuel d’un député, soit 81.000 euros) « sans chercher de revenu complémentaire ».

Tartuffe britannique. En 2010, après une affaire de trafic d’influence impliquant trois députés travaillistes, le Premier ministre David Cameron, alors dans l’opposition, avait prophétisé que les affaires de lobbying seraient « le prochain grand scandale » qui ébranlerait les institutions britanniques. A l’époque, Jack Straw, lui, était ministre de la Justice du gouvernement de Gordon Brown. Il s’était alors écrié, indigné par ce scandale : « Il y a tant de colère au sein du groupe parlementaire travailliste au Parlement, tant d’incrédulité d’avoir été dupé. » L’humour anglais, peut-être.

>> LIRE AUSSI – Delhine Batho débarquée, elle dénonce les pressions des lobbies

Source : Europe1

Article précedent

Monaco crée la sensation à Arsenal !

Article suivant

Albi : un père menace de mort la directrice d’une école déjà endeuillée

Aucun Commentaire

Laisser un commentaire

PARTAGER

Trafic d’influence : deux ex-ministres britanniques piégés