ÉDITION – La sortie surprise du livre de l’ex-première dame est d’ores et déjà le gros coup de la rentrée littéraire.
Un hold-up. Le mot n’est pas trop fort pour qualifier la sortie, jeudi, du livre de Valérie Trierweiler. Dans le monde de l’édition, on salue l’effet de surprise, préservé jusqu’au dernier moment, qui accompagne la publication de Merci pour ce moment (Les Arènes), un ouvrage explosif pour François Hollande. D’autant que le succès devrait être au rendez-vous.
Le tirage, d’abord, est impressionnant. 200.000 exemplaires d’un coup, dont 100.000 seront mis en place dès jeudi matin. « C’est à peu près ce qu’on tire pour Amélie Nothomb à chaque rentrée littéraire », commente un journaliste spécialisé dans le secteur de l’édition. Un chiffre très rare dans le rayon « actualité et documents » des points de vente. En 2013, le livre d’une autre ancienne première dame, Cécilia Attias, avait été tiré à 70.000 exemplaires. Celui de Valérie Trierweiler est plus comparable au premier tome des mémoires de Jacques Chirac, imprimé à 260.000 exemplaires dans un premier temps en 2009, même si le tirage global avait finalement atteint les 390.000.
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Les libraires prévenus à la dernière minute. Imprimé en Allemagne et distribué par le groupe Hachette, l’ouvrage sera livré dans la nuit aux points de vente. « Nous le recevrons jeudi, vers 7 heures du matin », indique Pierre Coutelle, responsable du pôle Essais et savoirs à la librairie bordelaise Mollat. Soit quelques heures seulement avant la mise en vente. « C’est un délai qui rappelle les sorties d’Harry Potter« , s’amuse le libraire. Mais la principale différence avec les ouvrages ordinaires, c’est que les points de vente n’ont été prévenus que quelques jours avant. « Il arrive que l’on prépare la vente de livres dont on ne connaît pas le nom ni le contenu, ce qu’on appelle les X », poursuit Pierre Coutelle. « Mais en général, on nous prévient tout de même à l’avance de leur sortie. Là, ça n’a pas été le cas ».
« Des délais aussi courts, cela n’arrive que pour des « X », c’est-à-dire des documents politiques au contenu un peu périlleux, ou alors des livres du type Harry Potter, qui arrivaient peu de temps avant, et quasiment sous scellés », explique-t-il.
Un secret très bien gardé. Il est vrai que le contenu est inédit. Une ancienne première dame racontant sa relation intime avec le président de la République en exercice, c’est du jamais-vu dans l’histoire de la République. Ce qui explique la plus grande discrétion qui a entouré la préparation de l’ouvrage. « Ce livre était au secret depuis quatre mois », confie une source proche de l’éditeur. Un secret parfaitement préservé : même l’Elysée n’a appris l’existence de cette bombe qu’en début de semaine.
« Le plan média est parfait ». Cet effet de surprise est sans aucun doute l’une des clés du succès. « Ils ont été assez malins », observe Yves Durai, directeur des Editions du Moment. « En général, pour un livre très attendu, le danger est de feuilletonner pendant deux mois avant sa sortie. Là, l’effet de surprise est total. Il y a un choc dans l’opinion et un énorme buzz ».
« Le plan média est parfait », renchérit le directeur de collection d’un autre éditeur. « On apprend l’existence du livre mardi, les bonnes feuilles sortent dans la presse mercredi, et il est disponible dès jeudi. Et contrairement à ce qui arrive à la plupart des livres politiques, les bonnes feuilles ne tueront pas le bouquin. Au contraire, elles sont alléchantes : c’est du loft story ! »
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La guerre des éditeurs. En mars, des rumeurs annonçaient déjà un livre de Valérie Trierweiler. L’ex-première dame avait même rencontré le directeur éditorial d’Albin Michel, rapportaient L’Express et Le Figaro. La journaliste s’est finalement tournée vers Les Arènes, un éditeur indépendant plutôt connu jusqu’ici pour ses enquêtes au long cours et ses ouvrages historiques. « Elle avait discuté de ce livre avec plusieurs grandes maisons, avant de leur tourner le dos », persifle un concurrent.
Au Cherche Midi, par exemple, on ne cache pas son agacement. La direction de l’éditeur, qui avait publié le dernier ouvrage de Trierweiler, un album retraçant la campagne présidentielle de François Hollande, se refuse d’ailleurs à tout commentaire sur le nouveau livre de l’ex-première dame.
Mais celui-ci sera-t-il vraiment la poule aux œufs d’or annoncée ? Selon les calculs du Figaro, Valérie Trierweiler pourrait empocher plus de 600.000 euros de recettes. Et l’éditeur ? « Vendre 200.000 exemplaires, c’est compliqué. Il y a une grande part d’imprévu », tempère Yves Durai, aux Editions du Moment. « Pour ma part, je ne me serais pas lancé là-dedans ».
« Une large clientèle ». Cependant, « il y a une large clientèle pour ce type d’ouvrage », assure le libraire Pierre Coutelle, chez Mollat. « Certains l’achèteront parce qu’il parle de politique, d’autres pour les détails sur la vie privée, d’autres encore parce que cela leur parle dans leur vie de femme. Il y en a pour tous les goûts ».
Toutefois, « le grand enjeu pour l’éditeur, c’est la durée de vie du livre, au-delà du buzz médiatique », ajoute le libraire. « Cela dépend beaucoup du bouche-à-oreille. Le point positif, c’est donc que la réception du livre dépendra bel et bien du livre lui-même ! » Même si ce séisme littéraire devrait continuer à se répliquer dans le bruit de fond médiatique pendant quelque temps.
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